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tères devant eux qu'en paraboles obscures'.

Le nom de laïque fut inventé pour distinguer l'homme qui n'était pas engagé dans les ordres du corps général du clergé. Le titre de clerc se forma en même temps : laïci et xhepxos se lisent à chaque page des anciens auteurs. On se servait de la dénomination d'ecclésiastique, tantôt en parlant des chrétiens en opposition aux Gentils', tantôt en désignant le clergé, par rapport au reste des fidèles. Enfin, le titre de catholique, ou d'universelle, fut attribué à l'Église dès sa naissance. Eusèbe, Clément d'Alexandrie et saint Ignace en portent témoignage . Poleimon, le juge, ayant demandé à Pionos, martyr, de quelle Église il était, le confesseur répondit : De

1. Theodor. Epit. div. dogm., cap. xxiv. Aug. Serm. ad Neophytos, in append., tom. X, p. 845.

2. Euseb. lib. v, cap. vir; lib. v, cap. xxvII. Cyril. catech. 15, n. 4.

3. Euseb. lib. iv, cap. xv. Clem. Alex. Strom., lib. v11. Ignat. cap. ad Smyrn., n. 8.

l'Église catholique; car Jésus-Christ n'en connaît point d'autre'.

N'oublions pas, dans le développement de cette hiérarchie, que saint Jérôme compare à celle des anges, n'oublions pas les voies par où la chrétienté signalait sa sagesse et sa force, nous voulons dire les conseils et les persécutions. « Rappelez en votre mémoire, » dit La Bruyère, « rappelez ce grand et premier concile, où les Pères qui le composaient étaient remarquables chacun par quelques membres mutilés, ou par les cicatrices qui leur étaient restées des fureurs de la persécution: ils semblaient tenir de leurs plaies le droit de s'asseoir dans cette assemblée générale de toute l'Église. >>

Déplorable esprit de parti! Voltaire, qui montre souvent l'horreur du sang et l'amour de l'humanité, cherche à persuader qu'il y eut peu de martyrs dans l'Église pri

1. Act. Pion. ap. Bar. an. 254, n. 9.

mitive'; et, comme s'il n'eût jamais lu les historiens romains, il va presque jusqu'à nier cette première persécution dont Tacite nous a fait une si affreuse peinture. L'auteur de Zaïre, qui connaissait la puissance du malheur, a craint qu'on ne se laissât toucher par le tableau des souffrances des chrétiens; il a voulu leur arracher une couronne de martyre qui les rendait intéressants aux cœurs sensibles, et leur ravir jusqu'au charme de leurs pleurs.

Ainsi, nous avons tracé le tableau de la hiérarchie apostolique; joignez-y le clergé régulier, dont nous allons bientôt nous entretenir, et vous aurez l'Église entière de Jésus-Christ. Nous osons l'avancer: aucune autre religion sur la terre n'a offert un pareil système de bienfaits, de prudence et de prévoyance, de force et de douceur, de lois morales et de lois religieuses. Rien n'est plus sagement ordonné que ces cercles qui, partant du dernier chantre de village,

1. Dans son Essai sur les Moeurs. Voyez la note 5 à la fin du livre.

s'élèvent jusqu'au trône pontifical qu'ils supportent, et qui les couronne. L'Église ainsi, par ses différents degrés, touchait à nos divers besoins: arts, lettres, sciences, législation, politique, institutions littéraires, civiles et religieuses, fondations pour l'humanité, tous ces magnifiques bienfaits nous arrivaient par les rangs supérieurs de la hiérarchie, tandis que les détails de la charité et de la morale étaient répandus par les degrés inférieurs chez les dernières classes du peuple. Si jadis l'Église fut pauvre, depuis le dernier échelon jusqu'au premier, c'est que la chrétienté était indigente comme elle. Mais on ne saurait exiger que le clergé fût demeuré pauvre, quand l'opulence croissait autour de lui. Il aurait alors perdu toute considération, et certaines classes de la société avec lesquelles il n'aurait pu vivre, se fussent soustraites à son autorité morale. Le chef de l'Église était prince, pour pouvoir parler aux princes; les évêques, marchant de pair avec les Grands, osaient les instruire de leurs de

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voirs les prêtres séculiers et réguliers, au-dessus des nécessités de la vie, se mêlaient aux riches dont ils épuraient les mœurs, et le simple curé se rapprochait des pauvres, qu'il était destiné à soulager par ses bienfaits, et à consoler par son exemple.

Ce n'est pas que le plus indigent des prêtres ne pût aussi instruire les Grands du monde, et les rappeler à la vertu; mais il ne pouvait ni les suivre dans les habitudes de leur vie, comme le haut clergé, ni leur tenir un langage qu'ils eussent parfaitement entendu. La considération même dont ils jouissaient venait en partie des ordres supérieurs de l'Église. Il convient d'ailleurs à de grands peuples d'avoir un culte honorable, et des autels où l'infortuné puisse trouver des secours.

Au reste, il n'y a rien d'aussi beau dans l'histoire des institutions civiles et religieuses, que ce qui concerne l'autorité, les devoirs et l'investiture du prélat, parmi les Chrétiens. On y voit la parfaite image du pasteur des peuples et du ministre des au

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