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tout en sauvegardant les intérêts respectifs des deux corps, les trains des compagnies de chemins de fer puissent être arrangés de façon à faire autant de raccordements que possible avec les différents trains qui transportent les malles.

Il y a un grand nombre d'autres cas où il pourrait s'établit plus de co opération entre les chemins de fer et la poste, mais comme ceci intéresse plutôt les hommes du métier, je n'irai pas plus loin dans cette voie là.

Les débuts des chemins de fer au Canada furent modestes, comme ils le furent du reste dans le monde entier. En 1802, un ingénieur anglais, du nom de Vivian, fut le premier à concevoir l'idée du chemin de fer. Il en construisit un petit dans les mines de Cornouailles qui servit au transport du charbon. En 1840 tous les chemins de fer du monde entier couvraient une distance de 4,333 milles. Le Canada n'entrait dans ce chiffre que pour le nombre de milles qui séparent Laprairie de S.-Jean. En effet, en 1836, un chemin de fer fut construit entre Laprairie et S.-Jean. Ce dut être un bien grand effort qui nécessita un long repos puisque ce chemin de fer resta le seul chez nous jusqu'en 1847, alors qu'un nouveau tronçon fût construit entre Montréal et Lachine, puis un autre entre Montréal et S.-Hyacinthe. C'étaient là tous nos chemins de fer en 1851. En 1851-52 l'on compléta entre Montréal et Rouses-Point une ligne passant par Lachine, Laprairie et S.-Jean. A la même époque le chemin "Montréal-S.-Hyacinthe" se continua jusqu'à Sherbrooke et jusqu'aux frontières d'où il faisait raccordement avec Portland via The Atlantic & St. Lawrence Railway, une compagnie américaine.

A partir de 1853 les chemins de fer se développèrent beaucoup. En 1856 le Grand-Tronc avait terminé une ligne entre Québec & Kingston. Ce fut un grand avantage pour la poste, puisque le voyage d'un postillon, qui généralement durait 4 jours, se fit en 31 heures; aujourd'hui il dure à peu près le tiers de ce temps là. Le Pont Victoria date aussi de cette époque (1856).

Jusqu'en 1857 les malles étaient transportées en fourgons à bagages, mais en 1857 parut au Canada le premier bureau de poste ambulant, avec des commis de malles sur chemins de fer. L'organisation de ce service en Angleterre remontait à 1838. Mais les EtatsUnis ne l'adoptèrent que 7 ans après le Canada.

L'usage des chemins de fer pour le transport des malles donna naissance à des problèmes financiers assez difficiles à résoudre. L'augmentation du coût du transport des malles fut considérable. La fixation d'un tarif pour ce transport occasionna de nombreuses et longues controverses et il fallut souvent faire et refaire les arrangements entre le ministère des Postes et les compagnies de chemins de fer. En 1853, le Gouvernement s'était engagé à payer au Grand Tronc $110. par mille de voie ferrée, avec cette stipulation que la compagnie du chemin de fer devait se charger du transport des sacs entre le chemin de fer et les différents bureaux de poste qu'il y avait sur son parcours. L'engagement persista jusqu'en 1858. La Compagnie prétendit alors que ce paiement n'était pas suffisant. Toutefois, le Gouvernement au lieu d'augmenter le tarif le réduisit à $70.00 par mille de voie ferrée, à quoi la Compagnie se refusa.

La question du tarif demeura une pierre d'achoppement entre le Gouvernement et la Compagnie jusqu'en 1865, quand on constitua une Commission Royale, dont M. William Hume Blake fut nommé le président. On soumit différents rapports; l'un fut d'abord accepté puis rejeté. Finalement, en 1870, un arrangement intervint en vertu duquel le Grand Tronc reçut $160.00 par mille de voie ferrée, par année, pour ses lignes principales, et $80.00 pour ses tronçons. Un peu plus tard, le Gouvernement s'entendit avec l'Intercolonial et lui donna $130.00 par année par mille de voie ferrée, lignes principales et tronçons. On apporta depuis plusieurs modifications à ces arrangements. Le dernier passé avec les chemins de fer, et qui est présentement en vigueur, prend comme base le nombre de sacs qui peuvent entrer dans une superficie quelconque de wagon. L'on a fait des expériences à ce sujet, et l'on s'est arrêté aux chiffres suivants: un espace de 3 pds équivaut à 63 sacs, et le Gouvernement paye aux chemins de fer 4cts par mille pour un tel espace. Il paye 61⁄2cts par mille pour un espace de 7pds qui est supposé contenir 147 sacs; 13cts pour un espace de 15 pds qui est supposé contenir 315 sacs et ainsi de suite à mesure que l'espace augmente. Quand le Gouvernement a besoin d'un train complet, il paye $2.70 par mille. Un des Inspecteurs du Service Postal du district de Montréal, qui s'occupe particulièrement de la surveillance des chemins de fer, a fait le calcul qu'un wagon de 60 pds circulant entre les cités de Montréal et Toronto sur le Canadien National, trains 18 et 19, rapportait à sa compagnie $42,000.00 par année; le même entre Montréal

et Vancouver coûterait au ministère des Postes $52,000.00 par année Comme on le voit par ces chiffres, le ministère des Postes est un fort client pour les compagnies des chemins de fer. De fait, durant l'année fiscale 1923-1924, bien près d'un tiers des dépenses du ministère des Postes est allé aux compagnies de chemins de fer.

Depuis son organisation en 1857, le service des bureaux ambulants a fait des progrès remarquables. En 1860, il y avait 68 commis ambulants, qui recevaient pour leurs services environ $32,000.00 par année. A la fin de février 1924 nous en avions 1317 permanents et 19 temporaires, soit 1336 qui, du 1er avril 1923 à la fin de février 1924, avaient reçu des émoluments s'élevant à la somme de $2,350,963.00

Il y quinze ans l'administration postale en Canada était arrivée à un succès financier considérable. Le ministère des Postes accusait à la fin de chaque année fiscale un surplus de plusieurs millions. L'on avait bien profité de cet état de prospérité pour diminuer le coût d'affranchissement des lettres de 3cts à 2 cts en Canada, mais cela n'avait pu arrêter la marche des surplus.

Vers 1910, l'honorable Rodolphe Lemieux, alors Ministre des Postes, eut l'idée d'étendre les avantages de la livraison à domicile à la population des campagnes. Quelques routes furent inaugurées, particulièrement dans les Cantons de l'Est. Puis, vinrent les élections de 1911 Le Gouvernement dont M. Lemieux faisait partie fut renversé. Néanmoins l'idée de la poste rurale s'imposa à l'honorable M. Pelletier, qui y donna une attention particulière. Les successeurs de M. Pelletier firent de même et le Canada compte auiourd'hui 3772 routes rurales Malgré l'établissement d'un aussi grand nombre de routes rurales, près de 9000 services de transport persistent encore, soit entre des stations de chemins de fer et des bureaux de poste, soit entre différents bureaux de poste. Nos courriers couvrent ainsi une distance d'au-delà de 45,000 milles par année, et nous avons à l'heure qu'il est en Canada 2,267 routes de facteurs urbains. Quant aux villes, elles n'obtiennent un service de livraison par facteurs que si leur population atteint 12,000 âmes et leur revenu $25,000.00 L'établissement de la poste rurale a permis au ministère des Postes de fermer un grand nombre de bureaux dans toute l'étendue du Canada; malgré cela, il en reste encore 12,311.

Nous avons établi depuis quelques années un service de colis livrables contre rembou sement; c'est un avantage que le public semble avoir apprécié. Durant l'année 1924 il a été expédié 731,463 de ces colis et 3,024,076 colis assurés. Ce service qui n'existait à l'origine que pour les colis échangés entre les différents bureaux de poste du Canada, a été depuis étendu aux Etats-Unis, à la GrandeBretagne et à l'Irlande.

Dautre part, durant l'année fiscale expirée le 31 mars 1924, l'administration des Postes du Canada a émis 12,561,490 mandatsposte et elle a payé 5,806,129 bons de poste.

L'administration postale a mis au service de la population du pays une Caisse d'Epargne, dont les petits déposants font bien de se servir. L'intérêt payé sur les dépôts est celui des banques. Durant l'année terminée le 31 mars 1924, on a ouvert 14,649 nouveaux comptes à la Caisse d'Epargne et il a été fait 66,904 nouveaux dépôts. Nous avons au Canada 1360 bureaux de poste qui sont autorisés à recevoir ces dépôts.

Le Canada expédie en moyenne chaque année 12,000,000 de livres de matières postales aux autres pays. Depuis le mois de mars 1924, tous les objets de 2ème et de 3ème classe ainsi que les colis postaux sont expédiés à la Grande-Bretagne et aux pays étrangers directement de Montréal. Ceci a eu pour effet d'augmenter considérablement le chiffre de nos expéditions. En décembre 1923, 50,629 colis contenus dans 1580 sacs sont partis d'ici et en décembre 1924, 194,394 contenus dans 7479 sacs; en décembre 1923, 96,647 lbs de journaux dans 1826 sacs et en décembre 1924, 186,390 lbs dans 3890 sacs. Au reste, la fin de l'année 1924 fut marquée par une augmentation énorme des affaires de la Poste à Montréal,

En 1923, durant les trois jours qui ont précédé Noël, les levées des boîtes faites par la Canadian Transfer, nous avaient fourni 1802 sacs de matière postale; en 1924, elles nous ont donné 2887 sacs, plus 281, chiffre des levées faites par certains de nos facteurs. Le bureau central a préparé pour les diverses stations postales de la ville, durant les mêmes trois jours, en 1922, 4141 sacs; en 1923, 4719; en 1924, 6749.

De plus nous pouvons affirmer que grâce au système adopté pour la livraison de la ville, les sacs faits au mois de décembre dernier contenaient beaucoup plus que ceux faits les années précédentes.

Durant les cinq jours qui ont précédé Noël nos étampeuses mécaniques ont enregistré, en décembre dernier, 1,363,200 lettres de plus que durant les mêmes cinq jours de l'année précédente, soit une augmentation de plus de 260,000 lettres par jour.

Je vous disais que vers le milieu du 17ème siècle, le revenu de la Poste dans toute l'Angleterre s'élevait à 5000 livres par année, soit un peu plus de $23,000.00 Eh bien! en décembre 1924 l'affranchissement des objets de correspondance de toutes les classes, mis à la poste à Montréal, a rapporté au-delà de $23,000.00 de plus qu'en décembre 1923.

Nous allons donc toutes voiles déployées vers le progrès. Nous sommes loin du temps où les maîtres écrivaient leur correspondance sur la tête de leurs esclaves. Il y a même tout un monde entre l'époque où le courrier Durant faisait à pied le trajet entre Québec et Halifax, aller-retour, et celle où nous vivons aujourd'hui. Tout ce progrès s'est accompli au prix de grands efforts et de beaucoup de dévouement. C'est du reste la loi du progrès. Nous tirons parti de ce qu'ont fait ceux qui sont passés avant nous et nous y ajoutons du nôtre, afin de transmettre à ceux qui nous suivront un peu plus que ce que nous avons reçu de nos prédécesseurs.

Victor GAUDET,

Directeur des Postes de Montréal.

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