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lui que je voudrois. Nous n'avons eu ensemble aucune converfation, & fa bouche ne m'a point déclaré la paffion qu'il a pour moi; mais, dans tous les lieux où il m'a pû voir, fes regards & fes actions m'ont toujours parlé fi tendrement, & la demande qu'il a fait faire de moi m'a paru d'un fi honnête homme, , que mon cœur n'a pû s'empêcher d'être fenfible à fes ardeurs ; &, cependant, tu vois où la dureté de mon pere réduit toute cette tendreffe.

LISETTE.

Allez, laiffez-moi, faire. Quelque fujet que j'aye de me plaindre de vous du fecret que vous m'avez fait, je ne veux pas laiffer de fervir votre amour, pourvû que vous ayez affez de résolution...

LUCIND Ė.

&

Mais que veux-tu que je faffe contre l'autorité d'un pere ? Et, s'il eft inexorable à mes vœux, LISETTE.

Allez, allez, il ne faut pas fe laiffer mener comme un oifon ; &, pourvû que l'honneur n'y foit pas of fenfé, on fe peut libérer un peu de la tyrannie d'un pere. Que prétend-il que vous faffiez ? N'étes-vous pas en âge d'être mariée, & croit-il que vous soyez de marbre? Allez, encore un coup, je veux fervir votre paffion, je prens dès-à-préfent fur moi tout le foin de fes intérêts, & vous verrez que je fais des détours... Mais je vois votre pere. Rentrons, & me laiffez agir,

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SCENE V.

SGANARELLE feul.

L eft bon quelquefois de ne point faire femblant d'entendre les chofes qu'on n'entend que trop bien ; & j'ai fait fagement, de parer la déclaration d'un defir que je ne fuis pas réfolu de contenter. At'on jamais rien vû de plus tyrannique que cette coûtume où l'on veut aflujettir les peres ? Rien de plus impertinent, & de plus ridicule, que d'amaffer du bien avec de grands travaux & élever une fille avec beaucoup de foin & de tendreffe, pour se dépouiller de l'un & de l'autre entre les mains d'un homme qui ne nous touche de rien? Non, non, je me moque de cet usage; & je veux garder mon bien & ma fille pour moi.

SCENE V I.

SGANARELLE, LISETTE.

LISETTE courant fur le théatre, & feignant de ne pas voir Sganarelle.

A

H, malheur! Ah, difgrace! Ah, pauvre Seigneur Sganarelle, où pourrai-je te rencontrer? SGANARELLE à part.

Que dit-elle là ?

LISETTE courant toujours.

Ah! Miferable pere, que feras-tu, quand tu fauras

cette nouvelle ?

SGANARELLE

SGANARELLE à part.

Què fera-ce?

LISETTE.

Ma pauvre maîtreffe !

SGANARELLE à pars.

Je fuis perdu.

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LISETTE.

Monfieur, ne pleurez donc point comme cela, car vous me feriez rire.

Dis-donc vite.

SGANARELLE.

LISETTE.

Votre fille, toute faifie des paroles que vous lui avez dites, & de la colére effroyable où elle vous a vû contr'elle, est montée vîte dans fa chambre, &, pleine de défespoir, a ouvert la fenêtre qui regarde fur la riviére.

Hé bien ?

SGANARELLE.

LISETTE.

Alors, levant les yeux au ciel, non, a-t'elle dit, il m'eft impoffible de vivre avec le courroux de mon pere ; & puifqu'il me renonce pour sa fille, je veux mourir,

SGANARELLE,

Elle s'eft jettée ?

LISETTE.

Non, Monfieur. Elle a fermé tout doucement la fes nêtre, & s'est allée mettre fur le lit. Là, elle s'est prise à pleurer amérement ; &, tout d'un coup, fon visage a pâli, fes yeux fe font tournés, le cœur lui a manqué, & elle eft demeurée entre mes bras.

SGANARELLE. Ah, ma fille! Elle eft morte?

LISETTE.

Non, Monfieur, A force de la tourmenter, je l'ai fait revenir; mais cela lui reprend de moment en moż ment, & je crois qu'elle ne paffera pas la journée. SGANARELLE. Champagne, Champagne, Champagne,

SCENE VII.

SGANARELLE, CHAMPAGNE,

LISETTE.

SGANARELLE.

Vstande. On n'en peut trop avoir dans une pa

Ite, qu'on m'aille querir des médecins, & en

reille aventure. Ah, ma fille ! Ma pauvre fille !

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L

SCENE. VIII.

PREMIERE ENTRE' E.

Hampagne valet de Sganarelle, frappe, en danfant, aux portes de quatre médecins.

SCENE IX.

Es quatre médecins danfent, & entrens avec céré monie chez Sganarelle.

Fin du premier alte;

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