d'envie, nous fert fouvent auffi à

la modérer.

290.

Il y a des fauffetés déguisées, qui représentent fi bien la vérité que ce feroit mal juger que de ne s'y pas laiffer tromper.

291.

Il n'y a pas quelquefois moins d'habileté à favoir profiter d'un bon confeil, qu'à fe bien confeiller foimême.

292.

Il y a des méchans qui feroient moins dangereux s'ils n'avoient aucune bonté.

293.

La magnanimité eft affez bien

définie par fon nom même : néanmoins on pourroit dire que c'est le bon fens de l'orgueil, & la voie la plus noble pour recevoir des louanges.

294.

Il eft impoffible d'aimer une feconde fois ce qu'on a véritablement ceffé d'aimer.

295.

C'eft moins la fertilité de l'efprit qui nous fait trouver plufieurs expédiens fur une même affaire, que ce n'eft le défaut de lumière qui nous fait arrêter à tout ce qui se préfente à notre imagination, & qui nous empêche de difcerner d'abord ce qui eft le meilleur.

296.

Il y a des affaires & des maladies que les remedes aigriffent en certain tems, & la grande habileté confifte à connoître quand il eft dangereux d'en ufer..

297.

La fimplicité affectée eft une imposture dé'icate.

298.

Il y a plus de défauts dans l'humeur que dans l'esprit.

299.

Le mérite des hommes a fa fai

fon, aufli bien que les fruits.

300.

On peut dire de l'humeur des hommes comme de la plupart des bâtimens, qu'elle a diverfes faces, les unes agréables, & les autres défagréables.

301.

La modération ne peut avoir le mérite de combattre l'ambition & de la foumettre elles ne fe trouvent jamais ensemble. La modération eft la langueur & la pareffe de l'ame, comme l'ambition en eft l'activité & l'ardeur.

302.

Nous aimons toujours ceux qui ous admirent, & nous n'aimons

pas toujours ceux que nous admirons.

303.

Il eft difficile d'aimer ceux que nous n'eftimons point; mais il ne l'eft pas moins d'aimer ceux que nous eftimons beaucoup plus que

nous.

304.

Les humeurs du corps ont un cours ordinaire & réglé qui meut & tourne imperceptiblement notre volonté elles roulent ensemble & exercent fucceffivement un empire fecret en nous; de forte qu'elles ont une part confidérable à toutes nos actions fans que nous le puií hons connoître.