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Autrement il serait impossible de distinguer le souvenir de la sensation d'avec la sensation. Aussi l'auteur se sauve-t-il par un A PEU PRÈS. Mais une situation d'organes qui n'est qu'à peu près la même, ne doit pas produire exactement le même effet >>.

P. 7. HELVETIUS: «< il est donc évident que se ressouvenir, c'est sentir »>.

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ROUSSEAU : «< il y a cette différence que la memoire produit une sensation semblable, et non pas le sentiment, et cette autre différence encore que la cause n'est pas la même ».

P. 7. HELVETIUS: « Or cette capacité [d'appercevoir les ressemblances ou les différences] n'est que la sensibilité physique même* ».

ROUSSEAU: «<* Voici qui est plaisant! après avoir légèrement affirmé qu'appercevoir et comparer sont la m(ême) chose, l'auteur conclud en grand appareil que juger, c'est sentir. La conclusion me paroit claire, mais c'est de l'antécédent qu'il s'agit ».

P. 8. HELVETIUS: « ces objets [que nous présente la nature] ont des rapports entr'eux; la connoissance de ces rapports forme ce qu'on appelle l'Esprit + ».

ROUSSEAU : «< + l'aptitude plus ou moins grande à les connoitre est ce qui fait le plus ou le moins d'esprit ».

« P. 9. HELVETIUS: « Or, comme le jugement n'est que cette appercevance elle-même [des ressemblances et des différences], ou du moins que le prononcé de cette appercevance, il s'ensuit que toutes les opérations de l'esprit se réduisent à juger + ».

ROUSSEAU : «<+ appercevoir les objets c'est sentir; appercevoir les rapports c'est juger ».

P. 9. HELVETIUS: « je puis dire également, Je juge ou je sens que de deux objets, l'un que j'appelle toise, fait sur moi une impression différente de celui que j'appelle pied; que la couleur que je nomme rouge agit sur mes yeux différemment de celle que je nomme jaune +».

ROUSSEAU : «<+ il y a ici un sophisme très subtil et très important à remarquer. Autre chose est sentir une différence entre une toise et un pied; et autre chose mesurer cette différence 7, dans la première opération l'esprit est purement passif, mais dans l'autre il est actif. Celui qui a plus de justesse dans l'esprit pour transporter par la pensée le pied sur la toise, et voir combien de fois il y est contenu est celui qui en ce point a l'esprit le plus juste et juge le mieux ».

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1. Autrement en surcharge; en dessous : Aussi l'auteur.

2. Après distinguer, on lit: si l'on a un barré.

3. De la sensation ajouté dans l'interligne.

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4. Cette note, écrite d'une encre beaucoup plus noire et brillante que les autres, a été ajoutée à une seconde lecture. Aussi se trouve-t-elle placée au bas de la page, les marges étant déjà occupées.

5. Une ajouté dans l'interligne; en dessous : la barré.

6. Après grande, on lit de barré.

7. Après différence, on lit: c'est barré.

8. Par la pensée ajouté dans l'interligne.

9. Après est, on lit: exacte[ment] barrė.

P. 9. HELVETIUS: « j'en conclus qu'en pareil cas juger n'est jamais. que sentir* ».

ROUSSEAU: « c'est autre chose; parce que la comparaison du jaune et du rouge n'est pas1 la sensation du jaune ni2 celle du rouge ».

P. 9. HELVETICS : « pour porter un jugement sur ce sujet [si la force est préférable à la grandeur du corps], ma mémoire doit me tracer. successivement les tableaux des situations différentes où je puis me trouver le plus communément dans le cours de ma vie || ».

ROUSSEAU Comment! la comparaison successive de mille idées est aussi un sentiment? Il ne faut pas di(s)puter des mots; mais l'auteur se fait là un étrange dictionnaire >>.

P. 10. HELVETIUS: «ce jugement [que la justice est préférable à la bonté n'est réellement qu'une sensation Þ ».

ROUSSEAU : « Nous avons vû qu'il est autre chose ».

P. 10. HELVETIUS: « on peut, comme l'expérience le prouve, en frappant l'oreille de certains sons, exciter en nous à peu près + les mêmes sensations qu'on éprouveroit à la présence même des objets ». ROUSSEAU : « voici encore le même A PEU PRÈS que ci-derrière employé d'une maniere aussi sophistique ».

P. 12. HELVETIUS : « Il résulte de ce que j'ai dit, que les jugements portés sur les méthodes que le hasard nous présente pour parvenir à un certain but ne sont proprement que des sensations; et que, dans l'homme, tout se réduit à sentir ».

ROUSSEAU : « même sophisme dans ce chapitre d'un bout à l'autre ».

P. 12. HELVETIUS: « Comment jusqu'à ce jour a-t-on supposé en nous une faculté de juger distincte de la faculté de sentir? L'on ne doit cette supposition, répondrai-je, qu'à l'impossibilité où l'on s'est cru jusqu'à présent d'expliquer d'aucune autre maniere certaines erreurs de l'esprit ».

ROUSSEAU « point du tout. c'est qu'il est très simple de supposer que deux opérations d'espèces différentes se font par deux différentes facultés ».

P. 40. HELVETIUS: « j'ai fait voir que toutes les erreurs de l'esprit ont leur source ou dans les passions, ou dans l'ignorance, soit de certains faits, soit de la vraie signification de certains mots. L'erreur n'est donc pas essentiellement attachée à la nature de l'esprit humain +>».

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ROUSSEAU: +Vous n'avez point prouvé que vôtres division fut exacte; votre conclusion n'est donc pas necessaire, ce qui n'empêche pas qu'en reci je ne sois de votre avis ».

P. 41. HELVETIUS: « rien ne m'empêche maintenant d'avancer que juger, comme je l'ai déjà prouvé +, n'est proprement que sentir ». ROUSSEAU : « + Vous n'avez rien prouvé sur ce point sinon que vous

1. N'est pas ajouté dans l'interligne; en dessous : est indépendant de barré. 2. Ni ajouté dans l'interligne; en dessous et de barré.

3. Après votre, on lit: conclusion barré.

ajoûtez au sens du mot SENTIR le sens que nous donnons au mot JUGER; vous réunissez sous un mot commun deux facultés essentiellement différentes >>.

P. 41. HELVETIUS : « l'esprit, en ce sens, n'est que sensibilité et mémoire + ».

ROUSSEAU: «<+ sensibilité, mémoire et jugement »>.

P. 54. HELVETIUS : « la probité, par rapport à un particulier, n'est, conformément à ma définition, que l'habitude des actions personnellement utiles à ce particulier +».

ROUSSEAU : « + Si ce particulier avoit à confier un dépot ou un secret important à quelque homme de probité, iroit-il chercher celui qui n'a que l'habitude des actions qui lui ont été personnellement utiles. Point du tout, il préféreroit à l'homme de bien qui lui a vendu la justice le scelerat qui n'a pas voulu se laisser corrompre. Quel galimathias! »

P. 58, note. HELVETIUS : « si l'on ne se porte ordinairement à certains excès que dans les disputes de religion, c'est que les autres disputes ne fournissent pas les mêmes prétextes ni les mêmes moyens d'être cruel ».

ROUSSEAU met en face un trait horizontal.

P. 60. HELVETIUS « Toute idée trop étrangere à notre maniere de voir et de sentir nous semble toujours ridicule ».

ROUSSEAU met en face un trait horizontal.

P. 69. HELVETIUS: « ils [ceux qui reconnoissent dans les autres plus d'esprit qu'en eux] ne font que donner à l'opinion publique la préférence sur la leur, et convenir que ces personnes sont plus estimées, sans être intérieurement convaincus qu'elles soient plus estimables* ».

ROUSSEAU: «< *Cela n'est pas vrai. J'ai longtemps médité sur un sujet, et j'en ai tiré quelques vues avec toute l'attention que j'étois capable d'y mettre. Je communique ce même sujet à un autre homme, et durant nôtre entretien je vois sortir du cerveau de cet homme des foules d'idées neuves et de grandes vues sur ce même sujet qui m'en avoit fourni si peu. Je ne suis pas assés stupide pour ne pas sentir l'avantage de ces vues et de ces idées sur les miennes; je suis donc forcé de sentir intérieurement que cet homme a plus d'esprit (que) moi, et de lui accorder dans mon cœur une estime supérieure à celle que j'ai pour moi. Tel fut le jugement que Philippe second porta de l'esprit d'Alonso Perez et qui fit que celui-ci s'estima perdu3 ».

P. 70, note. HELVETIUS: « Je suppose... qu'on eût prié ce même Fontenelle de donner, en fait de poésie, l'idée qu'il s'étoit formée de la perfection il est certain qu'il n'auroit, en ce genre, proposé d'autres

1. Après chercher, on lit : p[armi?] barré.

2. Ont été ajouté dans l'interligne; en dessous: sont barré.

3. Après qui, on lit: la lui barré.

4. Rousseau a écrit : plus d'esprit de (sic).

5. Toute cette note semble avoir été ajoutée à une seconde lecture: elle est d'une

encre plus noire et plus brillante.

regles fines que celles qu'il avoit lui-même aussi bien observées que

Corneille ».

ROUSSEAU : « + il ne s'agit pas de regles, il s'agit du genie qui trouve les grandes images et les grands sentimens. Fontenelle auroit pu se croire meilleur juge de tout cela que Corneille, mais non pas aussi bon inventeur. Il étoit fait pour sentir le génie de Corneille et non pas pour l'égaler. Si l'auteur ne croit pas qu'un homme puisse sentir la supériorité d'un autre dans son propre genre, assurément il se trompe beaucoup.

Moi-même je sens la sienne, quoique je ne sois pas de son sentiment. Je sens qu'il se trompe en homme qui a plus d'esprit que moi. Il a plus de vues et de plus lumineuses, mais les miennes sont plus saines 3. Fénelon l'emportoit sur moi à tous égards; cela est certain ».

P. 70. HELVETIUS: « la femme qui compte le soir avec son cuisinier, se croit aussi estimable qu'un savant +».

ROUSSEAU «elle l'est beaucoup davantage ».

P. 71. HELVETIUS: «< tous trois, peut-être, [trois praticiens qui sortent de la comédie] s'écrieront à la fois que Corneille est le plus grand génie du monde; cependant, si, pour se décharger du poids importun de l'estime, l'un d'eux ajoutoit que ce Corneille est à la vérité un grand homme, mais dans un genre frivole... »

ROUSSEAU: «<le poids de l'estime! Eh dieu! Rien n'est si doux que l'estime, même pour ceux qu'on croit supérieurs à soi ».

P. 73. HELVETIUS: « empêcher la subdivision d'un peuple en une infinité de familles ou de petites sociétés, dont les intérêts, presque toujours opposés à l'intérêt public, éteindroient à la fin dans les âmes toute espece d'amour pour la patrie ».

ROUSSEAU: « à réf : » (= à réfuter).

P. 79. HELVETIUS : « On ne peut conserver une vertu toujours forte et pure, sans avoir habituellement présent à l'esprit le principe de l'utilité publique, sans avoir une connaissance profonde des véritables intérêts de ce public, par conséquent de la morale et de la politique + ». ROUSSEAU souligne tout ce passage, met en face: «‹ à réf : » (= à réfuter), et commence à écrire : « à ce compte il n'y a de véri

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table.... »; plus tard, il a ajouté : probité que chez les philosophes. Ma foi, ils font fort bien de s'en faire compliment les uns aux

autres ».

P. 79, note. HELVETIUS: « M. de Fontenelle a défini le mensonge : Taire une vérité qu'on doit. Un homme sort du lit d'une femme, il en rencontre le mari: D'où venez-vous? lui dit celui-ci. Que lui répondre? Lui doit-on alors la vérité? Non, dit M. de Fontenelle, parce qu'alors la vérité n'est utile à personne ».

1. Et ajouté dans l'interligne; en-dessous : mais barré.

2. Le reste de la note a été écrit d'une autre encre et ajouté ultérieurement. 3. Après saines, on lit: M barré.

ROUSSEAU: «< *plaisant éxemple! Comme si celui qui ne se fait pas un scrupule de coucher avec la femme d'autrui, s'en faisoit un de dire un mensonge! Il se peut qu'un adultére soit obligé de mentir; mais l'homme de bien ne veut être ni menteur ni adultére ».

P. 81. HELVETIUS: « tout devient légitime et même vertueux pour le salut public ».

ROUSSEAU: « Ce salut public n'est rien si tous les particuliers ne sont en sureté ».

P. 101. HELVETIUS: «< il est encore certain que leur conversation [des gens du monde] doit, à cet égard, profiter des avantages de leur état ». ROUSSEAU met en face un trait horizontal.

P. 110. HELVETIUS: « Ce n'est qu'en contemplant la terre de ce point de vue, en s'élevant à cette hauteur, qu'elle se réduit insensiblement, devant un philosophe, à un petit espace, et qu'elle prend à ses yeux la forme d'une bourgade habitée par différentes familles qui portent le nom de Chinoise, d'Angloise, de Françoise, d'Italienne, enfin tous ceux qu'on donne aux différentes nations ».

ROUSSEAU: « beau ».

P. 113. HELVETIUS: «il [le grand homme] regarde comme un bienfait tout le mal que les hommes ne lui font pas, et comme un don tout ce que leur iniquité lui laisse ».

ROUSSEAU met en face un trait horizontal.

P. 114. HELVETIUS: «< il [l'homme de mérite] a tant de fois tenté, comme Phocion, de se tourner vers son ami pour lui demander s'il n'a pas dit une grande sottise+.... >>

ROUSSEAU : « l'auteur oublie qu'il a dit plus haut que le mépris de l'admira(li)on n'est pas vrai et que jamais l'admirateur n'est stupide aux yeux de l'admiré ».

P. 114. HELVETIUS: « La dernière cause de l'indulgence de l'homme de mérite tient à la vue nette qu'il a de la nécessité des jugements humains.... Une intelligence supérieure pourroit également, et par les objets qui se sont présentés à nous, deviner nos pensées; et par nos pensées, deviner le nombre et l'espece des objets que le hazard nous a offerts + ».

ROUSSEAU: «<+ Que l'auteur ne donne pas cette persuasion pour une raison d'indulgence aux autres hommes. Je suis bien convaincu que jamais homme n'avoit dit ni creu cela avant lui ».

P. 115. HELVETIUS « L'insulter [le sot], c'est reprocher au chêne de porter le gland plutôt que l'olive+».

ROUSSEAU : « + Sans doute que le méchant porte aussi des crimes de la même manière, et que le pendre c'est punir le chène de porter du gland ». P. 124. HELVETIUS: « Qu'un poëte dramatique fasse une bonne tragédie sur un plan déjà connu, c'est, dit-on, une plagiaire méprisable; mais qu'un général se serve, dans une campagne, de l'ordre de bataille

1. Que en surcharge; en dessous : qu'.

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