Page images
PDF
EPUB

Heidelberg, Winter, 1903, gr. in-8°, p. 47) n'est cependant pas convaincu de l'erreur de Goethe dans sa théorie des couleurs et sans essayer de rouvrir le débat entre lui et Newton, il a voulu démontrer que la conception du poète n'est pas sans résultats précieux dans le domaine de l'esthétique. M. P., qui est critique d'art, a bien pu trouver dans la théorie de Goethe, dont le point de départ fut, comme on sait, l'étude de la peinture italienne, nombre d'observations de détail qui se vérifient dans la technique des peintres et que quelques-uns même, comme Léonard de Vinci, ont avant lui analysées, plume en main; on lui saura gré de ces rapprochements et du choix de vérités qu'il a recueillies dans la Farbenlehre, mais il ne réussira pas à changer l'opinion établie que de tous les titres scientifiques de Goethe sa Chromatique est le plus faible. — L. R.

à

On sait qu'une réforme importante, inaugurée à Altona et vivement reprise par Francfort, a créé en Allemagne depuis près de vingt-cinq ans un nouveau type de Gymnase et de Realgymnase, en reculant jusqu'à la cinquième l'enseignement du latin qui commence en huitième (je conserve les noms équivalents qui nous sont plus familiers) dans les autres établissements. Les directeurs et professeurs de ces Reformschulen dont le nombre actuel est de 60 environ, ont tenu Cassel en 1901 un congrès où ils ont agité des questions d'organisation, de programmes, distribution d'heures, etc., en échangeant les expériences déjà faites. Je ne puis pas entrer dans le détail de ces débats qu'on lira dans la première partie du Manuel que M. Otto LIERMANN se propose de consacrer à la question des nouvelles écoles (Reformschulen nach Frankfurter und Altonaer System. Erster Teil: die Casseler Novemberkonferenz von 1901 über Fragen des Reformschulunterrichts. Berlin, Weidmann, 1903, gr. in-8°, p. 140. Mk. 3 fr. 60). Nous recevrons avec plaisir d'une source aussi autorisée les renseignements qu'il nous promet sur l'histoire, les plans d'études et les méthodes d'enseignement des Reformschulen ; ils nous permettront, j'espère, d'avoir des notions précises sur l'étendue et la valeur de cette transformation partielle de l'enseignement secondaire en Allemagne et d'y trouver pour nous le moment est favorable matière à comparaison.

. L. R.

[ocr errors]

1

- L'auteur de la précédente brochure, au cours des débats qu'elle résume, émettait le vœu que dans l'enseignement du latin une place fût faite, à côté des classiques, aux autres écrivains de langue latine, en particulier aux humanistes. Un professeur du Reformgymnasium de Barmen, M. W. KERSTEN, vient de donner une forme à ce desideratum en adaptant à l'usage des classes quelques dialogues d'Érasme (20 Colloquia familiaria des Erasmus von Rotterdam. Leipzig, Freytag. 1903, in-16, p. 64. Mk. 1). Seulement son but n'est pas le même. Moins préoccupé de la question du fond, il veut que son petit livre initie les élèves au maniement oral et pratique du latin, de la même manière qu'ils se familiarisent avec l'usage d'une langue vivante par les exercices correspondants de leurs Lesebücher français ou anglais. L'analogie entre les deux enseignements est loin cependant d'être complète et cet emprunt à une méthode étrangère ou, si l'on veut, ce retour à de vieilles traditions que nous avons aussi connues ne laisse pas de soulever beaucoup d'objections. Mais il s'agit d'une expérience à tenter il faut la signaler et en attendre les résultats. L. R.

- M. Auguste THERET a voulu réveiller deux gloires provinciales, deux poètes berrichons, Henri de Latouche et Émile Deschamps (Littérature du Berry. Poésie. Le XIX siècle avec H. de Latouche et Em. Deschamps. Paris, Société

420

REVUE CRITIQUE D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE

anonyme de publications périodiques, 1902. In-8°, p. 592. Fr. 10). Il n'a pas ménagé son admiration à ces romantiques oubliés; mais ce lourd volume avec ses copieuses citations et ses interminables analyses, paraîtra excessif même à ses compatriotes. De critique, il n'en est pas question; elle est d'ailleurs singulièrement informée. Voici comment à propos de l'influence allemande subie par de Latouche M. Th. définit le Lied : « Le Lied poétique, c'est la fable, la chanson et la satire réunies », p. 102 et p. 356 : « Le Lied renferme l'élégie, la cantate, l'épigramme ou la satire ». Si Goethe a écrit l'Erlkönig, c'est qu'il voulait donner une leçon aux nourrices superstitieuses et « guérir ses concitoyens des idées étroites et routinières » (p. 95). Le style est non moins remarquable. P. 99, << M. de Latouche a imité des élégies italiennes, ossianiques et suissesses »; ailleurs, p. 355, il a défendu le bon goût à corps et à cris (sic), au point de se séparer du Cénacle pour la raison que des poètes emballés faisaient des choses extravagantes dans le romantisme «. J'ajouterai seulement avec M. Th., p. 315: « J'en passe et de bien plus raides ». — - L. R.

«

Notre collaborateur, M. Hubert PERNOT, vient de publier: En pays turc; L'ile de Chio, avec 17 mélodies populaires et 118 simili-gravures exécutées d'après les clichés de l'auteur; Paris, J. Maisonneuve, 1903; 284 pp. in-8°. C'est un livre sincère et exact. Les « bienfaits » de l'administration turque y sont retracés sans optimisme officiel. D'autre part, les Grecs sont peints sans flatterie. M. Pernot avait emporté une jumelle photographique et un phonographe. Grâce au phonographe, il a pu transcrire et noter des mélodies populaires, en même temps qu'il recueillait d'excellents matériaux linguistiques. Le livre a autant d'intérêt que de valeur documentaire. Il plaît et il entraîne par le ton franc et direct » du récit. - L.

ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES

Séance du 15 mars 1903.

M. Babelon communique, au nom de M. Clermont-Ganneau, une lettre de M. Weber (Tripoli de Barbarie, 5 mai 1903) contenant le dessin et les estampages d'une colonnette de pierre calcaire, trouvée à Leptis Magna, et dont le fût est surmonté d'un chapiteau sculpté dans le même bloc. Sur la face antérieure de l'abaque est gravée une ligne de caractères romains; l'inscription se poursuit en deux autres lignes dans un cartouche formant la partie inférieure du chapiteau. M. ClermontGanneau croit lire (Mercurio) et Minervae | Animos(?) | summa fide.

M. Salomon-Reinach donne lecture du rapport de la commission du concours des Antiquités nationales, qui a décerné les médailles et les mentions de la manière suivante e médaille, M. l'abbé Angot, Dictionnaire historique de la Mayenne; 2o médaille, M. Gsell, Les monuments antiques de l'Algérie; 3o médaille, M. Espinas, Les finances de la commune de Douai, des origines aŭ xv siècle; 4° médaille, MM. Maître et Berthon, Itinéraire de Bretagne. Ire mention, M. l'abbé Dijon, L'église abbatiale de Saint-Antoine en Dauphiné; 2° mention, M. Labande, Etudes d'histoire et d'archéologie romane; 3e mention, M. Romanet, Géographie du Perche; 4 mention, M. Alliot, Visites archidiaconales de Josas; 5 mention, M. de Rochemonteix, Les églises romanes de la haute Auvergne; 6 mention, M. Pagart d'Hermansart, L'administration municipale de Saint-Omer; 7 mention, MM. de Gérin-Ricard et l'abbé Arnaud d'Agnel, Les antiquités de la Vallée-del'Arc; 8 mention, M. Portal, Histoire de la ville de Cordes; 9° mention, M. Porée, Le consulat et l'administration municipale de Mende.

Léon DOREZ.

Propriétaire-Gérant: ERNEST LEROUX.

Le Puy, Imprimerie Régis MARCHESSOU, boulevard Carnot, 23.

--

D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE

N° 22

--

– 1o juin

1903

[ocr errors]

DIELS, Les fragments des Présocratiques. FRAZER, Le rameau d'or, 1. DARESTE, Nouvelles études d'histoire du droit. SINGER, La somme de maître Rufin. CREIZENACH, Histoire du drame moderne, II. LEA, Les Morisques d'Espagne. FAZY, Genêve de 1597 à 1603. - DE CRUE, L'Escalade. - FUNCKBRENTANO, La Bastille des comédiens. ROLLER. Les tables ancestrales des margraves de Bade. - Loewenstern, Mémoires, I, p. M. H. Weil. PELLISSIER Précis de littérature française. Académie des Inscriptions.

[ocr errors]

Hermann DIELS: Die Fragmente der Vorsokratiker, Griechisch und Deutsch. Berlin, Weidmann, 1903. x-602 pages. Prix: 15 mk.

Cet ouvrage est destiné à servir avant tout d'instrument pour des leçons sur l'histoire de la philosophie. Si l'on veut comprendre à fond les idées et les systèmes, on doit suivre dans les textes le développement de la pensée grecque, in statu nascendi. Or un recueil qui donne seulement un choix de fragments, fera toujours l'impression de mettre à l'étroit, d'imposer comme une tutelle à ceux qui enseignent et à ceux qui sont enseignés. C'est pourquoi M. Diels s'est proposé de donner les fragments au complet, et il y a joint, en guise de commentaire doctrinal et historique, les renseignements biographiques et doxographiques essentiels. Pour la doxographie de chaque auteur, l'ordre à suivre était tout indiqué par l'exemple des Putzov ôóś×: de Théophraste Principes - Dieu — l'univers — le ciel - psychologie - physiologie.

[ocr errors]

La philosophie a été prise dans son extension la plus grande, à la façon antique. M. D. fait la monographie des présocratiques qui se sont occupés des sciences exactes; c'est ainsi que l'on trouve dans son recueil des mathématiciens, comme Enopide et Hippocrate de Chios, Théodore, etc. Quant à la médecine, eu égard à l'entreprise de M. Wellmann, on n'en a relevé que ce qui se rattache à la physiologie. Notamment, M. D. a réuni tout ce qu'on sait du médecin Démocédès, d'Ikkos de Tarente, et les quelques restes du canon de Polyclète. Autant que possible, chaque philosophe fait l'objet d'une notice. séparée. Il est rare que l'on trouve plusieurs noms réunis dans la

Nouvelle série LV.

22

même rubrique. Si le groupement par écoles est nécessaire à l'histoire proprement dite, on ne doit pas renoncer pour cela à considérer les individus isolément, les petits aussi bien que les grands, et ceux-là même dont le travail et l'intervention ne se font sentir que dans les grandes poussées de ce progrès merveilleux, auquel est due la philosophie du vi et surtout du ve siècle. Plus de quatre cents penseurs sont évoqués devant nous dans le cours du volume. Quatre-vingtquinze font l'objet d'une étude spéciale. Quand les écoles se sont perpétuées au-delà du ve siècle, la dizdo post-socratique n'a pas été exclue. C'est ainsi que la série des atomistes figure dans le recueil jusqu'à Anaxarque d'Abdère (340 environ). Enfin, dans un appendice d'une centaine de pages, on trouve I, la poésie cosmologique du vre siècle (Orphée Musée Épiménide; naturellement, dans la masse des fragments orphiques, M. D. n'a recueilli que ce qui est attesté par des témoignages anciens); — II, la poésie astronomique (Phokos, Cléostrate); III, la prose cosmologique (Phérécyde, Théagène, Acousilas); IV, la sophistique ancienne, depuis Protagoras jusqu'à Antiphon et Critias, avec l'anonyme de Jamblique (Protrept., c. 20) et, pour finir, les dissertations conservées sans titre dans les manuscrits de Sextus Empiricus - d'un sophiste de l'an 400 environ, qui traite du bien et du mal, du beau et du laid, du juste et de l'injuste, etc.

M. D. avait annoncé autrefois qu'il donnerait une édition critique de ses Présocratiques. Il a dû renoncer à ce projet. Il n'a pas voulu repasser par « le calvaire où il a dû se traîner, pendant la préparation des Poetae philosophi (voir Revue critique, no 21). Aussi longtemps que les éditeurs de Plutarque, de Galien, de Clément, de Diogène Laërce, d'Eusèbe, n'auront pas rempli leur devoir vis-à-vis de la science, qui les attend avec impatience, on ne pourra songer à faire un travail fructueux de ce côté. »

Si M. D. a cependant entrepris son œuvre, en renonçant d'avance à l'exactitude parfaite, c'est qu'il était « poussé par le désir de venir en aide aux jeunes philologues et aux jeunes philosophes, qui, d'une part, ne peuvent se contenter du choix arbitraire et restreint des recueils existants, et qui, d'autre part, n'ont pas l'énorme collection des monographies nécessaires pour l'étude des textes originaux ». Quant aux Fragmenta philosophorum graecorum de Mullach, leurs défauts scientifiques et pratiques les rendent vraiment inutilisables.

Quoi qu'en dise M. D., personne ne croira qu'il se soit contenté de faire une sorte de compilation à l'usage des débutants. Chaque philosophe, a été l'objet de recherches originales et extrêmement fructueuses. Pour Anaxagore, M. D. donne cinq fragments nouveaux sur vingtdeux; pour Diogène d'Apollonie, il y a un fragment nouveau sur dix; trois sur quatorze pour Hécatée d'Abdère; un sur douze pour Phérécyde; la reconstitution de la Théogonie d'Épiménide est complè

tement remaniée; M. D. attribue à ce poème, avec une extrême vraisemblance, quatorze fragments de plus que M. Kern. Et que d'auteurs ne trouve-t-on pas dans le volume, dont la monographie n'avait pas encore été faite ! Supposé qu'on ait sous la main la bibliothèque de brochures dont parle M. D., je me demande quand on pourrait se dispenser de recourir aux Vorsokratiker.

Afin de ne pas grossir démesurément le volume, M. D. a dů renoncer à justifier les leçons et la disposition qu'il adopte. Il y a des exceptions, et on les eût souhaitées plus fréquentes qu'elles ne le sont. Les sept lignes d'introduction aux fragments d'Épicharme, par exemple, peuvent être citées pour tout ce que M. D. a su entasser de science dans leur brièveté. Il nous annonce d'ailleurs un fascicule supplémentaire, qui servira comme d'appendice justificatif, et où l'on trouvera les tables (Sach-, Wort-, und Stellen register). Le volume des Vorsokratiker n'est en effet muni que d'un index des noms propres d'hommes.

Déjà dans son édition d'Héraclite (voir Revue critique, 1901, no 42), M. D. avait rangé les fragments d'après l'ordre alphabétique des auteurs qui les citent. Cette disposition fut plutôt désapprouvée. M. D. la maintient, mais il n'y recourt, cela va de soi, que là seulement où ni la tradition, ni le contenu des fragments n'indiquent l'ordre à suivre. A quoi sert de trouver çà et là dans la masse des aphorismes de Démocrite ou d'Héraclite un enchaînement d'idées réel ou supposé, alors que, vis-à-vis de presque tous, on reste perplexe à cet égard? Le classement d'après les sources a l'avantage de nous montrer réuni ce que la tradition nous a transmis réuni, et cela a son importance, quand il s'agit d'apprécier l'authenticité des fragments, ou bien la forme sous laquelle ils nous arrivent. De plus, vu la coutume des auteurs d'anthologies de mettre à la suite l'un de l'autre des passages qui étaient voisins dans l'original, on sera dans beaucoup de cas, si l'on adopte ce classement, plus près de l'ordre primitif qu'en distribuant les fragments d'après quelque reconstruction d'inspiration moderne. Pour la critique du texte aussi, cette disposition peut avoir son utilité. Souvent en effet, même quand les extraits viennent d'endroits différents, ils ont en commun quelque idée ou quelque expression caractéristique; toutes les anthologies, les plus anciennes comme les plus tardives, distribuaient les morceaux dans les chapitres d'après un mot saillant. Et, à l'appui de son système, M. D. cite une mauvaise correction de M. Natorp (phμas] voμar: Démocrite, fr. 280), que cet estimable savant n'aurait peut-être pas commise, s'il avait laissé ensemble les extraits provenant de la même source, et s'il s'était ménagé ainsi l'occasion de remarquer que, dans le fragment 280 comme dans le précédent, le mot xpus est essentiel.

Une traduction allemande, placée sous les textes, tient lieu d'un commentaire, et initie tout de suite au sens, M. D. a rendu par là à

« PreviousContinue »