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Liv. lib. 28, cap. 35.

Seneca, epist. 86.

Xenoph. in Сугор. 1, г.

donner toute son application aux affaires publiques. Il n'était pas fort occupé de sa parure; elle était mâle et militaire, fort convenable à sa taille, qui était grande et majestueuse. Præterquam quòd suapte natura multa majestas inerat, adornabat promissa cæsaries habitusque corporis, non cultus munditiis, sed virilis verè ac militaris. Ce que Sénèque nous dit de la simplicité de ses bains et de sa maison de campagne nous laisse à juger de ce qu'il était dans le camp et à la tête des troupes.

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C'est en menant de la sorte une vie sobre et frugale que les généraux peuvent remplir cette partie de leur devoir que Cambyse recommande à son fils Cyrus avec tant de soin, comme extrêmement propre à animer les troupes et à leur faire aimer leurs chefs, qui est de donner l'exemple du travail aux soldats, en supportant comme eux, et même plus qu'eux, le froid, le chaud et la fatigue. En quoi 1, dit-il, la différence sera toujours fort grande entre le général et le soldat, parce que celui-ci, dans le travail, n'y sent que le travail et la peine; au lieu que l'autre, exposé en spectacle aux yeux de toute l'armée, y trouve l'honneur et la gloire; motifs qui diminuent beaucoup du poids de la fatigue, et qui la rendent plus légère.

Ce n'est pas que Scipion fût ennemi d'une joie sage et modérée. Tite-Live, en parlant de la réception honorable 2 que lui fit le roi Philippe lorsqu'il passa, avec

I

Itaque semper Africanus (c'est le second Scipion) socraticum Xenophontem in manibus habebat: cujus imprimis laudabat illud, quod diceret, eosdem labores non esse æquè

graves imperatori et militi, quòd ipse honos laborem leviorem faceret imparatorum. » (Cic. lib. 2, Tusc. Quæst. n. 62.)

2 « Venientes regio apparatu ac

son frère, par ses états, pour marcher contre Antiochus, remarque que Scipion y fut très-sensible, et qu'il admira, dans le roi de Macédoine, l'esprit, la politesse, les graces, dont il sut assaisonner les repas qu'il lui donna; qualités, ajoute Tite-Live, que cet illustre Romain, si grand dans tout le reste, trouvait estimables, pourvu qu'elles ne dégénérassent point en luxe et en faste.

6. Savoir également employer la force et la ruse.

Ce que dit Polybe est bien vrai, qu'en fait de guerre, la ruse et la finesse peuvent beaucoup plus que la force ouverte et les desseins déclarés.

C'est ici qu'excelle Annibal. Dans toutes ses actions, dans toutes ses entreprises, dans toutes les batailles qu'il donna, la ruse et la finesse y eurent toujours la plus grande part. La manière dont il trompa le plus avisé Liv. lib. 22, et le plus prudent de tous les chefs, en faisant allumer c. 16 et 17. de la paille aux cornes de deux mille bœufs pour se tirer d'un mauvais pas où il s'était engagé, suffirait seule pour montrer combien Annibal était habile dans la science des stratagèmes. Elle n'était pas non plus incon- Id. lib. 30 nue à Scipion; et ce qu'il fit pour brûler les deux camps des ennemis en Afrique en est une grande preuve.

cepit et prosecutus est rex. Multa in eo et dexteritas et humanitas visa; quæ commendabilia apud Africanum

erant, virum, sicut ad cætera egre-
gium, ita a comitate, quæ sine luxu-
ria esset, non aversum. » (Liv. 37, 7.)

30,

cap. 2-6.

Tome XVIII. Hist. Rom.

23

Pag. 603.

Pag. 587.

7. Ne hasarder jamais sa personne sans nécessité.

Polybe établit, comme une maxime essentielle et capitale pour un commandant, que jamais il ne doit exposer sa personne quand l'action n'est point générale et décisive, et qu'alors même il doit s'éloigner du danger le plus qu'il lui est possible. Il fortifie cette maxime par l'exemple contraire de Marcellus, dont la bravoure téméraire, peu convenable à un chef de son âge et de son expérience, lui coûta la vie et pensa ruiner l'empire. C'est à cette occasion qu'il remarque qu'Annibal, qu'on ne soupçonnera pas sans doute de timidité et d'un trop grand amour de la vie, dans tous les combats qu'il donna, eut toujours soin de mettre sa personne en sûreté. Et il fait la même remarque au sujet de Scipion, qui, dans le siége de Carthagène, fut obligé de payer de sa personne et de s'exposer au danger, mais qui le fit avec sagesse et circonspection.

Plutarque, dans la comparaison qu'il fait de Pélopidas et de Marcellus, dit que la blessure ou la mort d'un général ne doit pas être simplement un accident, mais un moyen qui contribue au succès, et qui influe dans la victoire et le salut de l'armée, οὐ πάθος, ἀλλὰ πρᾶξις ; et il regrette que les deux grands hommes dont il parle aient sacrifié à leur valeur toutes les autres vertus, en prodiguant sans nécessité leur sang, et qu'ils soient morts pour eux-mêmes, et non pour la patrie, à laquelle les généraux sont comptables de leur mort aussi-bien de leur vie.

que

8. Art et habileté dans les combats.

Il faudrait être du métier, pour faire remarquer, dans les différents combats qu'ont donnés Annibal et Scipion, leur habileté, leur adresse, leur présence d'esprit, leur attention à profiter de tous les mouvements de l'ennemi, de toutes les occasions subites que le hasard présente, de toutes les circonstances du temps et du lieu; en un mot, de tout ce qui peut contribuer à la victoire. Je comprends bien qu'un homme de guerre doit prendre un grand plaisir à lire dans les bons auteurs la description de ces fameuses batailles qui ont décidé du sort de l'univers, aussi-bien que de la réputation des anciens capitaines, et que c'est un grand moyen de se perfectionner dans la science militaire, que d'étudier sous de tels maîtres et de se mettre en état de profiter autant de leurs fautes que de leurs bonnes qualités. Mais de telles réflexions passent mes forces, et ne me conviennent point.

9. Avoir le talent de la parole, et savoir manier adroitement les esprits.

Je mets cette qualité parmi les vertus guerrières, parce qu'un général doit l'être en tout, et que, pour en remplir les fonctions, la langue, aussi-bien que la tête et la main, est souvent pour lui un instrument nécessaire. C'est une des choses qu'Annibal estimait le plus dans Pyrrhus, artem etiam conciliandi sibi homines Liv. lib. 35, miram habuisse; et il mettait ce talent de pair avec la parfaite connaissance de l'art militaire, par laquelle Pyrrhus se distinguait éminemment.

cap. 14.

n. gr.

A juger de nos deux capitaines par les harangues que les historiens nous en ont laissées, ils excellaient tous deux dans le talent de la parole: mais je ne sais si ces historiens ne leur ont pas un peu prêté de leur éloquence. Quelques reparties fort ingénieuses d'Annibal, que l'histoire nous a conservées, montrent qu'il avait un fonds d'esprit excellent, et que la nature seule aurait pu faire en lui ce que l'art et l'étude font dans les autres. Mais Cornélius Népos nous apprend qu'il avait des lettres1, et qu'il avait même composé des ouvrages en grec. Pour Scipion, il avait l'esprit plus cultivé; et quoique son siècle ne fût pas encore aussi poli que celui du second Scipion, surnommé l'Africain comme lui, son intime Liv. lib. 26, liaison avec le poète Ennius, avec qui il voulut avoir un tombeau commun, fait juger qu'il ne manquait pas de goût pour les belles-lettres. Quoi qu'il en soit, TiteLive remarque que, lorsqu'il fut arrivé en Espagne pour y commander les troupes, dans la première audience qu'il donna aux députés de la province il parla avec un certain air de grandeur qui attire le respect, et en même temps avec un air simple et naturel qui persuade et qui inspire la confiance; de sorte que, sans laisser échapper aucune parole qui ressentît le moins du monde la hauteur, il gagna d'abord tous les esprits, et s'acquit une estime et une admiration universelles. Dans une autre occasion, où Scipion se trouva avec Asdrubal chez Syphax pour traiter d'affaires, le même historien observe que Scipion savait manier les esprits, et les tourner comme il lui plaisait avec tant de dextérité,

Lib. 28, n. 18.

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