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fut confiée au Centaure Chiron, qui ne lui donna d'autre nourriture que de la moëlle de Lion; ce qui lui infpira ce courage indomptable & cette colère implacable, dont les Poëtes ont tant parlé. Il lui endurcit le corps, en l'accoutumant aux exercices les plus pénibles; il lui apprit à fe tenir à cheval, en le portant fur fa croupe; il lui enfeigna l'art militaire, la Mufique, la Morale, la Médecine, &c.

Lorfque les Grecs fe préparèrent à marcher contre Troye, Thétis, toujours inquiette fur le fort de fon fils, apprit d'un côté que, s'il alloit à cette expédition, il y périroit ; & de l'autre, que Calchas avoit prédit que la Ville ne feroit jamais prife fans Achille. Il étoit donc queftion d'empêcher qu'on ne le forçât de prendre part à ce fiége.

Pour le dérober aux inftances des Grecs, auxquels il étoit fi important d'avoir avec eux un Capitaine, dont la préfence étoit néceffaire pour le fuccès de leur entreprise, (voyez Fatalités,) la Déeffe retira fon fils de l'antre de Chiron, & l'envoya à la Cour de Lycomèdes, Roi de l'Ile de Scyros, où il fe déguifa en fille, fous le nom de Pyrra. Sa beauté favorifoit ce déguisement: il a paffé pour l'homme le plus beau & le mieux fait de fon fiècle. Il fe fit aimer de Déï

damie, fille du Roi, & en eut un fils nommé Pyrrhus. (Voy. ce mot.)

Les Grecs l'ayant cherché pendant long-temps, on apprit enfin le lieu de fa retraite ; & Ulyffe fut député à Scyros pour l'engager à fe joindre à eux. La difficulté étoit de le démêler au travers de fon déguifement, parmi toutes les filles de la Cour. Ulyffe s'avifa de leur préfenter différens bijoux, parmi lesquels étoient des armes : toutes chifirent fuivant leur goût; Achille feul prit les armes. Ce choix le trahit; Ulyffe le connut & l'em

mena.

Thétis, obligée de confentir au départ de fon fils, voulut encore ajouter une nouvelle précaution à celles qu'elle avoit prifes pour le garantir de la mort: elle pria Vulcain de lui faire des armes à l'épreuve de toute attaque humaine. L'ouvrage étant fait, le Dieu exigea,pour fon falaire, les faveurs de la Déeffe. La néceffité lui fit promettre tout ce que Vulcain voulut, mais à condition, dit-elle, qu'elle effayeroit fi les armes étoient propres à Achille qui étoit de la même taille qu'elle. Elle ne les eut pas plutôt endoffées, qu'elle prit la fuite; Vulcain, qui étoit boiteux, ne put l'atteindre ; il lui jetta fon marteau, & la bleffa au talon. Outre ces armes, fa mère lui donna des

chevaux immortels. Voyez Chevaux, Pélias.

Achille, avant de joindre l'armée des Grecs, fit la conquête de Lefbos, où il trouva une Princeffe qui devint amoureufe de lui. C'est de cette par ticularité, rapportée par Euphorion, Poëte très-connu parmi les anciens, que le grand Racine a pris le dénouement de fon Iphigénie. Voyez Iphigénie.

Arrivé devant Troye, il livra aux ennemis une infinité de grands combats: mais fa carrière victorieufe fut interrompue au fujet d'une querelle qu'il eut avec Agamemnon. Celui-ci fut obligé de fe défaire de Chryfeïs fon efclave, (voyez Chryfeis;) mais il voulut auffi qu'Achille abandonnât la fienne. (Voyez Brifeïs.) Achille fut tellement irrité de cet affront qu'il fut obligé de fouffrir, qu'il fe tint enfermé dans fa tente, fans fe mêler aucunement de la guerre. Cette circonftance de fa vie eft le fujet de beaucoup de tableaux & de morceaux de tapifferie, connus fous le nom de colère d'Achille. C'eft auffi le fujet de l'Iliade d'Homère.

Rien ne fut capable de le faire changer de réfolution, que la mort de fon cher ami Patrocle. Pour le rendre redoutable aux Troyens, il lui prêta fes armes, fous lefquelles on prenoit Patrocle pour Achille.

Hector, qui, depuis longtemps, cherchoit l'occasion de fe battre contre Achille, crut l'avoir trouvée. Il tua Patrocle, & prit fes armes. Vulcain, à la prière de Thétis, lui en fit de nouvelles, avec lefquelles il reprit fes fonctions militaires, pour venger la mort de Patrocle. Il fe battit en effet avec Hector, le tua, l'attacha à fon chariot, & le traîna autour des murailles de Troye. Priam, en perfonne, alla lui demander le corps de fon fils, & ne l'obtint que moyennant une rançon confi→ dérable.

Les circonftances de fa mort font racontées différemment par différens Auteurs Les uns difent qu'Achille ayant vû Polyxène, fille de Priam, auprès de Caffandre, qui offroit un facrifice à Apollon, en étoit devenu amoureux & l'avoit demandée en mariage; qu'Hector n'avoit voulu la lui accorder qu'à condition qu'il prendroit les armes pour les Troyens contre les Grecs ; & que ce fut pour punir cette propofition, qu'il traîna le ca→ davre d'Hector autour des murailles de la Ville. Lorsque Priam alla redemander le de fon fils, pour fléchir Achille, il fe fit accompagner de Polyxène, dont il conclut le mariage avec le jeune Héros. Le jour pris pour la folemnité, qui devoit fe faire à Troye

corps

dans le temple d'Apollon, Paris s'étoit caché derrière l'autel, d'où, pour venger la mort d'Hector fon frère, il tira une fléche, qui bleffa Achille à celui des deux talons qui n'avoit point été trempé dans le Styx, & dans l'endroit qui fut depuis nommé le tendon d'Achille; & il mourut de cette bleffure. D'autres ont dit que c'étoit 'Apollon lui-même qui, à la prière de Neptune, s'étoit déguifé, & avoit fait le coup. D'autres enfin, comme Ovidifent dans un com

de,

que, bat qui fe donnoit un jour de vant les murs de Troye, Achil le faifoit un horrible carnage des Troyens, tandis que Paris, qui combattoit de fon côté, ne dirigeoit fes coups que contre des gens obfcurs & fans nom. Apollon tourna l'arc de Paris du côté d'Achille, & conduifit fi bien la fléche, que le Héros en fut mortellement bleffé.

le Promontoire de Sigée, où il fut inhumé. Thétis, accompagnée des Déeffes marines, vint rendre à fon fils les devoirs funèbres: les Mufes s'y trouvèrent auffi, & célébréèrent fa mémoire par des chants lugubres.

Les Grecs faifoient un tel cas d'Achille, qu'après fa mort, il s'éleva une querelle parmi eux, pour fçavoir qui feroit le fucceffeur de fes armes; & l'on fut prêt de fe battre, pour les avoir. Il fut enfin jugé qu'Ajax, fils de Telamon, (voyez Ajax) & Ulyffe pouvoient feuls fe les difputer. Ils plaidèrent leur caufe devant les Grecs affemblés ; & les armes furent adjugées à Ulyffe.

Les Grecs firent à Achille de magnifiques funérailles, fur

Le nom de ce Héros devint l'expreffion de la bravoure & de la force, tant pour les exploits militaires, que pour ceux de Venus. Pour les premiers, Homère & plufieurs autres Poëtes les ont chantés ; & il feroit trop long d'en rapporter les circonftances. Quant aux autres, il devint père de trèsbonne heure avec Déïdamie. Peu de temps après, felon quelques Auteurs, il eut le même avantage fur Iphigénie, avant qu'elle fût facrifiée; circonftance dont le grand Racine a fi bien profité, en faisant, de l'amour de ce Héros pour la Princeffe, le nceud de fon Iphigénie. Arrivé devant Troye, il devint amoureux d'Hélène, qu'il vit un jour fur les murs de la Ville: il eut recours à fa mère, pour qu'elle trouvât un moyen pour le faire jouir des bonnes graces de cette femme; Thétis le fatisfit, en mettant à fa difpofition un phantome de la belle Hélène. Briféïs fut enfuite l'objet de fes amours, & enfin Polixène, dont il avoit voulu faire fa femme. La mort n'éteignit point l'amour qu'il avoit conçu pour

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pour

cette Princeffe; & s'il demanda qu'on la lui facrifiât, c'étoit fe l'attacher dans l'autre monde. Rien n'arrêtoit fes défirs; après avoir tué l'Amazone Penthéfilée, il en devint amoureux ; on a même prétendu que, dans les enfers, il avoit époufé Médée & Hélène. A l'égard de celle-ci, d'autres ont dit que c'étoit dans l'Ile Achillea, dont on va parler à l'article fuivant, qu'il l'époufa après la mort, & qu'il en eut un fils qui s'apella Euphorion, qui fut tué d'un coup de foudre, par Jupiter, pour avoir manqué de complaisance pour ce Dieu. D'autres lui donnent pour femme, toujours après fa mort, & dans la même Ifle, Iphigénie, que Diane y avoit tranfportée, après lui avoir communiqué le don d'une jeuneffe immortelle, & la nature divine: mais la plus commune opinion lui donnoit Hélène pour femme.

Au refte, fon goût pour les femmes n'étoit pas exclufif; & l'on a regardé comme trèséquivoque, pour ne rien dire de plus, fon attachement pour Diomède, pour Antilocus & pour Patrocle: : on a même été jufqu'à dire que Troilus, fils de Priam, pendant qu'il réfiftoit à fes emportemens, fût étouffé dans fes bras. (Voyez Troïle,)

On

ne doit pas être étonné, fi l'on parle des mariages con

tractés par Achille après fa mort. Il fut mis au nombre des Dieux, & eut, dans l'Ifsle Achillée, tous les honneurs Divins; un temple, un autel, des facrifices, des oracles; il y fit auffi des miracles. En voici deux entr'autres.

On a dit qu'Homère, gardant des brebis auprès du tombeau d'Achille, obtint, par fes offrandes, que ce Héros fe montrât à lui; mais il fe fit voir avec une lumière fi écla tante, que le Poëte en devint aveugle.

Les Amazones abordèrent un jour dans l'Ifle Achillée, & obligèrent les habitans de travailler à couper les arbres plantés autour du Temple d'Achille: mais, dès le premier coup, les coignées rebrouffèrent contre les travailleurs, & les tuèrent au pied des arbres mêmes. Les Amazones voulurent, nonobftant ce prodige, entrer à cheval dans le temple; mais Achille, d'un feul regard, épouvanta tellement les chevaux, qu'ils reculèrent en arrière, jettèrent à terre les Amazones qu'ils portoient, les dévorèrent, & fe précipitèrent dans la mer; les vaiffeaux qui avoient apporté les Amazones, furent fi violemment agités par une tempête fubite, qu'ils fe brifèrent les uns contre les autres, & furent engloutis. Le lieu Saint, qui avoit été prophané par le carnage que les

chevaux

chevaux avoient fait, fut purifié par les eaux de la mer qu'Achille y fit monter.

ros,

ACHILLEA, Ifle du Pont-Euxin, que l'on nommoit auffi Leuce, l'Ile des HéI'Ifle Macaron, ou l'Isle des bienheureux, &c. étoit, felon quelques uns, vis-àvis du Boryftêne, &, felon d'autres, vis-à-vis du Danube. On l'appella Achillea, parce que Thétis ou Neptune l'avoient donnée à Achille, que le tombeau & le Temple de ce Héros y étoient. Il n'étoit pas le feul qui l'habitât, on y avoit vû auffi les deux Ajax, Patrocle, Anthilocus, &c. Au refte, on trouve, dans les anciens, touchant cette Ifle, beaucoup de particularités, qu'il feroit trop long de

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7. » Je ne fçais pourquoi, dit » M. Dacier, fur ce dernier, les Interprêtes d'Héfiode & » de Longin ont voulu que » Α' χλὺς foit ici la Déeffe des » Ténèbres. C'est fans doute » la Trifteffe, comme M. le » Fêvre l'a remarqué. Voici » le portrait qu'Héfiode en fait: » La Trifteffe fe tenoit près de» là, toute baignée de pleurs, » pâle, fèche, défaite, les ge»> noux fort gros & les ongles » fort longs: fes narines étoient » une fontaine d'humeurs; le » fang couloit de fes joues; el» le grinçoit les dents & cou» vroit fes épaules de poussière. » Il feroit bien difficile que >> cela pût convenir à la Déeffe » des ténèbres. Lorfqu'Hefy» chius a marqué ἀχλύμηνος λυπάμηνος, il a fait affez » voir que aλus peut fort bien » être prife pour Xuan, Trif» teffe. Dans ce même chapi»tre, Longin s'eft fervi de aucun détail. » αχλύς pour dire les ténè ACHLYS. Quelques-» bres, une épaiffe obfcurité : uns ont regardé ce nom com» & c'eft peut-être ce qui a me celui du premier Etre, qui » trompé les Interprêtes. « existoit avant le monde, même avant le Chaos; le feul qui fût éternel, & duquel tous les

rapporter.

ACHILLÉES, fêtes en l'honneur d'Achille, qui fe célébroient à Brafies, ou Prafies, où ce Héros avoit un Temple, mais on n'en fçait

autres Dieux avoient été produits. Mais ce nom eft plus connu pour être celui d'un perfonnage poetique, dont parle Héfiode, dans le bouclier d'Hercule, vers 264; & Longin, Traité du Sublime, chap. Tome I.

ACHOR, Dieu des mouches, ou chaffe-mouches. Les habitans de Cyréne, au rapport

de Pline, offroient des facrifices à ce Dieu, pour être délivrés de ces infectes, qui caufoient quelquefois dans leur pays des maladies contagieufes. Cet Auteur ajoute qu'elles mouroient auffi-tôt qu'on

B

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