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relles représentant les principaux faits de notre histoire militaire de 1792 à 1839. Les plus belles sont celles de Bagetti, et cette collection est l'une des principales richesses du musée de Versailles.

2. COTÉ DE LA COUR

Les pièces du premier étage situées sur la cour comprennent les appartements particuliers du Roi, à droite et au centre, et celui de Mme de Maintenon, à gauche. Nous parlerons d'abord des appartements du Roi.

VIII

APPARTEMENTS PARTICULIERS DU ROI

Cabinet des Médailles ou des Raretés (137).

La première pièce des appartements particuliers du Roi était le cabinet des Médailles ou des Raretés, qui a été entièrement refait sous Louis XV. Félibien et les Comptes des Bâtiments nous permettent de rétablir le cabinet à peu près tel qu'il était sous Louis XIV.

Sa forme était celle d'un octogone plus long que large avec une coupole ovale. Il était couvert d'or, de glaces, de cristal et de peintures exécutées par Boulogne. L'entablement qui soutenait le plafond avait, dans sa frise, cinquante intervalles d'un pied de profondeur, tous remplis de vases d'agate et de filigranes d'or, que des glaces, dont les intervalles étaient revêtus, semblaient multiplier 2.

Vingt-quatre tableaux de Raphaël, Léonard de Vinci, André del Sarte, Mantègne, Van Dyck, Holbein, Paul Véronèse.

Comptes des Bâtiments, 1684.

2 FÉLIBIEN.

Claude Lorrain, Annibal Carrache, etc., étaient placés audessus des douze armoires ou cabinets renfermant les médailles et les pierres gravées, et sur les armoires on avait placé quatre statues antiques, huit statues d'argent et quantité de vases précieux. Beaucoup d'autres, en jade, en agate, en jaspe, en cornaline, en onyx, en calcédoine, en héliotrope, en améthyste, en prime d'émeraude, tous d'un travail exquis et de grandeur surprenante, étaient posés sur plus de cent consoles.

1

Si l'on regarde la nef du Roi sur le haut du chambranle de la cheminée, deux autres vases en forme de burettes qui l'accompagnent, et diverses figures d'or et d'argent, d'ambre et de corail, placées de côté et d'autre, on verra que tous ces ouvrages sont couverts de perles, de diamans, de rubis, d'émeraudes, de saphirs, de turquoises, de jacinthes, de grenats, d'opales et de topazes. La nef est toute d'or, du poids de 150 marcs, et ornée de sculptures et de ciselures excellentes.

Mais qui peut estimer le nombre et la beauté des camées et des pierres gravées tant en creux qu'en relief? Ces précieux monumens d'antiquité joints aux médailles, d'où le cabinet que nous décrivons prend son nom, font ensemble sa principale richesse. Une grande table remplie de tiroirs et faite en forme de bureau, placée au milieu de ce cabinet, ne suffit pas pour les contenir. C'est pourquoi dans les niches et dans les enfoncemens il y a douze armoires ou cabinets particuliers, qui ne s'élèvent qu'à hauteur d'appui. Ils sont dorés et enrichis d'ornemens, et ont de part et d'autre des figures d'enfans en forme de termes.

Plus de trois cens tiroirs ou tablettes contenus dans ces cabinets, dans le bureau et sous un lit de repos placé vis-à-vis la cheminée, servent à disposer par ordre toutes les médailles et les pierres gravées '.

A cette description nous ajouterons, d'après les Comptes des Bâtiments, que le parquet de marqueterie était l'œuvre de Poitou 3 3; que l'ébéniste Oppenord avait fait quatre

1

La nef était l'un des vases employés dans le service de la table du Roi ; sa forme était celle d'un navire supporté par des pieds représentant des lions. La nef contenait la serviette, la salière et les grands couteaux. 2 FÉLIBIEN.

3

Comptes de 1686. – L'ébéniste ou marqueteur Poitou avait fait pour la chambre de la Reine à Fontainebleau de très-beaux parquets à compartiments de cuivre et d'étain.

Oppenord était né à Gueldre; il fut naturalisé en 1679 (Nouvelles Archives de l'art français, 1873).

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que ces

cabinets de bois violet, et restauré les douze autres cabinets où l'on plaçait les médailles ; le grand bureau du cabinet des médailles était aussi son ouvrage1;que le fondeur Le Nerve avait fait les draperies de bronze doré pour les bustes à tête de porphyre qui ornaient le cabinet 2; bustes étaient placés sur des piédestaux d'ébène exécutés par Cucci 3; que le grand bureau fait par Oppenord avait été décoré par Le Nerve d'ornements en cuivre doré 1; — que l'orfèvre Besle avait enchâssé dans de l'or le sceau d'Auguste, l'une des plus belles pièces du cabinet. Nous savons enfin que les tables étaient l'ouvrage de Lepautre ".

Le cabinet des Médailles, une des principales richesses de la Bibliothèque nationale, remonte à François Ier. Ses successeurs augmentèrent la collection royale, qui était placée au Louvre et fut à peu près détruite pendant les guerres de religion. Henri IV le rétablit, grâce aux soins de M. de Bagarris, et le plaça à Fontainebleau. Louis XIV donna de tels développements au cabinet, qu'il peut à bon droit en être regardé comme le vrai fondateur. D'abord établi au Louvre, puis à la bibliothèque du Roi, le cabinet des Médailles fut transporté à Versailles par les soins de Louvois, qui venait de succéder à Colbert dans la charge de surintendant des Bâtiments (1684).

Rainsant, antiquaire distingué, en eut la garde et fut chargé de la nouvelle installation. Il s'en acquittait avec tant d'intelligence, que Louis XIV se plaisait à le voir arranger sa collection et à étudier avec lui les pièces les plus curieuses".

« Le Roi, dit l'abbé de Choisy, s'amusoit à voir ses médailles les après-dinées; et ce fut ce qui augmenta beaucoup le grand crédit du P. de la Chaise, son confesseur. Ce Père aimoit fort les médailles, et prétendoit s'y connoître.

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Elles sont gravées dans son œuvre.

7 DANGEAU, 1686, 2 et 21 mars, et LEPRINCE, Essar historique sur la biblio

thèque du Roi.

Il prit ce prétexte pour être presque toujours avec le Roi. » Le 7 juin 1689, Rainsant se promenant le long de la pièce d'eau des Suisses, s'y laissa tomber, on ne sait comment, et se noya. Ses successeurs furent Oudinet, Simon (1712) et de Boze (1719), qui transféra, en 1744, le cabinet à Paris, à la bibliothèque du Roi '.

En 1744, l'abbé Nollet, célèbre physicien, fit dans ce cabinet de nombreuses expériences de physique devant la famille royale.

La Reine a été ce matin, après la messe, dit le duc de Luynes 3, chez M. l'abbé Nollet, dans le cabinet des Médailles. Il y a déjà plusieurs jours que M. l'abbé Nollet a fini les leçons et expériences de physique qu'il est venu faire ici et qui avoient commencé ce carême.... En dernier lieu, M. l'abbé Nollet ayant fait voir à Madame une chambre noire où les objets se peignent sur une feuille de papier, Madame, après y avoir regardé, dit à M. l'abbé Nollet qu'il avoit oublié sa tabatière dans la chambre noire : c'étoit une tabatière d'or dont elle lui faisoit présent. M. l'abbé Nollet a eu 100 pistoles de pension sur la cassette de M. le Dauphin; il a eu outre cela 1000 écus de gratification.

« Ce cabinet, dit le duc de Luynes, qui est fort orné, s'appelle toujours le cabinet des Médailles, parce que c'étoit dans ce lieu qu'étoient les médailles et pierres gravées du Roi. On les a portées à Paris presques toutes depuis quelques années; il n'y a que les pierres gravées qui soient restées ici dans un des cabinets du Roi, en bas près de la Petite-Galerie 1. » — En 1746, l'abbé Nollet vint faire de nouvelles expériences sur l'électricité; cette fois il les fit dans la Grande-Galerie. Avec sa machine électrique et une chaîne de 440 personnes il mit le feu à de l'esprit de vin ".

Détruit par Louis XV, quand on refit toute cette partie du château et qu'on démolit l'escalier des Ambassadeurs, le cabinet des Médailles devint la salle actuelle. La nouvelle

DANGEAU.

' Ce charmant cabinet, peint par Boucher, Vanloo et Natoire, a été détruit, pendant le second empire, par l'architecte Labrouste. Qui donc arrê tera les destructions des architectes?

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pièce servit plus tard aux spectacles des petits cabinets et devint ensuite une antichambre de l'appartement de Madame Adélaïde. A la création du Musée, on y a placé les précieuses gouaches de Van Blarenberghe, exécutées sous Louis XVI et représentant les batailles et sièges du règne de Louis XV. Les présidents du Sénat, dans ces dernières années, avaient transformé cette salle en un office pour leurs diners et leurs soirées.

La Petite-Galerie (132, 133, 134).

La Petite-Galerie ne fut commencée qu'en 1685 et remplaça l'appartement que Mme de Montespan occupait au temps de sa faveur. Nous n'avons aucun détail sur cet appartement. Nous savons seulement par Dangeau que, le 5 décembre 1684, le Roi déclara qu'il prenait pour lui le logement de Mme de Montespan; qu'il le joignait à son petit appartement; qu'il avait choisi Mignard pour en peindre le salon et la galerie; et qu'il donnait à Mme de Montespan l'appartement des Bains au rez-de-chaussée. « Ce changement de logement, dit SaintSimon, fut le premier grand pas de sa disgrâce et de son éloignement. » Mme de Maintenon n'était pas Marie-Thérèse, et pour être reine de la main gauche, elle n'entendait pas que Louis XIV eût une maîtresse, même disgraciée, logée à côté de lui.

Avant de quitter l'appartement théâtre de sa faveur et de sa puissance, Mme de Montespan fit un splendide cadeau à Louis XIV, le 31 décembre 1684, le soir après souper. . C'étoit un livre relié d'or et plein de tableaux de miniature, représentant toutes les villes de Hollande que le Roi avoit prises en 4672. » — « Ce livre, nous dit Dangeau, lui coûte 4000 pistoles, à ce qu'elle nous dit. Racine et Despréaux en ont fait tous les discours et y ont joint un éloge historique de Sa Majesté. Ce sont les étrennes que Mme de Montespan donne au Roi. On ne sauroit rien voir de plus riche, de

1 Environ 250,000 francs d'aujourd'hui.

La pistole ou le louis valait en 1687 11 livres 5 sols; en 1689, 12 livres 10 sols (DANGEAU, II, 54; III, 39).

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