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des disciples de notre Sauveur Jésus-Christ, de n'avoir pas eu la foi, d'avoir mêlé au culte d'un Dieu suprême le culte de Mars, de Vénus, 'de Minerve, d'Apollon, qui n'existaient pas, et d'avoir conservé cette religion jusqu'au temps des Théodose. Heureusement les Goths, les Huns, les Vandales, les Hérules, les Lombards, les Francs, qui détruisirent cet empire, se soumirent à la vérité, et jouirent d'un bonheur qui fut refusé aux Scipion, aux Caton, aux Métellus, aux Émile, aux Cicéron, aux Varron, aux Virgile et aux Horace 1.

Tous ces grands hommes ont ignoré JésusChrist, qu'ils ne pouvaient connaître; mais ils n'ont point adoré le diable, comme le répètent tous les jours tant de pédans. Comment auraientils adoré le diable, puisqu'ils n'en avaient jamais entendu parler?

D'UNE CALOMNIE DE WARBURTON CONTRE CICERON, AU SUJET D'UN DIEU SUPRÊME.

Warburton a calomnié Cicéron et l'ancienne Rome', ainsi que ses contemporains. Il suppose hardiment que Cicéron a prononcé ces paroles dans son Oraison pour Flaccus : « Il est indigne << de la majesté de l'empire d'adorer un seul Dieu. >>

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Voyez les articles IDOLE, IDOLATRE, IDOLATRIE.

Préface de la 2° partie du tome 11 de la Légation de Moïse, p. 19.

(VOLT.)

Majestatem imperii non decuit ut unus tantum Deus colatur.

Qui le croirait? il n'y a pas un mot de cela dans l'Oraison pour Flaccus, ni dans aucun ouvrage de Cicéron. Il s'agit de quelques vexations dont on accusait Flaccus, qui avait exercé la préture dans l'Asie-Mineure. Il était secrètement poursuivi par les Juifs dont Rome était alors inondée; car ils avaient obtenu à force d'argent des priviléges à Rome, dans le temps même que Pompée, après Crassus, ayant pris Jérusalem, avait fait pendre leur roitelet Alexandre, fils d'Aristobule. Flaccus avait défendu qu'on fît passer des espèces d'or et d'argent à Jérusalem, parce que ces monnaies en revenaient altérées, et que le commerce en souffrait; il avait fait saisir l'or qu'on y portait en fraude. Cet or, dit Cicéron, est encore dans le trésor; Flaccus s'est conduit avec autant de désintéressement que Pompée.

Ensuite, Cicéron, avec son ironie ordinaire, prononce ces paroles : « Chaque pays a sa reli«<gion; nous avons la nôtre. Lorsque Jérusalem << était encore libre, et que les Juifs étaient en << paix, ces Juifs n'avaient pas moins en horreur <<< la splendeur de cet empire, la dignité du nom << romain, les institutions de nos ancêtres. Aujour<< d'hui cette nation a fait voir plus que jamais, « par la force de ses armes, ce qu'elle doit penser

<< de l'empire romain. Elle nous a montré

par sa << valeur combien elle est chère aux dieux immortels; elle nous l'a prouvé, en étant vaincue, dis«< persée, tributaire. »

Sua cuique civitati religio est; nostra nobis. Stantibus Hierosolymis, pacatisque Judæis, tamen istorum religio sacrorum, a splendore hujus imperi, gravitate nominis nostri, majorum institutis, abhorrebat: nunc vero, hoc magis, quod illa gens quid de imperio nostro sentiret, ostendit armis quam cara diis immortalibus esset, docuit, quod est victa, quod elocata, quod servata. (CICER., Oratio pro Flacco, cap. xxvIII.)

Il est donc très faux que jamais ni Cicéron ni aucun Romain ait dit qu'il ne convenait pas à la majesté de l'empire de reconnaître un Dieu suprême. Leur Jupiter, ce Zeus des Grecs, ce Jéhova des Phéniciens, fut toujours regardé comme le maître des dieux secondaires; on ne peut trop inculquer cette grande vérité.

LES ROMAINS ONT-ILS PRIS TOUS LEURS DIEUX DES GRECS?

Les Romains n'auraient-ils pas eu plusieurs dieux qu'ils ne tenaient pas des Grecs?

Par exemple, ils ne pouvaient avoir été plagiaires en adorant Cœlum, quand les Grecs adoraient Oúpavov; en s'adressant à Saturnus et à Tellus, quand les Grecs s'adressaient à Γῆ et à Χρόνος.

Ils appelaient Cérès celle que les Grecs nommaient Δηώ et Δημήτηρ.

Leur Neptune était Пoceday; leur Vénus était Appoin; leur Junon s'appelait en grec йpa; leur Proserpine, Kópn; enfin leur favori Mars Aρns; et leur favorite Bellone Evvé. Il n'y a pas là un nom qui se ressemble.

Les beaux esprits grecs et romains s'étaient-ils rencontrés, ou les uns avaient-ils pris des autres la chose dont ils déguisaient le nom?

Il est assez naturel que les Romains, sans consulter les Grecs, se soient fait des dieux du ciel, du temps, d'un être qui préside à la guerre, à la génération, aux moissons, sans aller demander des dieux en Grèce, comme ensuite ils allèrent leur demander des lois. Quand vous trouverez un nom qui ne ressemble à rien, il paraît juste de le croire originaire du pays.

Mais Jupiter, le maître de tous les dieux, n'est-il pas un mot appartenant à toutes les nations, depuis l'Euphrate jusqu'au Tibre? C'était Jov, Jovis chez les premiers Romains, Zeus chez les Grecs, Jéhova chez les Phéniciens, les Syriens, les Égyptiens.

Cette ressemblance ne paraît-elle pas servir à confirmer que tous ces peuples avaient la connaissance de l'Etre suprême? connaissance confuse à la vérité; mais quel homme peut l'avoir distincte?

DICTIONN. PHILOS. T. IV.

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SECTION III.

Examen de Spinosa.

Spinosa ne peut s'empêcher d'admettre une intelligence agissante dans la matière, et fesant un tout avec elle.

« Je dois conclure, dit-il, que l'être absolu << n'est ni pensée ni étendue, exclusivement l'un << de l'autre, mais que l'étendue et la pensée sont << les attributs nécessaires de l'Être absolu. >>

C'est en quoi il paraît différer de tous les athées de l'antiquité, Ocellus Lucanus, Héraclite, Démocrite, Leucippe, Straton, Épicure, Pythagore, Diagore, Zénon d'Élée, Anaximandre, et tant d'autres. Il en diffère surtout par sa méthode, qu'il avait entièrement puisée dans la lecture de Descartes, dont il a imité jusqu'au style.

Ce qui étonnera surtout la foule de ceux qui crient Spinosa! Spinosa! et qui ne l'ont jamais lu, c'est sa déclaration suivante. Il ne la fait pas pour éblouir les hommes, pour apaiser des théologiens, pour se donner des protecteurs, pour désarmer un parti; il parle en philosophe sans se nommer, sans s'afficher; il s'exprime en latin pour être entendu d'un très petit nombre. Voici sa profession de foi.

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Page 13, édition de Foppens. Suite de la note par R.

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