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y retrouver éparses quelques-unes de ces vérités éternelles que l'on croit étouffer en les niant, que du moins on veut déprécier en les présentant comme des dogmes d'anarchie et de rébellion, et comme des principes enfantés par le délire de la liberté ou les vaines spéculations de l'idéologie, mais qui sont également démontrées par l'autorité du raisonnement, par l'expérience des nations et la sagesse des siècles. Tout le reste, dans ces pénibles recherchés, peut procurer quelque satisfaction à l'orgueil d'un savant, présenter quelque attrait à la curiosité; mais, il faut le dire, on n'y trouve rien qui puisse servir à perfectionner l'état social, et à prévenir les révolutions qui le bouleversent.

Ces réflexions ont toujours été présentes à notre esprit, en traçant les précis de l'histoire des différentes nations; l'histoire de la Pologne fournira un nouvel exemple de leur application; nous nous attacherons à recueillir ce qui est certain et surtout ce qui est utile, sans nous arrêter aux vaines recherches, dont le résultat he vaut pas le travail qu'elles

-coûtent.

De la Pologne depuis le 6o sele jusqu'à l'avènement de la dynastie de Piast; en 842.

La Pologne était connue dans l'antiquité, sous le nom de Seythie d'Europe; il paraît qu'au commencement du 6° siècle des peuples guerriers originaires d'Esclavonie s'emparèrent de la Pologne, de la Russie, de la Bohëme, et s'y établirent. Ceux qui restèrent en Pologne, étaient venus sous le commandement d'un chef nommé Lech; et, après sa mort, ils prirent le nom de polak (polonais) qui, dans la langue du pays, signifie après Lech (1)..

(1) Essai sur le rétablissement de l'ancienne forme du gouvernement de Pologne....., par M. le comte Wielhorski, pag. 3.

Les descendans de Lech succédèrent à son autorité. Ici se présente déjà la question de savoir si la nation élisait son chef, si la naissance conférait le sceptre de plein droit, ou, si enfin les deux titres devaient concourir; nous nous réservons de l'examiner plus tard, lorsque les monumens historiques nous fourniront les moyens de la résoudre. Quelque fût donc le droit en vertu duquel régnèrent les enfans de Lech, il est certain que la Pologne reconnut leur autorité sans difficulté. Il paraîtrait cependant que la manière dont ces chefs avaient gouverné l'état, inspira à la nation, après l'extinction de leur race, le désir de se soustraire au pouvoir, d'un seul. Elle espéra plus de liberté en partageant l'autorité entre plusieurs chefs; en conséquence, douze gouverneurs furent choisis; on confia à chacun l'administration, d'une province, avec un certain nombre de troupes pour, la défendre. On les appela Palatins ou Woyewod (1).

Le but qu'on s'était proposé ne fut pas rempli; mais, que la prudence humaine ait été, dans cette occasion, trompée par le résultat, ce n'est pas ce qu'il est important de remarquer ici; en rappelant cet événement, nous avons voulu surtout indiquer l'origine des Palatins polonais, dont la suite du temps nous fera connaître l'influence et les prérogatives. Un chef unique succéda aux douze palatins: les douze palatins, de nouveau revêtus de l'autorité suprême, en furent de nouveau dépouillés; et Frémislas monta sur le trône en 760, élu par la nation.

Parmi les héritiers de Prémislas, plusieurs portèrent le nom de Leschus, toujours cher et respectable aux Polonais.' L'un d'eux, Leschus III, laissa un fils légitime nommé Popiel, et un grand nombre d'enfans naturels. La couronne fut l'héritage du premier, et tous les autres reçurent des

(1) Ce nom signifie général d'armée et de guerre. (Voy. Cromer, liv. 2,

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fiefs qui relevaient directement du roi (1). Les droits conférés à ces feudataires sur leurs vassaux, étaient alors peu importans; mais c'est là la source des prérogatives si étendues et si odieuses, que s'arrogea par la suite la noblesse polonaise.

Popiel et son fils furent deux monstres souillés de tous les crimes, et plongés dans la plus honteuse débauche. A la mort de Popiel II, le royaume se trouva livré à l'anarchie; les possesseurs des fiefs et les palatins voulaient envahir l'autorité ; le peuple, fatigué de leurs vexations, résistait courageusement et réclamait la liberté. Cette crise violente se termina plus heureusement qu'on ne devait l'espérer, et le choix unanime de la nation appela au trône un homme que sa naissance et son caractère semblaient devoir eni éloigner. Il se nommait Piast, il est le chef de la seconde race des rois de Pologne.

S II.

Dynastie de Piast jusqu'à Jagellon. — 842 à 1386.

par

Le sceptre passa de père en fils pendant plusieurs générations, et il est incertain, si le vœu de la nation fut consulté; mais, en 965, Miecislas fut appelé au trône de ses aïeux une élection solennelle. Ce prince embrassa le christianisme; et, par la faveur qu'il lui accorda, il le propagea avec beaucoup de rapidité dans ses états.

Cet événement mérite de fixer l'attention à raison de ses conséquences. On a écrit que les lumières du christianisme ont adouci les mœurs des peuples, détruit des cultes barbares, aboli l'esclavage, et contribué efficacement au progrès de la civilisation. Sans prétendre contester ces résultats en

(1) Ce titre de roi n'est pas réellement celui que portaient les princes polomais à cette époque, du moius ils n'en ont pas été tous revêtus sans interruption jusqu'en 1320; à cette époque il a été donné à tous sans exception.

général, il faut reconnaître que des effets bien différens furent la suite de l'introduction de la religion chrétienne en Pologne. On précha, à des peuples plongés dans l'ignorance, l'obéissance passive, comme un précepte de l'évangile; l'on enseigna que résister à la tyrannie des pro priétaires des fiefs, c'était méconnaître l'autorité de Dieu: à l'aide de ces maximes, les nobles accrurent singulièrement leur pouvoir; et, par une étrange contradiction, cette religion qui regarde, comme une des premières vertus, l'amour de ses semblables servit à consolider le droit odieux, en vertu duquel un noble polonais pouvait tuer impunément son vassal: tant il est vrai que les hommes abusent des meilleures et des plus saintes choses.

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A la mort de Miecislas, Boleslas, son fils, monta sur le trône, et prit le titre de roi, l'an 1001 selon les uns, et T'an 1014 selon les autres. Son règne et celui de son fils Miecíslas II furent troublés par des guerres continuelles avec les peuples voisins, et surtout avec les Russes.

encore

Miecislas II laissa en mourant son fils Casimir, enfant, sous la tutelle de sa mère Richsa. Le gouvernement de cette princesse devait nécessairement itriter les Polonais. Elle les accablait des impôts les plus onéreux, et en faisait faire la perception avec une rigueur extrême. La nation éclata en murmures; la sédition suivit les plaintes, et la reine et son fils furent obligés de fuir hors du royaume.

En renversant la tyrannie de la reine régente, les palatins et les seigneurs polonais avaient en vue de s'emparer de l'autorité et non de rendre la liberté à leur patrie. Ces intentions coupables se manifestèrent bientôt; mais lorsque les grands eurent le pouvoir entre les mains, ils ne purent s'entendre pour le partager. Les haines et les rivalités les divisèrent; et le peuple se trouva livré à une foule de petits despotes, en guerre les uns contre les autres.

Fatiguée de sa propre tyrannie, inquiétée par les peuples voisins, tremblant que la nation ne secouât son joug

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odieux, l'aristocratie polonaise sentit la nécessité de rappeler son roi. On chercha Casimir, et on le trouva dans un cloître en France: il n'osa accepter la couronne qui lui était offerte qu'après avoir été relevé de ses vœux par le pape: cette hésitation était plus digne d'un moine d'un roi. Le pape Benoît IX lui accorda la permission de régner, à condition que les Polonais paieraient à la cour de Rome le denier de saint Pierre, et qu'ils se couperaient les cheveux et la barbe.

que

Jusqu'ici on a pu remarquer que si la couronne de Pologne était élective, du moins l'usage était de choisir le monarque parmi les enfans, du roi et l'exemple de Casimir prouve que cet usage était devenu un principe dont on ne s'écartait que rarement, et dans les cas où il était impossible 'de l'observer.

Le clergé, dont l'influence avait beaucoup contribué à placer Casimir sur le trône, fut tout puissant sous son règne; ses priviléges et ceux de la noblesse s'accrurent; des monastères furent fondés, et le peuple fut malheureux.

La Pologne eut à soutenir des guerres perpétuelles contre les Moscovites, les Prussiens, les Bohémiens, et même contre l'empire. Presque toujours les Polonais combattirent avec

courage; plus d'une fois cependant ils furent contraints à offrir la paix ou à la recevoir aux conditions les plus dures; c'est ainsi que le roi Boleslas IV fut contraint de partager la Silésie entre les trois fils de l'empereur Frédéric 1, toutefois cette province ne cessa pas d'être regardée comme fief de la couronne de Pologne. Dans l'intérieur, l'état n'était pas plus heureux. Boleslas III, mort en 1159, avait fait le partage du royaume entre ses enfans, pour prévenir entre eux toutes rivalités: son attente fut trompée; et les frères, armés les uns contre les autres, déchirèrent leur patrie qu'ils auraient dû gouverner.

Au milieu de pareilles agitations, on ne songeait guère à établir le gouvernement sur des bases solides: « Le royaume

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