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les globes de Jupiter et de Saturne avec leurs satellites.

DONATIONS ENTRE PARTICULIERS.

Les donations des citoyens se traitent tout différemment. Les codes des nations sont convenus d'abord unanimement que personne ne peut donner le bien d'autrui, de même que personne ne peut le prendre. C'est la loi des particuliers.

En France la jurisprudence fut incertaine sur cet objet, comme sur presque tous les autres, jusqu'à l'année 1731, où l'équitable chancelier d'Aguesseau, ayant conçu le dessein de rendre enfin la loi uniforme, ébaucha très faiblement ce grand ouvrage par l'édit sur les donations. Il est rédigé en quarante-sept articles. Mais en voulant rendre uniformes toutes les formalités concernant les donations, on excepta la Flandre de la loi générale; et en exceptant la Flandre, on oublia l'Artois, qui devait jouir de la même exception; de sorte que six ans après la loi générale, on fut obligé d'en faire pour l'Artois une particulière.

On fit surtout ces nouveaux édits concernant les donations et les testamens, pour écarter tous les commentateurs qui embrouillent les lois; et on en a déja fait dix commentaires.

Ce qu'on peut remarquer sur les donations, c'est qu'elles s'étendent beaucoup plus loin qu'aux

particuliers à qui on fait un présent. Il faut payer pour chaque présent, au fermier du domaine royal, droit de contrôle, droit d'insinuation, droit de centième denier, droit de deux sous pour livre, droit de huit sous pour livre.

De sorte que toutes les fois que vous donnez à un citoyen, vous êtes bien plus libéral que vous ne pensez; vous avez le plaisir de contribuer à enrichir les fermiers généraux : mais cet argent ne sort point du royaume, comme celui qu'on paye à la cour de Rome.

DORMANS (LES SEPT-).

La fable imagina qu'un Épiménide avait dormi d'un somme pendant vingt-sept ans, et qu'à son réveil il fut tout étonné de trouver ses petits-enfans mariés qui lui demandaient son nom, ses amis morts, sa ville et les mœurs des habitans changées. C'était un beau champ à la critique, et un plaisant sujet de comédie. La légende a emprunté tous les traits de la fable, et les a grossis.

L'auteur de la Légende dorée ne fut pas le premier qui, au treizième siècle, au lieu d'un dormeur nous en donna sept, et en fit bravement sept martyrs. Il avait pris cette édifiante histoire chez Grégoire de Tours, écrivain véridique, qui l'avait prise chez Sigebert, qui l'avait prise chez Métaphraste, qui l'avait prise chez Nicéphore.

C'est ainsi que la vérité arrive aux hommes, de main en main.

Le révérend père Pierre Ribadeneira, de la compagnie de Jésus, enchérit encore sur la Légende dorée dans sa célèbre Fleur des saints, dont il est fait mention dans le Tartufe de Molière. Elle fut traduite, augmentée et enrichie de taillesdouces, par le révérend père Antoine Girard de la même société; rien n'y manque.

Quelques curieux seront peut-être bien aises de voir la prose du révérend père Girard; la voici :

« Du temps de l'empereur Dèce, l'église reçut « une furieuse et épouvantable bourrasque. Entre << les autres chrétiens, l'on prit sept frères, jeunes, << bien dispos, et de bonne grace, qui étaient en<< fans d'un chevalier d'Éphèse, et qui s'appelaient << Maximien, Marie, Martinien, Denis, Jean, Sérapion et Constantin. L'empereur leur ôta d'abord << leur ceinture dorée... Ils se cachèrent dans une << caverne; l'empereur en fit murer l'entrée pour «<les faire mourir de faim. >>

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Aussitôt ils s'endormirent tous sept, et ne se réveillèrent qu'après avoir dormi cent soixantedix-sept ans.

Le père Girard, loin de croire que ce soit un conte à dormir debout, en prouve l'authenticité par les argumens les plus démonstratifs : et, quand on n'aurait d'autre preuve que les noms des sept

assoupis, cela suffirait; on ne s'avise pas de donner des noms à des gens qui n'ont jamais existé. Les Sept-Dormans ne pouvaient être ni trompés ni trompeurs. Aussi ce n'est pas pour contester cette histoire que nous en parlons, mais seulement pour remarquer qu'il n'y a pas un seul événement fabuleux de l'antiquité qui n'ait été rectifié par les anciens légendaires. Toute l'histoire d'OEdipe, d'Hercule, de Thésée, se trouve chez eux accommodée à leur manière. Ils ont peu inventé, mais ils ont beaucoup perfectionné.

J'avoue ingénument que je ne sais pas d'où Nicéphore avait tiré cette belle histoire. Je suppose que c'était de la tradition d'Éphèse; car la caverne des Sept-Dormans, et la petite église qui leur est dédiée, subsistent encore... Les moins éveillés des pauvres Grecs y viennent faire leurs dévotions. Le chevalier Ricaut et plusieurs autres voyageurs anglais ont vu ces deux monumens; mais pour leurs dévotions, ils ne les y ont pas faites.

Terminons ce petit article par le raisonnement d'Abbadie Voilà des mémoriaux institués pour célébrer à jamais l'aventure des Sept-Dormans; aucun Grec n'en a jamais douté dans Éphèse; ces Grecs n'ont pu être abusés; ils n'ont pu abuser personne : donc l'histoire des Sept-Dormans est incontestable.

DROIT.

Droit des gens, droit naturel, droit public.

SECTION PREMIÈRE.

Je ne connais rien de mieux sur ce sujet que ces vers de l'Arioste, au chant XLIV (st. 2):

• Fan lega oggi re, papi e imperatori,

« Doman saran nemici capitali :

• Perchè, qual l'apparenze esteriori,

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Et que,

malgré saint Jacque et saint Matthieu, Leur intérêt est leur unique dieu.

S'il n'y avait que deux hommes sur la terre, comment vivraient-ils ensemble? ils s'aideraient, se nuiraient, se caresseraient, se diraient des injures, se battraient, se réconcilieraient, ne pourraient vivre l'un sans l'autre, ni l'un avec l'autre. Ils feraient comme tous les hommes font aujourd'hui. Ils ont le don du raisonnement; oui, mais ils ont aussi le don de l'instinct: et ils sentiront, et ils raisonneront, et ils agiront toujours comme ils y sont destinés par la nature.

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