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fon Confident lui dit ces paroles:

Quand aux feux les plus beaux un Monarque défére,

Il s'en fait un plaifir & non pas une affaire,
Et regarde l'amour comme un lâche attentat
Dès qu'il veut prévaloir sur la raison d'Etat,
Son grand cœur au-deffus des plus dignes amor

ces,

A ce devoir preffant laiffe toutes leurs forces,,
Et fon plus doux espoir n'ose lui demander
Ce que fa dignité ne lui peut accorder.

Tite & Bérénice de Corn

Le Poëte fait parler ainfi une Reine (a) aimée de deux Princes & qui pouvoient lui être d'un grand secours.

Celles de ma naiffance ont horreur des baffef

fes,

Leur fang tout généreux hait ces molles adref.

fes;

Quelque foit le fecours qu'ils. (b) me puiffeng offrir,

(a) Rodogune, Princeffe des Parthes.

(b) Antiochus & Séleucus fils de Cléopatre, Reine de Syrie

Je croirai faire affez de le daigner fouffrir.
Je verrai leur amour, j'éprouverai fa force,
Sans flatter leurs désirs, fans leur jetter d'a◄

morce,

Et s'il eft affez fort pour me fervir d'appui,
Je le ferai régner, mais en régnant fur lui.....
Plus la haute naiffance approche des Couronnes,
Plus cette grandeur même affervit nos perfonnes.
Nous n'avons point de cœur pour aimer ni haïr,
Toutes nos paffions.ne favent qu'obéir.
Rodogune de Corn.

Pulcherie foeur d'Héraclius, lui faifoit une förte de reproche de ce qu'il ne haïffoit pas le tiran Phocas autant qu'il l'auroit. dû: car il est bon de favoir que Phocas croyoit qu'Héraclius étoit fon fils, lors même que celui-ci proteftoit qu'il étoit Héraclius & non Martian, fils de Phocas. Héraclius répond ainfi à Pulcherie.

La générofité fuit la belle naiffance

Dans cette grandeur d'ame un vrai Prince af fermi

Eft fenfible aux malheurs même d'un ennemi.

La haine qu'il lui doit ne le fauroit deffendre Quand il fe voit aimé de s'en laiffer furprendre. Et trouve affez fouyent fon devoir arrêté

Par

Par l'effort naturel de fa propre bonté.

Héraclius de Corn.

Les Vers fuivans peuvent nous faire conjecturer qu'un Prince, tel, par exemple, que le fils d'un Roi, qui ignoreroit la nobleffe de fon origine & feroit élevé dans une condition obfcure, éprouveroit des Sentimens dignes de fa naiffance & infiniment au-deffus de celle dont il croiroit par erreur defcendre.

C'est un Prince tel qu'on vient de le dire qui ne connoiffoit pas fa véritable origine & qui étoit perfuadé d'en avoir une très-baffe, qui répond ainfi à des perfonnes qui lui demandent s'il fe connoît bien. On doit remarquer combien ce morceau est travaillé, tant les Vers fuivans font harmo nieux.

Si j'étois quelqu'enfant épargné des tempêtes,
Livré dans un désert à la merci des bêtes,
Expofé par la crainte ou par l'inimitié,
Rencontré par hafard & nourri par pitié;

Mon orgueil à ce bruit prendroit quelque espé

rance

Sur votre incertitude & sur mon ignorance

Je me figurerois ces deftins merveilleux

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Qui tiroient du néant ces Héros fabuleux,

Et me revétirois des brillantes chimeres
Qu'ofa former pour eux le loifir de nos peres.
Car enfin je suis vain, & mon ambition
Ne peut s'examiner fans indignation;

Je ne puis regarder Sceptre ni Diadême
Qu'ils n'emportent mon ame au-delà d'elle-
même :

Inutiles élans d'un vol impétueux,

Que pouffe vers le Ciel un cœur présomptueux....
Je suis fils d'un Pêcheur & non pas d'un infame,
La baffeffe du sang ne va pas jusqu'à l'ame;
Et je renonce aux noms de Comte & de Marquis
Avec bien plus d'honneur qu'aux fentimens de fils,
Dom Sanche de Corn.

Réponse d'un homme de grande naiffan, ce à une Reine qui vouloit exiger de lui une chofe qu'il regardoit comme une tache fon, nom,

pour

Lorfque le deshonneur fouille l'obéiffance,
Les Rois peuvent douter de leur toute-puiffance
Qui la hafarde alors n'en fait pas bien ufer,
Et qui veut pouvoir tout ne doit pas tout ofer......
Jamais un Souverain ne doit compte à perfonne
Des dignités qu'il fait & des grandeurs qu'il done

рем

ne

S'il eft d'un fort indigne ou l'auteur ou l'appui ; Comme il le fait lui seul, la honte est toute à

lui.

Mais difpofer d'un fang que j'ai reçu fans tache,
Avant que le fouiller il faut qu'on me l'arrache
J'en dois compte aux ayeux dont il eft hérité,
A toute leur famille, à leur poftérité.

Dom Sanche de Corn.

Campiftron dans la Tragédie d'Alcibiade fait parler ainfi ce célébre Général Athénien à Palmis fille d'Artaxerxe Roi de Perfe.

Souvenez-vous, Madame,

Que fi dans mes ayeux je ne vois point de Rois, J'ai fait connoître au moins mon nom par mes ex

ploits ;

Que fi pour vous aimer il faut une Couronne,

Ce n'eft pas la vertu,
c'est le fort qui la donne ;
Qu'enfin s'il n'a pas mis un Sceptre dans ma main,
Je ne dois point rougir des fautes du deftin.

La même pensée est dans le portrait fui

yant.

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