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D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE

N⚫ 35-36

31 août-7 septembre

1891

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Sommaire : 408. ERMAN, Les contes populaires du papyrus Westcar. 409. Stanley Lane POOLE et Reginald Stuart POOLE, Catalogue des monnaies orientales du British Museum, 1x et x. — 410. MAYOR, L'Heptateuque. 411. L'Heptateuque du pseudo Cyprien, p. p. PEIPER. 412. VARNHAGEN, La légende de sainte Catherine d'Alexandrie. 413, BÉMONT et MONOD, Histoire de l'Europe et en particulier de la France de 395 à 1270. 414. ZDEKAUER, Statut du podestat de Pistoie. 415. Petit de JULLEVILLE, Les tragédies de Montchrestien. 416. (Euvres oratoires de Bossuet, I, p. p. LEBARQ. 417. CLOUZOT, Notes pour servir à l'histoire de l'imprimerie à Niort et dans les Deux-Sèvres. 418. MILLET, Souvenirs des Balkans. Académie des inscriptions.

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408.

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A. ERNAN. Die Mærchen des Papyrus Westcar (fasc. v et vi des Mittheilungen aus den Orientalischen Sammlungen): I. Einleitung und Commentar (mit 12 Lichtdrucktafeln), 72 p. II. Glossar, Palæographische Bemerkungen und Entstellung des Textes, 84 p. et xxIII pl. autographiées. In-4. Berlin Spemann, 1890.

Le Papyrus Westcar est demeuré longtemps inconnu. Donné à Lepsius, il y a plus de trente ans, par une dame anglaise, miss Westcar, il fut acquis en 1886 par le Musée de Berlin, et, dès le 14 mai 1886, une brève analyse, due à la plume de M. Erman, en révéla le contenu. C'était un recueil de contes fantastiques à joindre aux nombreux débris que nous possédons de la littérature romanesque des anciens Egyptiens. Je n'en indiquerai pas ici le détail : qui voudra, pourra les lire dans la seconde édition de mes Contes populaires de l'Égypte antique. M. E. avait bien voulu m'envoyer une transcription hiéroglyphique de plusieurs pages, et une traduction allemande qu'il m'autorisa à traduire en français et à insérer dans mon petit volume: c'est une libéralité dont je l'ai remercié déjà, mais dont je ne saurais trop le remercier. Les principaux héros de l'ouvrage sont des magiciens célèbres en leur temps, et dont les princes de la famille royale racontent les prodiges au roi Khéops. Khéops lui-même est témoin d'un miracle opéré par un sorcier dont on lui signale l'existence, puis apprend que ses descendants seront détrônés, trois générations après lui, par des enfants que le dieu Râ vient d'avoir d'une prêtresse du temple de Sakhibou. Nous connaissions, par Hérodote et par d'autres historiens grecs, plusieurs contes appartenant au cycle traditionnel de Khéops et des rois constructeurs de pyramides. Le Papyrus Westcar nous a rendu la première version authentique que nous possédions d'un conte nouveau: je ne désespère pas de voir reparaître

Nouvelle série, XXXII.

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un jour ou l'autre l'original de quelqu'un des récits que le bon Hérodote nous a transmis sur la foi de ses guides.

M. E. a déjà consacré à l'étude grammaticale du Papyrus Westcar un mémoire fort complet, que j'ai signalé en son temps 1. Il nous offre à présent le texte même, sous plusieurs formes. Avant tout, la reproduction photographique, planche à planche, et en grandeur naturelle de l'original. C'est un véritable service rendu aux étudiants. Les fac-simile ordinaires ne donnent jamais qu'une idée incomplète de l'apparence d'un manuscrit. Ils ne tiennent compte ni des teintes plus ou moins sombres du papyrus, ni des nuances de l'encre, ni surtout de ces taches et de ces traits presque imperceptibles, de ces écorchures, qui sont réparties à la surface des parties d'où la pellicule d'encre est tombée, et qui permettent souvent de rétablir à coup sur des lettres, des mots, des lignes entières dont on désespérait au premier coup d'œil. Le plus habile dessinateur ne réussit pas toujours à rendre ces aspects fugitifs du manuscrit, et les restes qu'il saisit et fixe sur la pierre, le rouleau de l'imprimeur les empâte d'une encre sans finesse, la presse les écrase, et dans la plupart des endroits où le document porte encore des traces susceptibles de lecture, le fac-simile lithographique n'a plus que des taches lourdes et sous lesquelles on ne peut démêler aucune forme. Le facsimile photographique de M. E. est d'une bonne teinte et d'un bon tirage. Il serait insuffisant dans les endroits où l'usure a graissé et embû la surface du papyrus, si M. E. n'avait pris la précaution d'y joindre une transcription complète, page à page et ligne à ligne, en caractères hieroglyphiques. Elle présente l'avantage d'être plus complète que le papyrus ne l'est actuellement. Lepsius avait fait exécuter un calque par M. Weidenbach: depuis lors, plusieurs parcelles ce sont détachées, emportant des portions d'écriture, et la copie d'autrefois renferme plus de texte que l'original d'aujourd'hui. M. E. a incorporé dans sa transcription tout ce qui nous a été conservé de la sorte. Un glossaire, une traduction, une transcription, un commentaire suivi, qui renvoie sans cesse au mémoire grammatical publié il y a deux ans, sont joints au double texte. Une étude de paléographie comparée termine l'ouvrage. M. E. y a esquissé sommairement l'histoire de la cursive égyptienne entre la xir dynastie et l'apparition du démotique vers le vi° siècle av. J.-C. C'est un sujet qu'on a singulièrement négligé jusqu'à présent, et les quelques pages que M. E. lui a consacrées sont du plus haut intérêt.

M. E. qui a hérité si justement la place et le titre de Lepsius au Musée de Berlin a tenu à honneur de faire connaître, aussi vite qu'il l'a pu, un des legs les plus précieux que son prédécesseur a laissés à notre science. S'arrêtera-t-il là? Lepsius avait promis, en 1849 2, le texte

1. Cfr. Revue critique, 1890, T. I, p. 422-423.

2. Lepsius, Vorläufige Nachricht über die Expedition, ihre Ergebnisse und deren Publikation, p. 32.

explicatif de son grand ouvrage les Denkmäler aus Ægypten und Æthiopien; mais diverses raisons l'ont empêché de tenir sa promesse. C'est, du reste, la destinée de ces oeuvres gigantesque de demeurer inachevées, et l'on sait que Champollion lui-même est encore à moitié inédit. Tels qu'ils sont les Denkmäler sont presque inintelligibles dans certaines de leurs parties. Les volumes consacrés à l'architecture contiennent un nombre considérable de plans et de coupes qui ne peuvent être expliqués ni utilisés faute de commentaire. Les volumes de dessins. et d'inscriptions ne sont pas plus faciles à étudier. Lepsius a choisi des tableaux dans un ensemble, il a isolé des figures, il a extrait une ligne par ici, deux par là, d'inscriptions parfois assez longues; souvent enfin, il a supprimé les représentations qui accompagnaient une inscription. Il a eu bien certainement ses raisons pour en agir de la sorte, mais ces raisons quelles sont-elles? Mon impression est qu'en général, il choisissait de préférence, parmi les monuments, ceux qui lui paraissaient renfermer des faits à l'appui de son système d'histoire ou de chronologie égyptienne, et que les Denkmäler sont surtout les matériaux et les pièces justificatives de son Königsbuch. Il n'en est que plus nécessaire de savoir l'origine exacte de beaucoup des sujets qu'il a reproduits, le site où ils se trouvent et qu'il a indiqué trop brièvement au bas des planches, la valeur qu'il y attachait. Enfin la publication des Denkmäler n'a point épuisé ses portefeuilles. Ils renferment encore des copies de monuments dont plusieurs ont disparu depuis lors. Ce serait rendre un service réel à l'Égyptologie que de mettre en ordre les notes de Lepsius, d'en composer le texte manquant, et d'y joindre les inscriptions demeurées inédites jusqu'à ce jour. M. Erman est tout indiqué pour entreprendre ce travail, et le gouvernement allemand d'aujourd'hui ne lui refusera certainement pas les subventions que le gouvernement prussien d'il y a cinquante ans avait si libéralement accordées à son prédécesseur.

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G. MASPERO.

409. Catalogue of oriental coins in the British Museum, vol. ix et x additions to vol. I-VIII by Stanley Lane Poole and Reginald Stuart Poole. 2 vol. in-8. 1889-1890, London, printed by order of the Trustees. 33 pl. en héliograv.

Ces deux volumes ferment la série des Catalogues des monnaies musulmanes proprement dites, publiés par les administrateurs du British Museum. Il a été déjà rendu compte, à plusieurs reprises, dans la présente Revue, de cette importante publication commencée en 1875 et qui a été menée à si heureuse fin, ce qu'aucun autre établissement public en Europe n'a encore eu la bonne fortune d'obtenir.

Les pièces décrites dans ces deux volumes supplémentaires (au nombre de huit cent quatre-vingt-dix) ont été acquises depuis la rédaction des volumes antérieurs et proviennent des collections Soubhi-Pacha, Co

dera-y-Zaïdin et Houtum Schindler, ce qui donne un ensemble d'environ quatre mille quatre cent médailles pour l'état actuel de la collection anglaise. Les additions portent principalement sur les Khalifes orientaux qui sont augmentés de moitié (mille quatre cent pièces au lieu de neuf cent), la série des Arabes d'Espagne qui de cent quatre-vingt est portée à quatre cent quatre-vingt-dix, les Ghaznévides dans la même proportion, les Mongols de la Perse, les Chirvanides, les Khans du Turkestan et sur un assez grand nombre de petites dynasties peu connues et jusqu'ici non représentées dans les collections telles que les Bekteginides d'Arbil, les Selgharides de Chiraz, les Rasoulides du Yemen, les Mirdasides d'Alep, les Atabeks-Bourides, les Saldoukides de l'Iran, les Aïoubites d'Arabie, etc.

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Parmi les nouveautés on peut citer: un dinar unique du khalife abbasside El-Moktefi de l'an 548 H, qui manque à notre collection française quatorze dinars samanides - trois médailles de Aïch ben Saad gouvernante de Chiraz sous Abaka-Khân en 676 et 684 H. (cette pièce rarissime avait été publiée en 1834 par Fraehn parmi les monnaies de Abaka, mais les noms de Aïch n'avaient pas été lus) un dinar du sultan fatimite El-Hakem frappé à El-Kahira (le Caire) en 394 H. — des pièces fort intéressantes des gouverneurs abbassides de Sana et des dinars ou dirhems, la plupart inédits, de princes qui n'ont eu que des règnes très courts et dont quelques-uns d'entre eux ne sont même connus que par leurs monnaies. J'ai relevé presque une centaine de ces monnaies inédites que les rédacteurs du Catalogue auraient dû signaler dans l'introduction pour faire ressortir l'importance de ieurs additamenta. Une des pièces les plus intéressantes parmi les modernes est le talari de 20 piastres frappé à Khartoum dans le Soudan par le fameux El-Mahdi le vainqueur de Gordon en 1302 H. (1885); le nom du rebelle est écrit en forme de toghra à l'imitation du chiffre impérial ottoman.

Le supplément contient enfin la description des monnaies arabochrétiennes des premiers temps de l'Hégire frappées en Syrie, en Afrique et en Espagne à l'imitation des monnaies byzantines, la plupart avec des légendes latines qui ont été si heureusement déchiffrées par M. Lavoix (v. Rev. critique, 21 mai 1888) dans son Catalogue de 1887. Les rédacteurs du Catalogue anglais ne paraissent pas avoir connu le travail du savant français, car ils donnent comme incertaines des légendes que l'on pourrait lire, au moins quelques-unes d'entre elles.

L'ouvrage se termine par trois index fort importants: la liste de toutes les pièces frappées, année par année, avec les noms des princes depuis l'an 77 H., qui est la plus ancienne date coufique de la collection anglaise (Le cabinet de France remonte aux années 40, 73, 75 et 76 H.) jusqu'à nos jours la liste des ateliers monétaires, au nombre de trois cent soixante avec l'indication des souverains et enfin l'index de tous les sultans, princes, émirs et gouverneurs dont les noms sont sur les monnaies, avec renvoi à la dynastie à laquelle chacun d'eux appar

tient, détail très utile, vu le grand nombre d'homonymes. Ce dernier index, qui contient environ onze cents noms, complété par la liste des titres arabes se trouvant à la fin de chacun des huit premiers volumes, constitue un véritable répertoire de l'onomastique musulmane. En donnant ces deux volumes de supplément, les rédacteurs du Catalogue du British Museum, MM. Stanley Lane Poole et Reginald Stuart Poole, ont complété dignement une œuvre considérable très appréciée des Numismatistes et qui a rendu en même temps de grands services aux Orientalistes. F. DROUIN.

410.

The Latin Heptateuch, published piecemal by the French printer William Morel (1560) and the French Benedictines E. Martène (1733) and J.-B. Pitra (1852-88), critically reviewed by John E. B. MAYOR. London, C.-J. Clay; Cambridge, University Press. Warehouse. 1889. LXXIV-268 pp. in-8. 411. Cypriani Galli poetae Heptateuchos, ex recensione Rudolfi PEIPER (Corpus scriptorum ecclesiasticorum latinorum editum consilio et impensis Academiæ Litterarum Vindobonensis, uol. xx). Pragae et Vindobonae, Tempsky; Lipsiae, Freytag. XXXIX-348 pp. in-8.

Dans les derniers siècles de l'Empire, un chrétien assez familiarisé avec la littérature classique mit en vers latins les principaux livres historiques de l'Ancien Testament. Ce qui reste aujourd'hui de cette entreprise a été publié successivement au hasard des découvertes dans les manuscrits en 1560, cent soixante-cinq vers de la Genèse, par Guillaume Morel; en 1773, mille quatre cent quarante-un vers de la Genèse, pardom Martène; en 1852 et en 1888, cinquante-sept nouveaux versde la Genèse (qui atteint le chiffre de mille quatre cent quatre-vingt-dix-huit vers), l'Exode, le Lévitique, les Nombres, le Deutéronome, Josué, les Juges. Ainsi l'on est arrivé à reconstituer la collection mentionnée dans les anciens catalogues sous le titre d'Heptateuque. Il est probable que nous n'avons là qu'une partie d'un vaste ensemble. On a retrouvé des vers isolés des quatre livres des Rois, des deux livres des Paralipomènes, de Job, et d'anciens catalogues mentionnent Judith et Esther.

La date et le nom de l'auteur ont été longtemps en discussion. On a mis Juvencus et saint Avit en avant. Mais les incorrections prosodiques sont trop nombreuses pour permettre de défendre l'une ou l'autre opinion. M. L. Müller, le premier, a vu juste, quand il a attribué l'Heptateuque au vo-vie siècle. On trouve, en effet, dans cet ouvrage des imitations de Claudien et d'Ausone, tandis qu'il a certainement été imité par Cl. Marius Victor, mort avant 450 et vraisemblablement peu après 425. C'est donc entre cette date et 397 (panégyrique de Claudien sur le quatrième consulat d'Honorius) que doit se placer la composition de l'Heptateuque. Ainsi s'explique l'emploi d'une ancienne version de la Bible au lieu de la Vulgate de saint Jérôme. Quant à la personne de l'auteur,

1. Le fait est pourtant mis en doute par M. Petschenig.

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