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Cependant ce ne sont pas encore là les bornes de la nature; il y a des espèces d'araignées, si petites à leur naissance, qu'on ne sauroit les discerner qu'avec le microscope on en trouve ordinairement une infinité en un peloton elles ne paroissent que comme une multitude de points rouges, il y a pourtant des toiles sous elles, quoiqu'elles soient presque imperceptibles. Quelle doit être la ténuité ou la finesse de l'un des fils de ces toiles? le plus petit cheveu doit être à l'un de ces fils, ce que la barre la plus massive est au fil d'or le plus fin, dont nous avons parlé ci-dessus. On a observé que la matière dont les fils sont formés, est un suc visqueux; les grains sont les premiers réservoirs où ce suc s'amasse, et l'endroit où il a le moins de consistance; il en a beaucoup plus quand il vient dans les six grands réservoirs où il est porté au moyen des canaux qui partent des premiers réservoirs; il acquiert beaucoup de cette consistance dans son passage, une partie de l'humidité se dissipant en chemin, ou la sécrétion s'en faisant par des organes destinés à cet usage.

Enfin la liqueur se sèche encore plus et devient fil dans le trajet qu'elle fait par les canaux respectifs des mammelons. Quand ces fils paroissent d'abord au-dehors des trous, ils sont encore glutineux, tellement que ceux qui sortent par les trous voisins, s'attachent ensemble, l'air achève de les sécher.

Tout cela se prouve en faisant bouillir une araignée plus ou moins : la liqueur acquiert plus ou moins de consistance qui la rend propre à être tirée en fil; car elle est trop fluide pour cet usage dans le temps qu'elle est renfermée dans les réservoirs.

La matière contenue dans ces réservoirs, lorsqu'elle est bien sèche, ressemble à une gomme ou à une glu transparente, qui casse lorsqu'on la plie beaucoup; semblable au verre elle ne devient flexible qu'en la divisant en fils très-fins; et c'est probablement dans cette vue que la nature lui a destiné ce nombre si immense de trous. (Voyez DIVISIBILITÉ).

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DUR. Epithète qu'on donne aux corps, dont les molécules insensibles ont entr'elles une adhérence ou co

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hésion capable de résister, jusqu'à un certain point, à une puissance qui tendroit à les séparer. (Voyez DURETÉ).

DURÉTÉ. Adhérence ou cohésion des molécules insensibles d'un corps les unes avec les autres, qui peut résister, jusqu'à un certain point, à une puissance qui tendroit à les séparer. Les molécules insensibles qui forment une masse continue, sont souvent jointes ensemble de manière qu'il faut employer une force assez considérable pour les séparer cette portion de matière se nomme alors un corps dur. Ce n'est donc pas seulement aux parties sensibles c'est encore aux molécules insensibles des corps que la Dureté appartient. Cette Dureté qui n'est, à proprement parler, qu'une ténacité plus ou moins grande des parties, et qui n'est jamais parfaite dans les corps que nous connoissons, puisqu'elle cède toujours à une force finie; cette Dureté, dis-je, décroît presque jusqu'à la fluidité, c'est-à-dire jusqu'à ce que la cohésion naturelle des parties suffise à peine pour empêcher qu'elles n'obéisse librement à leur propre poids, quand il les sollicitent à se mouvoir indépendamment les unes des autres, et à changer la figure de leur tout. De sorte qu'il y a des corps qui possèdent la Dureté à un plus haut degré les uns que les autres : la division des uns exige une trèsgrande force; celle des autres n'en exige qu'une petite.

Mais quelle est la cause de cette Dureté des corps? C'est une question qui n'est pas aussi facile à résoudre, qu'on pourroit d'abord l'imaginer.

Les Newtoniens prétendent rendre raison de la Dureté des corps par l'attraction de cohésion, c'est-àdire, par une attraction qu'ils disent agir en raison inverse des cubes des distances. Mais, 1. les loix de l'attraction établies par Newton, sont qu'elle agit en raison inverse des quarrés, et non pas des cubes, des

distances or les loix de la náture sont constantes et uniformes; pourquoi donc l'attraction agiroit-elle tantôt d'une façon, tantôt d'une autre? 20. Si, dans le cas présent, l'attraction agissoit en raison inverse des cubes des distances, elle devroit diminuer en propor

elle ne devroit être que 8 fois moindre qu'à une distance: cependant les Newtoniens disent qu'elle est très-grande au point de contact, et hors du point de contact elle paroît anéantie. D'ailleurs Newton luimême déclare dans sa 31me Quest. d'Op. p. 554, que ce qu'il nomme Attraction est un effet dont il ne prétend pas indiquer la cause physique. Il va plus loin : il ajoute même que cette attraction peut être l'effet immédiat d'une vraic impulsion. Voici ses termes : « Je » n'examine point ici quelle peut être la cause de ces >> attractions ce que j'appelle ici Attraction peut être produit par impulsion ». Il vaut donc mieux, jusqu'à ce que nous soyions plus instruits, nous en tenir à l'impulsion, pour rendre raison de la Dureté des corps.

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Les corps sont durs à l'intérieur, comme à l'extérieur, et leurs molécules les plus déliées ne le sont pas moins que la masse totale. La cause de cette Dureté agit donc sur des sujets qui nous échappent, et dans des endroits où nous ne pouvons pas la suivre. C'est pourquoi nous n'en pouvons juger que par conjecture et par analogie.

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L'expérience prouve que deux corps dont les surfaces sont bien polies et exactement appliquées l'une à l'autre, de manière qu'il ne reste pas d'air entr'eux, ont une adhérence capable de résister à une assez grande force qui les tireroit perpendiculairement à leurs plans. On rend raison de cette adhérence, en disant qu'elle est produite par la pression du fluide environnant. En effet, les fluides exercent leur pression en tous sens : cette pression est une force qui doit avoir son effet, à moins que quelque puissance contraire ne s'y oppose : ces deux plans unis ensemble, et soumis à cette pression, ne doivent donc pas se séparer. Ce n'est pas l'air de l'athmosphère, l'air que nous respirons, qui est le fluide dont nous parlons; si c'étoit l'air qui fut la cause de cet effet, ces deux corps devroient se séparer dans le vide de Boyle, ce qui n'arrive pas, lorsqu'on procède avec exactitude. C'est un fluide beaucoup plus subtil, et dont aucun bon Physicien ne doit nier l'existence. Celui de tous les Philosophes modernes aux opinions duquel il semble que le vide convient le mieux

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Newton, dans la dix-huitième question d'Optique, pag. 5.18 reconnoît l'existence d'un milieu beaucoup plus subtil que l'air, lequel milieu, dit-il, reste dans le vide après qu'on en a pompé l'air. Et l'on voit combien il compte réellement sur son existence, par toutes les fonctions qu'il lui attribue. Jurin, un des plus zélés partisans de l'attraction, ne fait pas plus de difficultés d'admettre ce fluide subtil. C'est donc lui que nous regardons comme la cause de l'adhérence dont nous venons de parler; et par analogie, comine la principale cause de la cohésion qu'ont entr'elles, non-seule ment les parties sensibles, mais encore les molécules insensibles des corps.

Il est vrai que ce fluide est si subtil, qu'il pénètre avec facilité dans les pores de tous les corps: mais cela ne l'empêche pas d'être la principale cause de la colésion de leurs parties. Car ce fluide subtil, appliqué à la surface d'un corps, n'est admis qu'en partie dans les vides qu'il y trouve, et il agit du reste sur les parties solides, qui s'opposent à son passage, et qui deviennent comme autant de points d'appui. Tout ce qui en peut arriver, c'est que les, corps les plus poreux échappent davantage à son action, et qu'il en résulte une moindre adhésion; ce qui est assez conforme à l'expérience.

- Ce fluide subtil agit donc à l'extérieur des corps, presse leurs parties les unes contre les autres, et cause leur adhésion: ce qui rend les corps durs. Il agit aussi à l'intérieur des corps, et plus ou moins fortement, selon la figure des parties qui se touchent, la grandeur des surfaces, le plus ou le moins d'exactitude du contact, etc.; ce qui fait qu'il y a des corps de différens degrés de Dureté: de sorte que si l'action extérieure de ce fluide est beaucoup plus grande que son action intérieure, le corps est très-dur. Si son action extérieure ne l'emporte que très-peu sur son action intérieure, le corps n'a qu'un très-petit degré de Dureté; c'est un corps mou. Enfin si son action intérieure l'emporte sur son action extérieure, ce qui arrive toutes les fois qu'on fait passer au-dedans du corps une plus grande quantité de ce fluide, ou qu'on anime l'action de celui qui y est déjà, comme lorsqu'on fait chauffer de la

cire, de la résine, un métal, etc. l'adhésion des par ties est rompue; le corps passe de l'état de solidité à celui de liquidité.

Cela doit nous faire croire que ces deux états opposés, je veux dire, la solidité et la fluidité, dépendent de la même cause. (Voyez FLUIDITÉ). C'est ce fluide subtil qui fixe les parties d'une matière de manière à en faire un corps solide, lorsque sa pression extérieure excède sa réaction intérieure ; c'est ce même fluide qui rend et entretient les parties mobiles entr'elles, de manière à en faire une masse liquide, lorsque sa réaction intérieure excède sa pression extérieure. Ce qui appuie bien ce raisonnement, c'est que le corps liquéfié occupe ordinairement plus de place qu'il n'en occupoit lorsqu'il étoit solide et cela doit être ainsi, si son état de liquidité est dû à l'introduction d'un fluide étranger, qui le pénètre en plus grande quantité, et qui écarte ses parties; et s'il ne reprend sa première consis tance que quand cette matière cesse de le dilater. Qu'on ne nous objecte pas ici que la glace occupe plus de volume, que n'en occupoit l'eau qui l'a formée : c'est une exception à la règle générale, dont nous donnerons la raison à l'article Glace. (Voyez GLACE).

Il est aisé de voir que tous ces raisonnemens ne sonť que des conjectures plus ou moins bien fondées. Cependant elles paroissent encore plus satisfaisantes que ne l'est l'attraction, et plus propres à rendre raison, d'une manière plausible, de la Dureté des corps. Car on peut faire contre l'attraction ce raisonnement.

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Les particules intérieures d'un corps, celles qui ne sont pas fort près de sa surface, sont également attirées en tous sens, par conséquent dans le même cas que si elles ne l'étoient point du tout, et que si elles étoient dans un simple repos respectif les unes auprès des autres. On dira peut-être que les particules qui sont proches de la surface, sont attirées vers le dedans du corps, et pressent par ce moyen toutes les autres. Mais supposons, cette surface recouverte en tous sens d'une enveloppe détachée, de la même matière que les corps, et d'une épaisseur égale à la distance à laquelle l'attraction s'étend; et que cette enveloppe

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