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permis de rompre les digues, de lever les écluses et d'inonder le pays, de tarir les eaux

des épidémies, des maladies graves et contagieuses, qui moissonnent et détruisent les plus nombreuses armées, plus rapidement encore que le fer et le feu de l'ennemi. L'intérêt même des vainqueurs (intérêt qu'un sentiment naturel de religion leur indique toujours assez) leur fait donc un devoir de rendre aux morts les honneurs de la sépulture, et même de permettre à l'ennemi d'enlever les siens. Aussi, les trêves et suspensions d'armes, conclues entre armées ennemies, pour s'acquitter réciproquement de ce devoir, sont-elles un usage immémorial et consacré dont l'histoire fait foi. Au temps de la guerre des Perses, les Grecs s'engagèrent par serment à ne pas abandonner leur général, et à ne pas laisser leurs morts sans sépulture. Ce soin chez eux était si grand, si religieux, que l'histoire remarque que, dans un combat qui se donna près de Corynthe, il y eut deux Athéniens qui ne furent pas ensevelis, parce qu'on n'avait pu les retrouver; et elle cite comme une calamité funeste, que, dans un autre combat qui se donna près de Syracuse, les Athéniens n'aient pu ensevelir leurs morts. On voit dans Xénophon des généraux punis de mort, quoique victorieux, pour n'avoir pas eu assez de soin des morts.

Enfin, les incendies considérables, l'embrasement des forêts, des villes et des villages, les détonations longues et réitérées des mines et de l'artillerie, produisent des secousses et des ébranlemens dans l'atmosphère, qui peuvent déranger son équilibre et ses lois, qui peuvent

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ou d'en détourner le cours, de même il est naturel et licite de mettre obstacle de toute autre manière, à ce que l'ennemi puisse se servir des sources. « Mais empoisonner les eaux et introduire la mort avec les fontaines publiques dans les places assiégées ou dans le camp ennemi, ce serait, dit encore M. de Réal, une barbarie à la vengeance de laquelle tout le genre humain serait intéressé.

« Les Amphictyons assiégeaient Cirrha. Une source abondante fournissait de l'eau à la ville par un aquéduc secret. Ils firent apporter d'Antycire une grande quantité d'ellébore,

troubler, appeler ou repousser le cours ordinaire et naturel des vents, qui peuvent amener des pluies longues et abondantes ou des sécheresses excessives ou des froids rigoureux, qui conséquemment aussi peuvent être la cause première et efficiente des années de disette et de stérilité: car tout se tient et se lie dans la nature, au physique comme au moral; et un premier choc, une révolution subite, un dérangement souvent peu apparent, et même insensible d'abord pour nous, entraîne après lui une suite continue et prolongée de plus grands dérangemens et de révolutions terribles. (Voy. à ce sujet l'hist. des vents par le chancelier BACON.) C'est ainsi que les élémens semblent s'animer, que la nature physique, sous l'in

et la mêlèrent dans cette eau. Les Cirrhéens en ayant bu, furent bientôt tourmentés de grandes douleurs d'entrailles. Tous demeurèrent malades et sans force; et c'est ainsi que les Amphyctions se rendirent maîtres de la ville. Cet événement, que deux auteurs (a) ont placé parmi les stratagêmes, devait simplement grossir la liste des plus grands crimes.

<< Les Celtes, faisant la guerre aux Autariates, mêlèrent dans leur pain et dans leur vin le suc de plantes vénéneuses, et, laissant ces provisions dans leurs tentes, feignirent de prendre la fuite pendant la nuit. Les Autariates, persuadés que la crainte seule les avait déterminés à décamper, se saisirent des tentes, et

fluence plus ou moins médiate et directe d'un Dieu universel, équitable, immortel et infini, s'arme elle-même pour punir le mal et venger l'innocence. C'est ainsi que peut clairement s'expliquer la destruction subite et miraculeuse de ces armées formidables dont parle l'écriture, destruction que les Hébreux et d'autres peuples purent sans superstition attribuer au glaive de l'ange exterminateur, obéissant lui-même à la voix d'un Dieu protecteur des peuples justes et équitables, et ennemi redoutable de l'injustice et de l'impiété.

(a) FRONTIN, Stratagémes; POLYEN, Ruses de guerre.

firent usage des vivres et du vin qu'ils trouvèrent. Bientôt les effets violens du poison se manifestèrent; les Celtes revinrent sur leurs pas, les trouvèrent pour la plupart couchés sur la terre, et les massacrèrent tous sans pitié.

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Jugurtha, Roi de Numidie, faisant la guerre aux Romains, empoisonnait les fon

taines.

« Le consul M. Aquilius, commandant une armée en Asie, dans le royaume de Pergame, au commencement du septième siècle de la fondation de Rome, fit périr plus de monde par ce moyen infâme, que par le fer (a).

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Enfin, on trouve encore dans l'antiquité, quelques autres exemples de cette atrocité; mais l'histoire moderne ne nous en fournit ancun, depuis que les sociétés ont été mieux policées, les mœurs plus douces, et les hommes plus éclairés » (b).

Règle générale. Il n'est nullement vrai,

(a) Peu de temps après, il fut condamné pour crime de concussion. (Voy. la continuation de l'histoire romaine, par CREVIER, tom. VIII, pag. 547.)

(6) Sc. du Gouvern., tom. v, chap. 11, sect. vI, § 5.

qu'en matière de Droit politique, toute action indistinctement, et quelle qu'elle soit, entreprise pour le service de son pays, soit légitime (a). Il est vrai de dire au contraire que celles que la morale réprouve sont généralement repoussées par la saine politique, nonseulement comme illégitimes, mais même comme très-nuisibles et très-préjudiciables à leurs auteurs.

En bonne politique, toutes les actions de la nature de celles dont il vient d'être question, sont de honteuses et dangereuses perfidies, des lâchetés indignes du cœur humain, que la politique proscrit et désavoue, et qui incontestablement n'appartiennent qu'à des peuples aussi féroces, aussi barbares qu'in

sensés.

Il convient sur-tout d'appliquer cette assertion à l'usage de toute espèce d'armes empoisonnées, que les actes de représailles pourraient d'ailleurs rendre extrêmement funestes à ceux-mêmes qui les premiers auraient l'inhumanité d'en faire usage. Un écrivain (b)

(a) Voy. JEAN-JACQUES, HELVÉTIUS, MACHIAVEL et autr. (b) BRECKTELIUS.

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