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ques dispositions qui tendent à écarter les abus les plus visibles que l'expérience a constatés, et que nous a dénoncés le zèle des magistrats qui le composent, et à le mettre en état de remplir les fonctions importantes avec plus d'activité.

> Il s'agit 1° de compléter le nombre des jurés et des juges, diminué par plusieurs circonstances;

› 2o De fixer les principes de cette institution de manière à garantir la liberté des patriotes calomniés, en accélérant le jugement des conspirateurs;

› 3o De résumer dans une loi unique des définitions et des dispositions éparses dans une multitude de décrets.

» Tel est le but de celui que je vais vous proposer.

› C'est encore des poignards que nous dirigeons sur nous, nous le savons; mais que nous importent les poignards! Le méchant seul tremble quand il agit; les hommes bien intentionnés ne voient point de dangers quand ils font leur devoir ; ils vivent sans remords, et agissent sans crainte.

› Voici le projet de décret que je suis chargé de vous pré

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senter.

› La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du Comité de salut public, décrète :

› Art. Ier. Il y aura au tribunal révolutionnaire un président et trois vice-présidens, un accusateur public, quatre substituts de l'accusateur public, et douze juges.

› 2. Les jurés seront au nombre de cinquante.

3. Ces diverses fonctions seront exercées par les citoyens dont les noms suivent :

› Président: Dumas; vice-présidens: Coffinhal, Sellier, Naulin. › Accusateur public: Fouquier; substituts: Gribauval, Royer, Liendon, Givois, agent national du district de Cusset; Legracieux, employé à la trésorerie nationale, à Strasbourg.

› Juges: Ragay, de Liége; Foucaut, Verteuil, maire; Bravet, Barbier, de l'Orient; Harny, Garnier-Launay, Paillet, professeur de rhétorique à Châlons; Laporte, membre de la commission militaire à tours; Félix, idem; Loyer, section Marat.

T. XXXIII.

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» Jurés: Renaudin, Benoitrais, Fauvetti, Lumière, Fénéaux, Gauthier, Meyer, Châtelet, Petit-Tressin, Trinchard, TapinoLebrun, Pijot, Girard, Presselin, Didier, Vilatte, Dix-Août, Laporte, Ganney, Brochet, Aubry, Gemont, Prieur, Duplay, Deveze, Desboisseaux, Nicolas, Gravier, Billon, tous jurés actuels; Subleyras, Laveyron l'aîné, cultivateur à Creteil ; Fillon, fabricant à Commune-Affranchie; Portherel, de Châlons-surSaône; Musson, cordonnier à Commune-Affranchie; Marhel, artiste; Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section des Piques; Villers, rue Caumartin; Moulin, section de la République; Deprau, artiste, rue du Sentier; Emmery, marchand chapelier, département de Rhône et Loire; Lafontaine, de la section du Muséum; Blachol, payeur général à l'armée des Pyrénées Orientales; Debeaux, greffier du tribunal du district de Valence; Gouillur, administrateur du district de Béthune; Dereys, section de la Montagne; Duquenel, du comité révolutionnaire de l'Orient; Hannoyer, idem; Butins, section de la République; Pechet, faubourg Honoré, no 169, Nierguin, du comité de surveillance de Mirecourt.

› Le tribunal révolutionnaire se divisera par sections, composées de douze membres; savoir, trois juges et neuf jurés, lesquels jurés ne pourront juger en moindre nombre que celui de sept.

> 4. Le tribunal révolutionnaire est institué pour punir les ennemis du peuple.

> 5. Les ennemis du peuple sont ceux qui cherchent à anéantir la liberté publique, soit par la force, soit par la ruse.

6. Sont réputés ennemis du peuple ceux qui auront provoqué le rétablissement de la royauté, ou cherché à avilir ou à dissoudre la Convention nationale et le gouvernement révolutionnaire et républicain dont elle est le centre.

» Ceux qui auront trahi la République dans le commandement des places et des armées, ou dans toute autre fonction militaire entretenu des intelligences avec les ennemis de la République,

travaillé à faire manquer les approvisionnemens ou le service des

armées.

› Ceux qui auront cherché à empêcher les approvisionnemens de Paris, ou à causer la disette dans la République.

› Ceux qui auront secondé les projets des ennemis de la France, soit en favorisant la retraite et l'impunité des conspirateurs et de l'aristocratie, soit en persécutant et calomniant le patriotisme, soit en corrompant les mandataires du peuple, soit en abusant des principes de la révolution, des lois ou des mesures du gouvernement, par des applications fausses et perfides;

• Ceux qui auront trompé le peuple ou les représentans du peuple, pour les induire à des démarches contraires aux intérêts de la liberté;

› Ceux qui auront cherché à inspirer le découragement pour favoriser les entreprises des tyrans ligués contre la République; › Ceux qui auront répandu de fausses nouvelles pour diviser ou pour troubler le peuple (1);

(1) Cette cathégorie des ennemis du peuple, venait d'être expliquée par Barrère, dans un rapport sur les nouvelles du théâtre de la guerre, présenté avant celui de Couthon, même séance. Voici en quels termes Barrère s'énonçait :

« Une nouvelle tactique des ennemis intérieurs. »

« Cachés dans nos cités, recelés dans Paris, ils tourmentent leur imagination pour fabriquer des nouvelles. Long temps ils ont pris le partie d'en imaginer de mauvaises, espérant décourager le peuple et faire haïr la Convention; longtemps ils ont exagéré nos pertes, douté de nos succès, centuplé les maux de la guerre, tenté de rabaisser le courage des armées et de rallier les mécontens de l'intérieur; mais ils n'ont pas tardé à s'apercevoir que ces faux désastres et ces défaites préparés dans des journaux, ou les mauvais succès semés dans le public ne produisaient que des mesures plus rigoureuses contre l'aristocratie et la faction de l'étranger, qu'il n'en résultait qu'un plus haut degré d'énergie dans le peuple, et de courage dans les soldats républicaius. Ils n'ont pas tarde à sentir qu'un peuple qui veut être libre est excité par le malheur et electrisé par les obstacles même qui s'opposent à son dessin. Dès lors les grands politiques de gazette, les sociétés contre-révolutionnaires des halles se sont retournés; ils ont pris le parti de débiter des nouvelles plus heureuses, mais en exagérant les succès, en dépassant toutes les possibilités de victoire; c'est ainsi qu'ils ont tacitement accusé le gouvernement de tous les succès qu'eux-mêmes créaient dans leurs bulletins mensongers, et qu'ils trompaient le peuple par des espérances qu'ils savaient bien que les armées ne pouvaient pas remplir. C'est ainsi que lorsque la partie gauche de l'armée du Nord prenait Menin, Furnes et Courtray, les exagérateurs disaient que Valenciennes et Le Quesnoy étaient évacués et remis au

› Ceux qui auront cherché à égarer l'opinion et à empêcher l'instruction du peuple, à dépraver les mœurs et à corrompre la conscience publique, et altérer l'énergie et la pureté des principes révolutionnaires et républicains, ou en arrêter les progrès, soit par des écrits contre-révolutionnaires ou insidieux, soit par toute autre machination ;

› Les fournisseurs de mauvaise foi qui compromettent le salut de la République, et les dilapidateurs de la fortune publique, autres que ceux compris dans les dispositions de la loi du 7 frimaire;

› Ceux qui, étant chargés de fonctions publiques, en abusent pour servir les ennemis de la révolution, pour vexer les patriotes, pour opprimer le peuple;

› Enfin, tous ceux qui sont désignés dans les lois précédentes relatives à la punition des conspirateurs et contre-révolutionnaires, et qui, par quelques moyens que ce soit et de quelques dehors qu'ils se couvrent, auront attenté à la liberté, à l'unité, à la sûreté de la République, ou travaillé à en empêcher l'affermis

sement.

› 7. La peine portée contre tous les délits dont la connaissance appartient au tribunal révolutionnaire, est la mort.

» 8. La preuve nécessaire pour condamner les ennemis du peuple, est toute espèce de documens, soit matérielle, soit morale, soit verbale, soit écrite, qui peut naturellement obtenir l'assentiment de tout esprit juste et raisonnable. La règle des jugemens, est la conscience des jurés éclairés par l'amour de la patrie; leur but, le triomphe de la République et la ruine de ses ennemis ; la procédure, les moyens simples que le bon sens indique pour

pouvoir de la République; c'est ainsi que lorsque l'armée victorieuse d'Italie eut effrayé les tyrans coalisés d'Autriche et de Piémont, les exagérateurs publiaient hier que Turin était pris, et que le tyran de Piémont était arrêté.

>> Citoyens, voilà le piége le plus adroit: le comité vint-il vous annoncer hier que l'armée d'Italie a des succès, l'opinion publique était déjà montée à une telle hauteur en succès, que ce que les armées ont fait avec effort, avec courage, est presque nul, est atténué et disparaît presque entièremont par la comparaison de la vérité des faits avec les nouvelles gigantesques que ces hypocrites ont répandues la veille, etc. etc. » (Note des auteurs.)

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parvenir à la connaissance de la vérité dans les formes que la loi détermine.

Elle se borne aux points suivans:

9. Tout citoyen a le droit de saisir et de traduire devant les magistrats les conspirateurs et les contre-révolutionnaires. Il est tenu de les dénoncer dès qu'il les connaît.

10. Nul ne pourra traduire personne au tribunal révolutionnaire, si ce n'est la Convention nationale, le comité de salut public, le comité de sûreté-générale, les représentans du peuple commissaires de la Convention, et l'accusateur public.

› 11. Les autorités constituées en général ne pourront exercer ce droit, sans avoir prévenu le comité de salut public et le comité de sureté-générale, et obtenu leur autorisation.

› 12. L'accusé sera interrogé à l'audience et en public; la formalité de l'interrogatoire secret qui précède, est supprimée comme superflue; elle ne pourra avoir lieu que dans les circonstances particulières où elle serait jugée utile à la connaissance de la vérité.

13. S'il existe des preuves soit matérielles, soit morales, indépendamment de la preuve testimoniale, il ne sera point entendu de témoins, à moins que cette formalité ne paraisse nécessaire, soit pour découvrir des complices, soit pour d'autres considérations majeures d'intérêt public.

>

› 14. Dans le cas où il y aurait lieu à cette preuve, l'accusateur public fera appeler les témoins qui peuvent éclairer la justice, sans distinction de témoins à charge et à décharge.

15. Toutes les dépositions seront faites en public, et aucune déposition écrite ne sera reçue, à moins que les témoins ne soient dans l'impossibilité de se transporter au tribunal, et dans ce cas, il sera nécessaire d'une autorisation expresse des comités de salut public et de sûreté-générale.

16. La loi donne pour défenseurs aux patriotes calomniés, des jurés patriotes; elle n'en accorde point aux conspirateurs. >17.Les débats finis, les jurés formeront leurs déclarations, et les

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