AU MÊME. A Paris, dimanche matin. Je ne mérite aucune des louanges dont vous m'honorez. Mon livre est rempli d'impertinences et de choses ridicules. Je vais cependant travailler à le rendre moins méprisable, puisque vous voulez bien m'aider à le refaire. Dès que vous m'aurez donné vos corrections, je mettrai la main à l'œuvre. J'avais le plus grand dégoût pour cet ouvrage; vos bontés réveillent mon amour-propre ; je sens vivement le prix de votre amitié. Je veux du moins faire tout ce qui dépend de moi pour la mériter. J'ai dit à M. Marmontel ce que vous me chargez de lui dire. J'attends impatiemment votre retour, et vous remercie tendrement. VAUVENARGUES. AU MÊME. A Paris, lundi matin. Vous me soutenez, mon cher maître, contre l'extrême découragement que m'inspire le sentiment de mes défauts. Je vous suis sensiblement obligé d'avoir lu sitôt mes réflexions. Si vous êtes chez vous ce soir, ou demain ou après demain, j'irai vous remercier. Je n'ai pas répondu hier à votre lettre, parce que celui qui l'a apportée l'a laissée chez le portier, et s'en était allé avant qu'on me la rendît. Je vous écrirais et je vous verrais tous les jours de ma vie, si vous n'étiez pas responsable au monde de la vôtre. Ce qui a fait que je vous ai si peu parlé de votre tragédie, c'est que mes yeux souffraient extrêmement lorsque je l'ai lue, et que j'en aurais mal jugé après une lecture si mal faite. Elle m'a paru pleine de beautés sublimes. Vos ennemis répandent dans le monde qu'il n'y a que votre premier acte qui soit supportable, et que le reste est mal conduit et mal écrit. On n'a jamais été si horriblement déchaîné contre vous, qu'on l'est depuis, quatre mois. Vous devez vous attendre que la plupart des gens de lettres de Paris feront les derniers efforts pour faire tomber votre pièce. Le succès médiocre de la princesse de Navarre et du Temple de la Gloire, leur font déjà dire que vous n'avez plus de génie. Je suis si choqué de ces impertinences, qu'elles me dégoûtent non-seulement des gens de lettres, mais des lettres mêmes. Je vous conjure, mon cher maître, de polir si bien votre ouvrage, qu'il ne reste à l'envie aucun prétexte pour l'attaquer. Je m'intéresse tendrement à votre gloire, et j'espère que vous pardonnerez au zèle de l'amitié ce conseil, dont vous n'avez pas besoin. VAUVENARGUES. A M. AMELOT, Secrétaire d'Etat pour les Affaires étrangères. MONSEIGNEUR, Je suis sensiblement touché que la lettre que j'ai eu l'honneur de vous écrire et celle que j'ai pris la liberté de vous adresser pour le roi, n'aient pu attirer votre attention. Il n'est pas surprenant, peut-être, qu'un ministre si occupé, ne trouve pas le temps d'examiner de pareilles lettres; mais, monseigneur, me permettrez-vous de vous dire que c'est cette impossibilité morale où se trouve un gentilhomme qui n'a que du zèle de parvenir jusqu'à son maître, qui fait le découragement que l'on remarque dans la noblesse des provinces, et qui éteint toute émulation? J'ai passé, monseigneur, toute ma jeunesse loin des distractions du monde, pour tâcher de me rendre capable des emplois où j'ai cru que mon caractère m'appelait; et j'osais penser qu'une volonté si laborieuse me mettrait du moins au niveau de ceux qui attendent toute leur fortune de leurs intrigues et de leurs plaisirs. Je suis pénétré, monseigneur, qu'une confiance que j'avais principalement fondée sur l'amour de mon devoir se trouve entièrement déçue. Ma santé ne me permettant plus de continuer mes services à la guerre, je viens d'écrire à M. le duc de Biron pour le prier de nommer à mon emploi. Je n'ai pu dans une situation si malheureuse me refuser à vous faire connaître mon désespoir. Pardonnez-moi, monseigneur, s'il me dicte quelque expression qui ne soit pas assez mesurée. Je suis etc., etc. FIN. Sur le Caractère des différens siècles. FRAGMENT sur les effets de l'art et du savoir, et sur la prévention que nous avons pour notre siècle et contre l'antiquité. 103 214 FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES. DES MATIÈRES. A. ABUS inévitables, 106. 81. ACOMAT, peint par Racine, 64. Dis- cours mal placé dans sa bouche, 65. Bien caractérisé par Racine, 68. Qui l'a représenté comme l'histoire, 71. Voltaire ne l'a point critiqué, ACTION; nulle jouissance sans elle, 42. Tout vit par elle, 116. L'homme n'aime qu'elle, ibid. Nos actions ne sont ni si bonnes, ni si vicieuses ACTIONS ( des hommes); toutes né- ADMIRATION; ce que c'est, 30. Mar- ADRESSE; ne domine jamais seule, 110. ADVERSITÉ; ce qu'elle fait, 136. AFFECTATION; sa définition, 38. AFFLICTIONS, sont rarement longues, AGRIPPINE; Racine la fait parler à Néron avec dignité, 66. Il trace heureusement son caractère, 69. Noble simplicité du discours d'A- bien caractérisé par Ra- AIMABLE; ce qui l'est est rarement ALCIPE, a l'esprit plus pénétrant que cine le sujet d'une tragédie, 71. diculement blâmé par J. B. Rous- ALZIRE, tragédie de Voltaire, 79. AMBITIEUX; combien il dévore d'af- AMBITION (de l'), 20. Elle exile les plaisirs de la jeunesse, 106. Les malheurs des autres ne nous en dé- AME; c'est d'elle que dépend l'éten- confond souvent les qualités de l'âme et celles de l'esprit, ibid. L'âme et l'esprit se modifient mutuellement 21. Difficultés de vaincre les défauts de l'âme, 31. De l'âme, 44. Com- ment on juge de l'âme, 113. Où est sa force? ibid. Des âmes médiocres, 121. Comment notre âme influe sur AMELOT; lettre que Vauvenargues lui AMI; comment on a des amis fidèles, 56. Injustice des amis, 57. On ne veut pas qu'ils voient nos défauts, 115. Notre ingratitude envers eux AMOUR (de l'), 26. Sentimens mêlés d'amour ou de haine, 28. L'amour n'est pas si délicat que l'amour- propre, 145. De la gloire, 21. De nous-mêmes, Il ne doit pas être confondu avec l'amour-propre, 127. Des bêtes, 25. Des objets sensibles, 30. Des sciences et des lettres, 22. Du monde 21. Filial, 24. Pater- nel, ibid. Propre, 19. Il aveugle l'esprit, ibid. Il n'est pas toujours AMUSER (S'); l'esprit d'autrui n'amuse pas long-temps, 111. Quand on ne sait pas s'amuser, on veut amuser ANDROMAQUE, tragédie de Racine, ANIMAUX; goût que l'on a pour eux, 25. Il n'est pas étonnant que nous les croyions faits pour nous, 115. ANNIBAL; jugement de J. B. Rous- seau sur lui, 75. Injustice de ce ju- pas nous surprendre, 130. Sur la prévention que nous avons contre ANTOINE, 69. ART; il est nécessaire aux talens, 23. Arts; leur utilité, 22. Leur inutilité, ATHALIDE, |