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Les anatomistes lui reconnaissent généralement six faces. Mais deux seulement ont une existence réelle et méritent seules de fixer notre attention, ce sont :

1° La face antérieure, dite basilaire, parce qu'elle repose sur la gouttière de ce nom. Elle est convexe et offre sur la ligne médiane un large sillon antéro-postérieur qui sert à loger l'artère basilaire. La présence de ce vaisseau en ce point a de l'importance au point de vue de la pathologie. De chaque côté de ce sillon la face antérieure est comme soulevée par deux saillies que forment les pyramides antérieures du bulbe en passant dans l'épaisseur de l'organe. Au delà, cette face s'abaisse et se rétrécit pour se fusionner avec les pédoncules cérébelleux moyens proprement dits. L'œil distingue parfaitement que la partie superficielle de cette face est formée par des fibres blanches transversales qui se rendent d'un lobe cérébelleux à l'autre. D'où le nom de pont de Varole donné à cette couche superficielle. Il semble que les pyramides passent sous cette couche comme l'eau d'une rivière sous un pont. C'est chez l'homme que ce pont de Varole offre le plus d'épaisseur.

2° La face postérieure qui se continue sans ligne de démarcation avec la face postérieure du bulbe et forme avec cette dernière le plancher du 4o ventricule. Elle présente sur la ligne médiane un sillon qui se continue en haut avec l'aqueduc de Sylvius, et en bas avec le sillon médian postérieur du bulbe. Dans la disposition naturelle des choses, elle est masquée par les parties qui concourent à former le plafond du 4o ventricule. Aussi ne l'aperçoit-on bien qu'après avoir enlevé le cervelet, avoir incisé longitudinalement la valvule de Vieussens, et avoir écarté les processus cerebelli ad testes ou pédoncules cérébelleux supérieurs. Cette disposition vous fait déjà entrevoir combien il est difficile pour l'expérimentateur d'isoler les faits qui appartiennent en propre à la protubérance de ceux qui relèvent de ces diverses parties, et comment les maladies qui siégent dans la portion postérieure de la protubérance se compliquent si souvent de symptômes qui dépendent des processus et des tubercules quadrijumeaux que ceux-ci supportent.

Quant aux faces latérales, elles n'existent réellement pas, puisque sur les côtés la protubérance se perd avec les pédoncules cérébelleux moyens. Il en est de même de la face inférieure, puisqu'elle n'est, pour ainsi dire, que la porte par laquelle s'engage le bulbe. Il en est de même aussi de la face supérieure, puisqu'elle n'est que la porte

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par où sortent les deux pédoncules cérébraux qui se rendent au

cerveau.

Les faits d'anatomie descriptive n'avaient pour nous qu'un intérêt de langage conventionnel. Il n'en est plus de même des détails de structure, car ils sont une des bases de la physiologie normale et de l'anatomie pathologique.

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A, pont de Varole. B, points représentant la section des fibres longitudinales des pyramides. C, série de plans des fibres des pédoncules cérébelleux moyens séparés par le passage des pyramides. D, grosse racine du trijumeau. E, petite racine. F, substance grise centrale. G, plancher du 4e ventricule.

Si on fait une coupe transversale de la protubérance, on reconnaît de suite que le pont de Varole ne représente qu'un seul des plans de fibres qui semblent se rendre d'un lobe cérébelleux à l'autre ; qu'au delà se trouvent d'autres couches de fibres transversales plus ou moins écartées les unes des autres, c'est-à-dire que les pédoncules cérébelleux moyens, pour traverser la protubérance, ne restent pas réunis en faisceaux. Ils s'épanouissent dans son épaisseur, en donnant naissance à des lacunes ou des mailles qui sont comblées par de la substance grise disséminée. Dans ces mailles et au sein de cette substance grise, passent des fibres longitudinales qui font suite aux fibres des pyramides antérieures, et qui, sur cette coupe transversale, ne peuvent se traduire que par un pointillé. Autrement dit, les pyramides antérieures et les pédoncules cérébelleux moyens, qui sont réunis en faisceaux compactes jusqu'à leur arrivée dans la protubérance, se mettent à se dissocier, à s'éparpiller; et comme ils ont des directions différentes, ils se croisent, s'enchevêtrent entre eux, constituent ainsi un lacis dont les vides sont comblés par de la substance grise qui forme, pour ainsi dire, le milieu, l'atmosphère dans

laquelle ces fibres s'éparpillent; ou plutôt c'est l'existence de cette substance grise qui force les fibres de ces deux ordres de faisceaux à s'écarter, et qui donne à la protubérance une individualité réelle, puisque cette substance lui est propre et n'appartient pas aux cordons qui s'entre-croisent en ce point.

Généralement on admet que les fibres transversales, celles des pédoncules cérébelleux moyens, sont continues et s'étendent d'un lobe cérébelleux à l'autre sans qu'aucune ne contracte d'anastomose avec les cellules de la substance grise de la protubérance qu'elles ne font que traverser. D'après Luys, il n'en serait pas du tout ainsi, les fibres des pédoncules cérébelleux moyens s'étendraient d'une cellule du cervelet à une cellule de la protubérance, de sorte que ces cordons transversaux réuniraient, non pas les deux lobes cérébelleux entre eux, mais bien ces deux lobes à la protubérance. De plus, ces fibres s'entre-croiseraient entre elles, de telle façon que le pédoncule gauche relierait le lobe gauche du cervelet à la moitié droite de la protubérance, et réciproquement le pédoncule droit, le lobe droit à la moitié gauche de la protubérance. La possibilité, je dirai même la probabilité de cette disposition, donne évidemment une plus grande importance à la protubérance, et peut jeter un grand jour sur le mécanisme physiologique et pathologique de cet organe. C'est pourquoi il importait de la signaler.

Au-dessus des divers plans formés par les pédoncules cérébelleux se trouve, de chaque côté de la ligne médiane, un amas considérable de substance grise. Ces deux amas constituent ce qu'on est convenu d'appeler la substance grise centrale. C'est la continuation de la colonne grise centrale de la moelle et du bulbe. Au delà reparaissent des fibres longitudinales formant, comme les pyramides, un faisceau éparpillé au sein d'un terrain de substance grise. C'est, à la partie postérieure, le pendant des pyramides. Classiquement, on regarde ces nouveaux faisceaux comme le prolongement à travers la protubérance des cordons intermédiaires du bulbe, et ils prennent ici le nom de faisceaux innominés ou de renforcement. D'après Stilling et Schroeder, il y aurait là une colonne dont les cellules recevraient les fibres des faisceaux latéraux du bulbe qui n'iraient pas plus loin. Ces mêmes cellules donneraient naissance à de nouvelles fibres qui se rendraient dans les corps striés et les couches optiques à travers les pédoncules cérébraux. Quoi qu'il en soit, il est certain qu'il y a dans la protubérance des fibres plus ou moins obliques qui

lui appartiennent en propre et qui ne dépendent ni des pédoncules cérébelleux, ni du bulbe. Enfin, la partie superficielle de la face postérieure de la protubérance est formée, comme celle du bulbe, par de la substance grise qui constitue le plancher du 4e ventricule.

Si, à l'aide d'un grossissement plus considérable, on cherche à déterminer les caractères des éléments cellulaires de la substance grise de la protubérance, on constate qu'ils ont pour cachet de renfermer, comme ceux du bulbe, beaucoup plus de pigment jaune, et que le plus grand nombre d'entre eux offrent la forme et les dimensions de cellules sensitives. En voyant des cellules en général assez petites, on a prétendu qu'il n'y avait dans la protubérance que des cellules sensitives et pas de cellules motrices. Mais il ne faut pas s'attendre à trouver dans toutes les parties motrices de l'axe, des cellules aussi volumineuses que celles des cornes antérieures. Plus une cellule est chargée d'un rôle purement mécanique, plus elle est volumineuse; plus l'acte qu'elle produit tend à revêtir un caractère psychique, plus elle est petite. Or, un mouvement commence par un acte intellectuel; la volonté qui veut le mouvement, le commande. C'est l'œuvre des petites cellules corticales. L'ébranlement né à la périphérie des lobes cérébraux, a besoin, pour arriver à donner naissance à une force mécanique capable de déplacer les leviers osseux, de se transformer graduellement, de se matérialiser de plus en plus en se multipliant comme force mécanique. Il a besoin de passer par des cellules de moins en moins spirituelles et de plus en plus matérielles et massives. Or, la protubérance se trouvant à la partie moyenne de ce trajet, ne devait pas avoir des cellules aussi fines que celles des couches intellectuelles du cerveau, ni des cellules aussi grosses que celles de la moelle. De même pour les cellules sensitives. L'impression extérieure va en se modifiant, en se spiritualisant, de la périphérie au centre, et doit rencontrer sur son passage des cellules de plus en plus petites.

Fig. 34.

Spécimen des diverses cellules qu'on peut rencontrer dans la protubérance,

Une question anatomique importante, à notre point de vue spécial, est celle des nerfs qui prennent naissance dans le centre que l'on considère; car c'est par les nerfs qu'ils fournissent que les centres nerveux peuvent retentir sur des organes plus ou moins éloignés. C'est par l'intermédiaire de ces nerfs qu'ils président à telle ou telle fonction et qu'ils peuvent, dans l'état pathologique, troubler ces fonctions. Sous ce rapport, la protubérance est beaucoup moins bien partagée que le bulbe, que nous avons vu fournir un grand nombre de nerfs dirigeant des fonctions presque toutes indispensables à la vie. Un seul nerf semble prendre franchement son noyau d'origine dans la protubérance, c'est le trijumeau qui présente, comme vous savez, deux racines, l'une grosse, incontestablement sensitive, et l'autre petite, incontestablement motrice. Toutes deux émanent de points différents de la substance grise centrale, et viennent émerger de la face basilaire à des points distincts, mais rapprochés. Il y a, relativement à ces origines réelles, des interprétations de détail que nous pouvons négliger pour nos besoins actuels.

Il est un nerf dont l'origine est située sur la frontière du bulbe et de la protubérance, que nous avons déjà vu, pour cette raison, figurer dans la physiologie et la pathologie bulbaires, et que nous verrons jouer un rôle plus important encore dans les maladies de la protubérance; car sa présence là donnera un cachet tout à fait pathognomonique aux paralysies dues à cet organe. Ce nerf, c'est le facial. Non-seulement par le fait même de son voisinage, son noyau peut être compromis par les dégénérescences de la protubérance, mais comme les muscles faciaux sont destinés à traduire nos sentiments, la petite masse de substance grise qui alimente leurs mouvements a besoin d'être reliée au centre intellectuel et moral par des fibres qui traversent forcément la protubérance, aux destinées morbides de laquelle elles se trouvent ainsi enchaînées. Ces fibres sont au noyau du facial ce que les fibres dites encéphaliques des cordons antérolatéraux de la moelle sont aux cellules des cornes antérieures, et les maladies de la protubérance peuvent entraver les mouvements des muscles de la face au même titre que les maladies des cordons antéro-latéraux viennent compromettre les mouvements volontaires des muscles du corps.

Un nerf qui n'appartient pas non plus en propre à la protubérance, mais au pédoncule cérébral, qui cependant la touche d'assez près pour être mis en jeu dans ses maladies et même dans ses vivisec

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