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Leurs jugemens sont sans appels; leurs arrêts ne peuvent être modifiés que par eux-mêmes.

Ils jugent sans entendre la défense des accusés.

Les seigneurs qui composent le conseil des dix, doivent être de dix familles différentes, et n'avoir aucune proximité de parenté entre eux.

Le conseil des dix, peut déposer, emprisonner, juger à mort tous les magistrats et le doge lui-même.

Les dix ont séance et voix délibérative dans le sénat. Les attributions du conseil comprennent toutes les affaires qui intéressent la sûreté de l'état, toutes les accusations criminelles dans lesquelles sont impliqués des patriciens, des ecclésiastiques ou des secrétaires de la chambre ducale, tous les délits de quelque importance, commis hors de l'enceinte de Venise et des lagunes,-tous les délits commis sur des barques, les offenses faites à des masques, -les affaires des théâtres,-celles des fondations de charité, -celles des forêts et des mines dans les cas déterminés, — l'appel des sentences contre les blasphémateurs, la police de la librairie, et tout ce qui est déclaré de son ressort par les lois et les coutumes.

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Quand le conseil reçoit une dénonciation, un de ses trois présidens recueille les charges, entend les témoins, fait arrêter le prévenu, l'interroge, et fait écrire ses réponses. Il rend compte de son information aux deux autres chefs, et tous trois délibèrent pour savoir si l'affaire sera portée au conseil des dix.

Dans les cas d'affirmative, les trois présidens deviennent ses accusateurs; ils sont en même temps ses juges.

Le prévenu ne peut avoir de défenseur, ni être confronté avec les témoins.

S'il est condamné, le tribunal peut le faire pendre avec un voile sur la tête, ou le faire noyer dans un canal, ou le faire étrangler dans la prison.

S VIII. Inquisition d'état.

Il y a trois inquisiteurs d'état.

Deux sont tirés du conseil des dix, et un d'entre les conseillers du collége.

Le pouvoir des inquisiteurs est absolu.

Ils ont droit de vie et de mort sur tous les citoyens, sur le doge même.

Le conseil des dix fait choix des inquisiteurs : ce choix doit rester secret.

On lit les sentences rendues et signées seulement d'un secrétaire.

En sortant de charge, les inquisiteurs ne peuvent prétendre à un emploi important.

Les deux inquisiteurs noirs exercent leurs fonctions pendant un an, l'inquisiteur rouge, ou le conseiller du doge, pendant huit mois.

Les inquisiteurs ne sont assujétis à d'autres règles qu'à celles de l'humanité dans les sentences.

Le conseil des dix nomme un inquisiteur suppléant que deux des inquisiteurs en charge peuvent appeler pour concourir avec eux au jugement de leur troisième collègue.

Le tribunal délègue ses pouvoirs; par une simple commission, il investit un agent quelconqne d'une autorité illimitée affranchie de toute responsabilité et de toute forme.

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ÉDIT DE LA MUNICIPALITÉ DE MILAN,

SUR L'ABOLITION DES TITRES.

CITOYENS, tandis que les braves armées de la république française ont arboré sur nos remparts le glorieux drapeau de la liberté, qu'elles l'ont illustré par leur sang et affermi par tant de victoires; tandis qu'elles ont chassé le despote qui nous tenait courbés sous un infâme joug; tandis qu'une heureuse égalité dissipe les préjugés, rapproche toutes les classes de citoyens, dispose le peuple à l'exercice de sa souveraineté, faudra-t-il voir encore les marques monstrueuses de la féodalité abolie, les odieuses distinctions de l'aristocratie, les emblêmes honteux de notre esclavage contraster avec les couleurs républicaines et avec l'uniforme des hommes libres? Entendra-t-on encore retentir les noms excellenciels et illustrissimes, de comte, de marquis, de baron, de prince, de duc, et ces distinctions qui nous reprochent notre faiblesse et un ridicule orgueil? Y aura-t-il encore des hommes assez vils pour les prononcer et pour s'en glorifier?

Non, citoyens, la liberté que vous avez adoptée, les sentimens de reconnaissance et d'attachement envers la républi que dans les crises les plus dangereuses, les moyens que votre courage, votre énergie vous fournissent, les légions que vous avez formées, et qui se trouvent déjà en présence de l'ennemi commun, voilà des titres trop grands, trop précieux pour être déshonorés par les emblêmes, par les blasons aristocratiques et royaux qui sont encore suspendus à plusieurs maisons et édifices de la ville.

Vous ne devez plus tarder à détruire toutes ces marques de tyrannie féodale; elles contrastent trop avec la glorieuse inscription qui ceint le front de vos guerriers, des légionnaires lombards. Les mots de liberté ou la mort ne peuvent s'accorder en même temps et sous un gouvernement républicain, avec l'aigle à deux têtes qui montre encore ses serres rapaces et rappelle votre servitude passée.

Et vous qui vous appelez nobles, suivez l'exemple de ceux

240 qui ont déjà fait un sacrifice volontaire de leurs parchemins et de leurs priviléges à votre municipalité; croyez enfin qu'il est injuste d'éterniser en vous l'orgueil de vos aïeux: devenez peuple, et vous serez plus grands aux yeux du peuple et de la postérité.

MILAN, ABOLITION DES TITRES.

1o La noblesse étant abolie pour toujours, personne ne pourra porter ni prendre aucun titre indiquant la noblesse, et chacun sera appelé du nom de citoyen ou du titre de sa charge.

2° Toutes les armoiries, livrées, blasons et toutes les distinctions de noblesse, les attributs du royalisme et de la féodalité, seront entièrement ôtés et détruits dans l'espace d'une décade.

3o La municipalité aura soin de faire conserver tous les monumens qui peuvent rappeler les progrès des beaux-arts, et l'excellence des artistes, et servir à l'histoire et à l'érection de la maison commune de Milan.'

Le 11 nivose an 5 de la république française, (31 décembre 1797).

CONSTITUTION

DE LA RÉPUBLIQUE CISALPINE.

An 5 de la République française, (1797).

LIBERTÉ, ÉGALITÉ.

Extrait des registres du Directoire exécutif de la République cisalpine.

Au nom de la république cisalpine.

Le directoire exécutif, composé des citoyens Serbelloni, Alessandri, Moscati, Paradisi, et nouvellement installé par le général en chef Bonaparte, au nom de la république française, réuni pour la première fois dans la salle des sessions du palais national, a décrété de consigner parmi ses actes la proclamation du général en chef, en date du 11 messidor courant, pour les conséquences qui en résultent et l'exécution analogue à son contenu ainsi qu'il suit.

PROCLAMATION.

Bonaparte général en chef de l'armée d'Italie.

La république cisalpine était depuis quelques années sous la domination de la maison d'Autriche.

La république française y a succédé par droit de conquête; elle y renonce dès aujourd'hui, et la république cisalpine est libre et indépendante; reconnue par la France et l'empereur, elle le sera bientôt par toute l'Europe.

Le directoire exécutif de la république française, non content d'avoir employé son influence et les victoires des armées républicaines, pour assurer l'existence politique de la république cisalpine, porte plus loin sa sollicitude, et convaincu que, si la liberté est le premier des biens, une révolution entraîne après elle le plus terrible de tous les

TOME IV.

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