Lors que l'on fait l'amour on veut toujours le voir,
Et l'on aime bien plus par choix que par devoir.
Le legitime enfin ne fait point mon affaire,
Et le nom de mari ne peut me fatisfaire:
J'eftime cent fois mieux vivre fur le commun,
Que m'aller enroler fous un joug importun.
Au moins l'on peut quitter alors que bon nous femble;
Et l'on n'eft pas contraint de demeurer ensemble,
L'on n'a pas ces contracts qui peuvent engager,
Et fi l'on n'eft pas bien, l'on peut au moins changer.
A-t-on quelque defáut, on fait tout fon poffible,
Lors que l'on fait l'amour, pour le rendre invisible,
Mais eft-on marié, on ne fe contraint plus,
Et tous ces petits foins paffent pour des abus.
On devient negligé dés la premiere année.
C'eft une belle fleur qui s'eft bientoft fanée.
Tous ces ajustemens ne faifoient pas un pli,
Et rendoient en un mot un galant accompli.
Il ne lavoit fes mains qu'avecque de l'eau d'Ange,
Sa perruque & fes gans n'étoient que fleur d'Orange,
Et celuy qui n'étoit que Civette & qu'Iris,
Sent maintenant le bouc, au lieu de l'ambre gris;
Il femble avoir toûjours mille procez en tête,
Et ce galant efprit eft devenu tout bête;
Il eft toûjours chagrin & ne dit pas un mot,
Depuis qu'il a pris femme il eft devenu fot;
Auffi quand on en prend on court rifque de l'être:
L'Epoux en ce cas-là n'eft pas toujours le maître.
Son pouvoir ne fçauroit éviter ce malheur;
Si l'on ne m'en croit pas, qu'on voye le Vaffeur.
Je le puis bien citer, la chofe eft fort publique,
On fçait qu'il eft cocu par arreft authentique.
Damis eft comme luy, Colin l'eft en fecret.
Si je les contois tous, je n'aurois jamais fait;
Il faudroit remonter jufques au premier homme,
Sçavoir fi le ferpent ne le trompa qu'en pomme;
Peut-être le fut-il, du moins s'il ne le fut,
Il eftoit tres facile, & fort peu s'en falut ;