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bre infini de gens qui facrifient tout leur bien à des espérances douteufes & éloignées ; d'autres méprifent de grands avantages à venir, pour de petits intérêts préfens.

517.

Il femble que les hommes ne fe trouvent pas affez de défauts : ils

en augmentent encore le nombre par de certaines qualités fingulieres dont ils affectent de fe parer, & ils les cultivent avec tant de foin, qu'elles deviennent à la fin des défauts naturels qu'il ne dépend plus d'eux de corriger.

518.

Ce qui fait voir que les hommes

connoiffent mieux leurs fautes qu'on ne penfe, c'eft qu'ils n'ont jamais tort quand on les entend parler de leur conduite le même amourpropre qui les aveugle d'ordinaire, les éclaire alors, & leur donne des vues fi juftes, qu'il leur fait fupprimer ou déguifer les moindres chofes qui peuvent être condam

nées.

519.

Il faut que les jeunes gens qui entrent dans le monde foient honteux ou étourdis un air capable & compofé fe tourne d'ordinaire en impertinence.

5201

Les querelles ne dureroient pas

long-tems, fi le tort n'étoit que

d'un côté,

521.

Il ne fert de rien d'être jeune fans être belle, ni d'être belle fans être jeune.

522.

Il y a des perfonnes fi légères & fi frivoles, qu'elles font auffi éloignées d'avoir de véritables défauts que des qualités folides.

523.

On ne compte d'ordinaire la première galanterie des femmes, que lorfqu'elles en ont une feconde.

524.

Il y a des gens fi remplis d'eux

mêmes, que lorfqu'ils font amoureux, ils trouvent moyen d'être occupés de leur paffion, fans l'être de la perfonne qu'ils aiment.

5251

L'amour, tout agréable qu'il eft, plaît encore plus par les manières dont il fe montre, que par lui

même.

526.

Peu d'efprit avec de la droiture ennuie moins à la longue, que beaucoup d'efprit avec du travers.

$27.

La jaloufie eft le plus grand de tous les maux, & celui qui fait le moins de pitié aux perfonnes qui le caufent.

528.

Après avoir parlé de la fauffeté de tant de vertus apparentes, il est raisonnable de dire quelque chofe de la fauffeté du mépris de la mort. J'entends parler de ce mépris de la mort que les payens fe vantent de tirer de leurs propres forces, fans l'efpérance d'une meilleure vie. Il y a de la différence entre fouffrir la mort conftamment, & la mépriser. Le premier eft affez ordinaire; mais je crois que l'autre n'eft jamais fincère. On a écrit néanmoins tout ce qui peut le plus perfuader que la mort n'eft point un mal; & les hommes les plus foibles, auffi bien que les héros, ont

Morale. Tome XIII. K

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