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instant peut détruire. Souvent ceux qui ont habité les palais en sont sortis les mains liées derrière le dos: les reines ont été vues pleurant comme de simples femmes, et l'on s'est étonné de quantité de larmes que contiennent les yeux des rois *.

M. le vicomte DE CHATEAUBRIAND.

* L'auteur a très-heureusement placé cette dernière phrase dans Atala, et nous sommes tentés de croire que, s'il a supprimé celle qui précède, c'est qu'il y fut contraint par la censure de Buonaparte. L'usurpateur, qui avait déjà établi son domicile dans la demeure de nos rois, et qui n'attendait qu'un moment favorable pour mettre la couronne sur sa tête, craignit sans doute que cette phrase ne blessât les régicides dont il était entouré. Il ne jugea pas d'ailleurs très-prudent de leur rappeler la facilité avec laquelle ils avaient conduit Louis xvi des Tuileries au Temple, et du Temple à l'échafaud,

LA PAUVRE FILLE.

ÉLÉGIE.

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J'ai fui ce pénible sommeil
Qu'aucun songe heureux n'accompagne,
J'ai devancé sur la montagne

Les premiers rayons du soleil.

S'éveillant avec la nature,

Le jeune oiseau chantait sur l'aubépine en fleurs,
Sa mère lui portait la douce nourriture,
Mes yeux se sont mouillés de pleurs.

Oh! pourquoi n'ai-je pas de mère ? Pourquoi ne suis-je pas semblable au jeune oiseau Dont le nid se balance aux branches de l'ormeau ? Rien ne m'appartient sur la terre,

Je n'eus pas même de berceau,

Et je suis un enfant trouvé sur une pierre,
Devant l'église du hameau.

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Loin de mes parens exilée,

De leurs embrassemens j'ignore la douceur,

Et les enfans de la vallée

Ne m'appellent jamais leur sœur! Je ne partage pas les jeux de la veillée

Jamais sous son toit de feuillée

;

Le joyeux laboureur ne m'invite à m'asseoir,
Et de loin je vois sa famille,

Autour du sarment qui pétille,
Chercher sur ses genoux les caresses du soir.

Vers la chapelle hospitalière

En pleurant j'adresse mes pas,
La seule demeure ici bas

Où je ne sois point étrangère,
La seule devant moi qui ne se ferme pas !

Souvent je contemple la pierre

Où commencèrent mes douleurs ;

J'y cherche la trace des pleurs,

Qu'en m'y laissant, peut-être y répandit ma mère.

Souvent aussi mes pas errans

Parcourent des tombeaux l'asile solitaire ;

Mais pour moi les tombeaux sont tous indifférens, La pauvre fille est sans parens

Au milieu des cercueils ainsi que sur la terre!

J'ai pleuré quatorze printemps
Loin des bras qui m'ont repoussée:
Reviens, ma mère, je t'attends
Sur la pierre où tu m'as laissée !

M. ALEX. SOUMET.

LA FEUILLE.

DE ta tige détachée,

Pauvre feuille desséchée,

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Où vas-tu? Je n'en sais rien.
L'orage a brisé le chêne

Qui seul était mon soutien.
De son inconstante haleine
Le zéphir ou l'aquilon
Depuis ce jour me promène
De la forêt à la plaine,
De la montagne au vallon.
Je vais où le vent me mène,
Sans me plaindre ou m'effrayer.
Je vais... où va toute chose,

Où va la feuille de rose

Et la feuille de laurier.

M. A. V. ARNAULT.

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