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Craignez fa jufte colere,
Et par un doux repentir,
Epargnez-vous, ma bergere,
Les maux qu'il me fait fentir.
Aimez un amant fidelle,
Quoi qu'en dife la Raison:
Jeune Iris, tant qu'on eft belle,
Elle n'est pas de saison.

Contre un amant qui fait plaire
Elle perd toûjours fon tems:
Croïez-moi, faites-la taire
Encore quinze ou vint ans.
Mettez vôtre cœur en proie
Aux amoureuses langueurs:
Il n'eft de folide joie
Que dans l'union des cœurs.
Ainfi d'un air agréable,
Philene, ce beau berger
Aux belles fi redoutable
La preffoit de s'engager.
Les Oiseaux, le doux Zéphire
Et les Echos d'alentour,
Comme lui fembloient lui dire
Rien n'eft fi doux que l'amour.

Mais le cœur de l'inhumaine
Se taifoit obstinément :

Quand le cœur se tait, Climene,
Tout parle inutilement.

Accidens qui accompagnent un amour violent.

Heureux! qui près de toi pour toi feule foûpire;
Qui jouit du plaifir de t'entendre parler;

Qui te voit quelquefois doucement lui foûrire.
Les Dieux dans fon bonheur peuvent-ils l'égaler?
Je fens de veine en veine une fubtile flâme
Courir
par tout mon corps fi-tôt que je te vois:

Et

Des

preaux.

Et dans les doux tranfports où s'égare mon ame,
Je ne faurois trouver de langue ni de voix.

Un

nuage confus fe répand fur ma vûë.

Je n'entens plus: je tombe en de douces langueurs;
Et pâle, fans haleine, interdite, éperduë,

Un friffon me faifit, je tremble, je me meurs.

STANCE S.

La belle Methode d'aimer.

Pelion. Ui, je confens d'aimer, mais pour regler mon

feu

Ma Methode n'eft pas commune;

Du plus ardent tranfport mon coeur ne fait qu'un jeu,
Je l'étouffe s'il m'importune,

Et dans les biens d'amour, comme ceux de fortune,
J'ai pour devife paix & peu.

Je fuis tout ce qui peut me faire violence;
Si pouffer des foupirs, & pleurer nuit & jour
C'est le premier tribut que l'on paye à l'Amour,
Avant qu'entrer fous fa puiflance,

Je veux qu'il m'en donne quittance;
Auffi bien parmi les rigueurs,
Que fert à l'ame la plus tendre
De verfer des torrens de pleurs?
L'eau que fes yeux peuvent répandre
N'attire jamais de faveurs.

Une ame quand elle foûpire

Fait injure à l'Amour, & détruit fon empire:
Elle effarouche ceux qu'il veut affujettir,

Et dés-lors qu'un Amant novice

Voit qu'un Amant profés fouffre comme un martir
Il croit qu'aimer n'eft qu'un fupplice,

Et tâche pour s'en garentir,
Malgré toutes les fympathies,
De jetter le forc aux orties.

Un efprit eft content qui voit que ce vainqueur
Etablit fon empire à la faveur des charmes,

Qu'il affure la paix à qui lui rend les armes,
Qu'il nous comble de joie en nous bleffant au cœur
Et dans ce calme doux fort librement s'embarque
Sous les loix d'un fi bon Monarque.

Que fi par un injufte effort,

Il s'érige en tiran dans mon ame affervie,
Je reprendrai bien-tôt ma liberté ravie,
Je ne puis confentir à recevoir la mort
Par la main de l'Amour à qui tout doit la vie,
Et je crois fans lui faire tort,

Qu'on reconnoît aflez fon pouvoir legitime,
Quand on eft fon fujet fans être fa victime.
Ainfi pour recevoir fes feux

J'ouvre mon ame toute entiere,

Et veux bien lui ceder le plus beau de mes vœux,
Pourvû qu'il vienne à moi, comme il vient à sa mere,'
Accompagné de ris, de graces, & de jeux.
Philis, mon ame est toute prête

1

A devenir votre conquête;

Si je fuis votre fait après un tel aveu,

Vivons dans les plaifirs; fi l'Amour est un Dieu,
Il faut pour l'honorer être toûjours en fête.
Sur le même fujet.

Il eft vrai, belle Iris, je vous aime, il eft vrai,
Et mon amour doit vivre autant que je vivrai.
Si c'eft vous offen fer, fachez que mon envie
Eft de vous offenfer tout le tems de ma vie:
Si c'eft crime d'aimer, je veux vous avertir,
Que je mourrai plutôt que de m'en repentir.
Mais depuis quand l'amour peut-il rendre coupable?
Et quel crime d'aimer ce que l'on trouve aimable?
Iris, au nom des Dieux ne nous plaignons de rien;
Vos yeux font leur devoir, & mon cœur fait le fien.
Et s'il fe peut trouver dans l'amoureux martire
Du crime à le caufer, & du crime à le dire,
Vous faites le premier en caufant mon amour,
Je fais un fecond crime en l'expofant au jour,
Nous fommes en cela criminels l'un & l'autre,

Con

Pelion

Confentez à mon crime, & je consens au vôtre,
Je pardonne à vos yeux de ce qu'ils m'ont brûlé,
Pardonnez à mon cœur de ce qu'il a parlé.

L'Amour est la marque d'un cœur genereux dans un
jeune Prince.

Moliere. Le chagrin des vieux jours ne peut aigrir mon ame,
Contre les doux tranfports de l'amoureufe flâme,
Et bien que mon fort touche à fes derniers foleils,
Je dirai que l'amour fied bien à vos pareils,
Que le tribut qu'on rend aux traits d'un beau vifage
De la beauté d'une ame eft un clair témoignage,
Et qu'il eft mal-aifé que fans être amoureux,
Un jeune Prince foit & grand & genereux :
C'est une qualité que j'aime en un Monarque;
La tendreffe du cœur eft une grande marque,
Que d'un Prince en tout tems on peut tout préfumer,
Dès qu'on voit que fon ame eft capable d'aimer
Oui, cette paffion de toutes la plus belle,
Traîne dans un efprit cent vertus après elle;
Aux nobles actions elle pouffe les cœurs,
Et tous les grands Heros ont fenti fes ardeurs.

Il eft plus aifé de fe défendre de l'Amour, lors qu'on a
éprouvé fes peines que lors qu'on n'a jamais aimé.

Mad. des Vous de qui la Raifon ne fait plus de faux pas,
holieres. Ah! qu'il vous eft aifé de dire: n'aimez pas.

Quand on connoît l'Amour, fes caprices, fes peines,
Quand on fait comme vous ce que pesent fes chaînes
Sage par fes mal-heurs on méprife aisement
Les douceurs dont il flate un trop credule Amant.
Mais quand on n'a point fait la trifte experience
Des jalouses fureurs, des dépits, de l'absence;
Que pour faire fentir ses redoutables feux
Il ne paroît fuivi que des ris & des jeux:
Qu'un cœur réfifte mal à fon pouvoir fupréme!
Que de foins, que d'efforts pour empêcher qu'il n'aime?

SON

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Je fuis, crioit jadis Apollon à Daphné,
Lors que tout hors d'haleine il couroit aprés elle,
Et lui contoit pourtant la longue Kirielle
Des rares qualitez dont il étoit orné.

Je fuis le Dieu des vers, je fuis bel efprit né.

Mais les vers n'étoient point les charmes de la Belle.
Je fai jouër du luth, arrêtez: bagatelle;
Le luth ne pouvoit rien fur ce cœur obstiné.
Je connois la vertu de la moindre racine,
Je fuis, n'en doutez point, Dieu de la Médecine.
Daphné couroit plus fort à ce nom fi fatal.
Mais s'il eût dit, voïez quelle eft vôtre conquête,
Je fuis un jeune Dieu, beau, galant, liberal,
Daphné, fur ma parole, auroit tourné la tête.

Les prefens font la clef des cœurs.

La clef du coffre fort & des cœurs c'eft la même:

Que fi ce n'eft celle des cœurs,

C'eft du moins celle des faveurs.
Amour doit à ce ftratagême

La plus grand' part de fes exploits:

A-t-il épuifé fon carquois,

Il met tout fon falut en ce charme fuprême.

Je tiens qu'il a raifon; car qui hait les préfens?
Tous les humains en font friands,
Princes, Rois, Magiftrats. Ainfi quand une Belle
En croira l'ufage permis,

Quand Venus ne fera que ce que fait Themis,
Je ne m'écrierai pas contre elle;

On a bien plus d'une querelle

A lui faire fans celle-là.

Ur

AMY MOME

Secourue par Neptune.

Sur les rives d'Argos, près de ces bords arides

la mer vient brifer fes flots impetueux,

B

De Fon tenelle.

La For tate

Rouffe

La

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