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Si le peuple romain, si faible dans ses commencemens, augmenta sa puissance, ce ne fut qu'en profitant des divisions de ses voi

sins.

En un mot, c'est encore ici le lieu d'appliquer cette parole du divin Législateur: «< La maison qui sera divisée contre elle-même, tombera; et tout royaume divisé contre luiméme, sera détruit (a). »

Quelle déraison, quelle choquante absurdité, que de prétendre faire résulter la force et la prospérité des peuples, de la haine et de la division intérieure des citoyens (b)!

(a) Saint Luc, ch. x1, v. 17. — On peut encore lire à ce sujet FERGUSSON, de la Société civile, vol. I, ch. 19.

(b) Pourquoi ne rendrions-nous pas hommage ici aux observations judicieuses à plus d'un égard, qu'a faites récemment un écrivain qui s'est acquis par l'abondance et la facilité de sa plume une grande réputation?

« Quel est, dit-il, l'effet nécessaire de l'existence des partis dans un pays?

« De l'affaiblir au dedans et au dehors.

« Au dedans, dès que les partis se montrent, il n'y a plus d'attention et d'intérêt que pour eux; leurs membres ne sont plus occupés qu'à les faire prévaloir.

« Au dehors, la considération s'affaiblit et peut se perdre. On ne peut pas en conserver pour qui n'a qu'une

S II.

POPULATION ET ÉTENDUE DU TERRITOIRE.

SOMMAIRE. L'accroissement de la population est toujours favorable à un Etat qui encourage l'agriculture et l'industrie. L'étendue du territoire peut au contraire devenir une cause d'affaiblissement.

La nature elle-même semble avoir posé des barrières entre les peuples.

De quelle manière on doit parfois les suppléer.

1o Population.

« La richesse d'un État dépend principalement du
nombre de ses habitans. >>>

DE RÉAL

Ce qui constitue encore la force d'un État,

L'accroissement de la

po.

pulation est

c'est bien moins l'étendue du territoire que le toujours favo

force et une attention partagées. Au temps des guerres civiles d'Angleterre, cette nation se trouva effacée de la carte politique de l'Europe. Cromwell lui rendit momentanément son importance. Avec les partis la nullité recommença sous Charles II et Jacques II. La vie revint sous le roi Guillaume, avec l'unité dans l'État. La Pologne a péri par les dissensions civiles. Quand les partis eurent pris le chemin de Vienne, de Berlin et de Pétersbourg, la Pologne fut perdue. Divisez un État, il n'est plus rien.

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« Graces aux partis, la France ressemble à l'Angleterre des Stuart. Ceux qui travaillent à diviser leur pays doivent être considérés comme les ministres du courroux céleste à son égard. Eh! qui peut

rable à un État nombre de ses habitans. L'accroissement de la

qui encourage

l'agriculture et population ne peut jamais être nuisible, sur

l'industrie.

tout lorsque le sol est fertile; et lorsqu'il ne l'est pas, il est d'autant plus facile de le rendre productif, qu'il existe plus de bras pour le cultiver (a). (6)

Dans les pays même où le sol est plus particulièrement ingrat et de peu d'étendue, la

sans frémir se charger de ce rôle cruel! Le bonheur des partis est de s'accuser mutuellement, de se surprendre en fautes, de s'en prévaloir, de ne se rien passer; occupation bien faite pour dégrader l'esprit et pour flétrir le cœur. C'est un état de guerre dans lequel la calomnie forme l'arsenal. . . . .

<< On doit sans doute beaucoup de remerciemens à ceux qui, bannissant toute modération, cédant à leurs passions, ou bien, mus par des intérêts privés ou étrangers, nous ont plongés dans cet état; on l'a vu distinctement se former par le soin que l'on a mis pendant bien des années à ne parler que de partis, à traiter d'homme de parti tel homme qui n'a jamais su ce que c'était qu'un parti, à rechercher sans cesse si tout ne se faisait pas en vue de parti. On n'a eu que des idées de parti; on n'a pas cessé de parler de partis, et à force de répéter le mot, on a créé la chose.» (Petit Catéchisme sur l'état de la France, par M. de Pradt, ancien archevêque de Malines, ch. v pag. 122.)

(a) Voy. ci-dessus, chap. 1.

chasse, la pêche, la navigation, le commerce, les sciences, les arts, les métiers, l'industrie, peuvent en se perfectionnant suppléer à l'agriculture.

Les hommes de ces pays peuvent aussi voyager, parcourir les États voisins et les contrées les plus éloignées, s'enrichir chez les autres peuples par le commerce, l'industrie, et revenir jouir, même long-temps avant la vieillesse, au sein de leurs familles et de la mère-patrie, des fruits de leurs voyages, de leurs courses, de leurs économies, de leurs travaux (a). « Or, dit M. Say, la nation au sein

la

mer,

(a) C'est ainsi qu'en ont usé les habitans des cantons suisses, si l'on en excepte toutefois le canton de Soleure, et sur-tout le canton de Fribourg, où il n'existe aucun commerce, quoique cependant les rivières et les lacs de ce dernier canton aient une communication directe avec et que ses habitans pussent conséquemment s'y adonner facilement et y trouver un grand profit : ce qu'il faut attribuer, suivant John Adams, à la forme du gouvernement, qui est aristocratique ou oligarchique dans ces deux cantons (Voy. ci-après, seconde partie, vol. III, liv. 1, chap. Ir, tit. 1, § 2 et 3); en sorte que de tous les hommes auxquels il est permis d'aspirer aux emplois, nul ne doit être marchaud. « Ce qui fait, dit l'écrivain que

de laquelle rentre un de ses enfans, fait la meilleure de toutes les acquisitions: c'est pour elle une acquisition de population, une acquisition de profits industriels, et une acquisition de capitaux. Si l'expatrié ne rapporte que son industrie, ce sont toujours des profits industriels qui rentrent. Il est vrai qu'il rentre en même temps des moyens de consommation; mais en supposant ces derniers égaux aux profits, il n'y a point de perte de revenu, et il y a pour le pays augmentation de force morale et politique (a).»

D'autres fois les habitans des contrées circonscrites dans d'étroites frontières s'assemblent, comme les essaims des abeilles qui vont

nous venons de citer, que nul commerce ne peut s'y accréditer, si ce n'est celui de leur noble sang, en faveur des Souverains de l'Europe.»> En effet, proportion gardée, le canton de Fribourg a plus de troupes au service étranger qu'aucun autre canton. (Voy. ci-après l'appendice, liv. 11, n. 10.)

C'est ainsi qu'en usent chaque jour un grand nombre d'ouvriers, et sur-tout de tailleurs allemands, qui viennent, pendant plusieurs années de leur jeunesse, travailler à Paris et dans toutes les grandes villes de France.

(a) Traité d'Économie politiq., vol. II, liv. Iv, ch. xIx.

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