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LIVRE VINGT-TROISIÈME.

Ce livre renferme l'espace de trois années, 561,562,

563. Il contient la guerre des Romains contre Antiochus, terminée par la conquête de l'Asie-Mineure, qui mérita à L. Scipion le surnom d'Asiatique.

SI. Préparatifs pour la guerre contre Antiochus, du côté de la religion. Préparatifs, du côté des soins humains. Départ du consul Acilius pour la Grèce. Réponse du sénat aux ambassadeurs de Philippe, de Ptolémée, de Masinissa et des Carthaginois, qui venaient offrir des secours aux Romains. Antiochus tient un conseil de guerre à Démétriade. Beau discours d'Annibal, dont les conseils ne sont suivis en rien. Antiochus prend quelques villes de Thessalie. Il épouse une jeune fille de Chalcis et passe tout l'hiver en festins. Le consul Acilius arrive dans la Grèce. Beaucoup de villes se rendent à lui. Antiochus, destitué de tout secours, se retire dans le défilé des Thermopyles. Victoire considérable remportée par le consul Acilius sur le roi Antiochus au pas des Thermopyles. Caton eut grande part à cette victoire. Antiochus se retire à Chalcis, et de là à Éphèse. Caton porte à Rome la nouvelle de la victoire.

Acilius tâche en vain de gagner par la douceur les Etoliens. Il assiége Héraclée, et la force après plus d'un mois de résistance. Philippe assiége la ville de Lamia: le consul lui ordonne d'en lever le siége. Les Etoliens pressent Antiochus de continuer la guerre. La prise d'Héraclée détermine les Étoliens à demander la paix. Les dures conditions que leur impose le consul les rebutent. Acilius forme le siége de Naupacte. Quintius sauve cette ville, qui était sur le point d'étre forcée. Ambassadeurs de Philippe à Rome. Annibal tire Antiochus de la sécurité où il était à

Ephèse. Victoire navale remportée par Livius, amiral de la flotte romaine, sur celle d'Antiochus. L. Cornélius Scipion et C. Lélius sont nommés consuls.

P. CORNELIUS SCIPIO NASICA.

MANIUS ACILIUS GLABRIO.

AN. R. 561.

Av. J.C. 191.

pour la

guerre contre Antiochus, du

côté de la Liv. lib. 36,

religion.

cap. I.

Dès que les consuls eurent pris possession de leur Préparatifs charge, le sénat leur ordonna d'immoler des vietimes de la grande espèce dans les principaux temples, et de prier les dieux d'accorder au sénat et au peuple romain leur protection dans la nouvelle guerre qu'ils étaient sur le point d'entreprendre. Les aruspices assurèrent que les entrailles de ces victimes n'annonçaient que d'heureux présages; que cette guerre se terminerait par la victoire, et étendrait les bornes de l'empire plus loin qu'elles n'avaient encore été portées. En conséquence la guerre fut ordonnée contre Antiochus par le sénat et par le peuple. Les consuls ayant tiré au sort

Plut. in

AEmil. Paul.

leurs départements, la Grèce échut à Acilius, l'Italie à Cornélius; et, parmi les préteurs, l'Espagne ultérieure échut à L. Æmilius Paulus, dont nous parlerons dans la suite avec plus d'étendue. Il y commanda en qualité de proconsul; c'est pourquoi Plutarque observe qu'il avait douze licteurs. On ordonna des prières publiques Liv. lib. 36, pendant deux jours. On s'engagea, par des vœux solennels, de célébrer les grands jeux en l'honneur de Jupiter pendant dix jours, si le succès de la guerre était favorable, et d'offrir des présents dans tous les temples des dieux. Quelle honte un paganisme si religieux, quoique aveugle, ne ferait-il point à des généraux chrétiens, s'ils rougissaient de la piété et de la religion!

cap. 1.

Préparatifs,

du côté des soins

humains.

cap. 2.

On n'omit rien non plus du côté des soins humains. Le préteur C. Livius, à qui le commandement de la Liv. lib. 36, flotte était échu, eut ordre de passer au plus tôt dans la Grèce avec trente vaisseaux, et d'y joindre ceux qu'il recevrait d'Atilius. On envoya six députés en Afrique, trois à Carthage, et trois dans la Numidie, pour y amasser des blés qui seraient portés en Grèce, et dont le peuple romain devait payer le prix. On avait pris les mêmes précautions dans la Sicile et dans la Sardaigne. On était tellement occupé des soins et des préparatifs de cette guerre, que le consul P. Cornélius défendit, par un décret, à tous les sénateurs et aux magistrats du second ordre de s'éloigner de Rome de plus d'une journée. Il défendit aussi qu'il se trouvât en même temps plus de quatre sénateurs absents de la ville. Le consul Acilius, pour ne manquer en rien aux

1 Les magistrats du premier ordre étaient les censeurs, les consuls, les

préteurs: ceux du second, les édiles, les questeurs, les tribuns.

cérémonies prescrites, s'adressa aux féciaux, par ordre du sénat, pour savoir s'il fallait déclarer la guerre en parlant à Antiochus en personne, ou s'il suffisait de s'adresser à quelqu'une de ses places; et s'il la fallait déclarer séparément aux Étoliens. La réponse fut, sur le premier point, que la chose était indifférente; sur le second, que les Étoliens avaient eux-mêmes fait la déclaration de la guerre par les actes d'hostilité qu'ils avaient exercés.

consul

Acilius.

Le consul Acilius, après avoir ainsi pourvu à tout, Départ du et avoir marqué le rendez-vous de ses troupes à Brunduse pour le quinze de mai, partit lui-même de Rome quelques jours auparavant.

Dans le même temps, les ambassadeurs de Philippe, roi de Macédoine, et ceux de Ptolémée, roi d'Égypte, arrivèrent à Rome, où ils venaient offrir aux Romains des troupes, de l'argent et des vivres pour la guerre qu'ils allaient commencer. Ceux de Ptolémée apportaient d'avance mille livres pesant d'or, qui équivalent à quinze cent soixante-deux marcs quatre onces de notre poids, et vingt mille livres pesant d'argent, c'est-à-dire trente et un mille deux cent cinquante marcs. On remercia ces deux princes de leur générosité et de leur attention, mais on n'accepta point leurs présents. Et sur ce qu'ils offraient l'un et l'autre de venir dans l'Étolie avec toutes leurs forces, et d'y faire la guerre pour la république, le sénat en marqua à Ptolémée sa reconnaissance, mais le dispensa de ce soin. Pour Philippe, on répondit à ses ambassadeurs que le sénat et le peuple romain lui seraient obligés s'il voulait bien seconder le consul Acilius.

Il vint aussi des ambassadeurs des Carthaginois et

Réponses du ambassa

sénat aux

deurs de Philippe, de Ptolémée, de

Masinissa, et des Cartha

ginois, qui venaient offrir des

secours aux Liv. lib. 36,

Romains.

cap. 4

Antiochus tient un

guerre

Démétriade.

du roi Masinissa. Les premiers promirent que leur république ferait porter à l'armée du consul cinq cent mille boisseaux d'orge, et un nombre de boisseaux de blé encore plus grand vraisemblablement, mais qui manque dans le texte de Tite-Live. Ils offraient aussi d'envoyer à Rome un nombre de boisseaux de ces deux espèces de grains, qui égalerait la moitié de ce qu'ils destinaient pour l'armée. Ils priaient le sénat de vouloir bien accepter ces provisions à titre de présents. Ils ajoutaient que Carthage équiperait une flotte et la garnirait de troupes soudoyées à ses dépens, et paierait comptant au peuple romain toutes les sommes qu'elle devait acquitter en différents termes et pendant plusieurs années. Les ambassadeurs de Masinissa déclaraient que leur maître ferait voiturer dans l'armée de Grèce cinq cent mille boisseaux de froment et trois cent mille d'orge, et à Rome trois cent mille boisseaux de froment et deux cent cinquante mille d'orge, et qu'il enverrait au consul Acilius cinq cents cavaliers et vingt éléphants. A l'égard des grains, on répondit aux uns et aux autres que les Romains ne les accepteraient qu'à condition payer le prix. On remercia les Carthaginois de leur flotte, sans rien accepter que les vaisseaux qu'ils pouvaient devoir en vertu du traité, et on leur déclara qu'on ne recevrait les sommes dont ils étaient redevables qu'à l'échéance de chaque paiement.

d'en

Antiochus cependant, après avoir sollicité plusieurs conseil de villes ou par ses envoyés, ou par lui-même, à entrer dans son alliance, se rendit à Démétriade, où il vouLiv. lib. 36, lait tenir un grand conseil pour y délibérer sur les opérations de la campagne que l'on était près de commencer. Annibal, qui depuis long-temps n'avait point été admis

cap. 6.

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