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Ch. XI.

pag.ss.

Ibid.

Ch.XII. pag. 57.

pour frapper, eft appellé proprement oratio vehemens, & l'autre qui eft pour adoucir, oratio lenis.

Et j'en donnerois des exemples, fi Ammonius n'en avoit deja rapporté plufieurs.] Le Grec dit, Si Ammonius n'en avoit rapporte de finguliers Tà in ads, comme Monfieur le Févre a corrigé.

En effet, jamais à mon avis.] Il me semble que cette periode n'exprime pas toutes les beautez de l'original, & qu'elle s'éloigne de l'idée de Longin, qui dit : En effer Platon femble n'avoir entaffé de fi grandes chofes dans fes traitez de Philofophie, ne s'eftre jette fi fouvent dans des expreffions, dans des matieres poëtiques, que pour disputer de toute fa force le prix à Homere, comme un nouvel athlete à celuy qui a déja receu toutes les acclamations, qui a efté l'admiration de tout le monde. Cela conferve l'image que Longin a voulu donner des combats des Athletes,& c'eft cette image qui fait la plus grande beauté de ce paffage.

En effet nous ne croirons pas avoir un me diocre prix à difputer.] Le mot Grec

C a ne fignifie point ici à mon avis prix, mais Spectacle. Longin dit, En effet de nous figurer que nous allons rendre compte de nos écrits devant un fi celebre tribunal, & fur un Theatre où nous avons de tels Heros pour juges ou pour témoins ce fera un spectacle bien propre à nous animer. Thucydide s'eft fervi plus d'une fois de ce mot dans le mesme sens. Je ne rapporteray que ce paffage du Livre VI I. Ο γ Γύλιππο καλὸν τὸ ἀγώνι (μα ἐνόμιζεν οἱ εἶναι ἐπὶ τοῖς ἄλλοις ἢ τῆς ἀντιερατήγεις κομίσαι Λακεδαιμονίοις. Gylippe eftimort que ce feroit un spectacle bien glorieux pour luy, de me

ner

ner comme en triomphe les deux Generaux des ennemis qu'il avoit pris dans le combat. Il parle de Nicias & de Demofthene chefs des Atheniens.

Car fi un homme dans la défiance de ce lbid. jugement a peur pour ainfi dire d'avoir dit quelque chofe qui vive plus que luy, &c.] A mon avis aucun Interprete n'est entré ici dans le fens de Longin, qui n'a jamais eu cette pensée qu'un homme dans la défiance de ce jugement pourra avoir peur d'avoir dit quelque chofe qui vive plus que luy, ni même qu'il ne fe donnera pas la peine d'achever fes ouvrages: au contraire il veut faire entendre que cette crainte ou ce découragement le mettra en eftat de ne pouvoir rien faire de beau, ni qui lui furvive, quand il travailleroit fans ceffe & qu'il feroit les plus grands efforts; car fi un homme, dit-il, aprés avoir envisagé ce jugement, tombe d'abord dans la crainte de ne pouvoir rien produire qui luy Survive, il eft impoffible que les conceptions de fon efprit ne foient aveugles imparfaites;

qu'elles n'avortent, pour ainfi dire, fans pouvoir jamais parvenir à la derniere pofterité.. Un homme qui écrit doit avoir une noble hardieffe, ne fe contenter pas d'écrire pour fon fiecle, mais envifager toute la pofterité. Cette idée luy élevera l'ame & animera fes conceptions, au lieu que fi dés le moment que cette pofterité fe prefentera à fon efprit il tombe dans la crainte de ne pouvoir rien faire qui foit digne d'elle, ce découragement & ce defefpoir luy feront perdre toute fa force, & quelque peine qu'il fe donne, fes écrits ne feront jamais que des avortons. C'eft manifeftement la doctrine de

Lon

Ch. XIII.

Longin, qui n'a garde pourtant d'autorifer pat là une confiance aveugle & temeraire, commo il feroit facile de le prouver.

Prend garde qu'une ardeur trop funeste à ta pag-so. vie. Je trouve quelque chofe de noble & de beau dans le tour de ces quatre vers, il me semble pourtant, que lors que le Soleil dit, au deffus de la Libye, le fillon n'eftant point arrose d'eau, n'a jamau rajraichi mon char, il parle plûtost comme un homme qui pouffe fon char à travers champs, que comme un Dieu qui éclaire la terre.Monsieur D***a suivi ici tous les autres Interpretes qui ont expliqué ce paffage de la même maniere; mais je croi qu'ils fe font fort éloignez de la penfée d'Euripide qui dit: Marche ne te laisse point emporter dans l'air de Libye,qui n'aiant aucun mélange d'humidite laiffera tomber ton char. C'eftoit l'opinion des Anciens qu'un mélange humide fait la force & la folidité de l'air. Mais ce n'eft pas icy le lieu de parler de leurs Principes de Phyfique.

Pag.61.

Le Palais en fureur mugit à fon afpect.] Le mot mugir ne me paroift pas affez fort pour exprimer feul le ὠθεσιῶν & le βακxen d'Efchyle. Car ils ne fignifient pas feulement mugir, mais fe remuer avec agitation, avec violence. Quoique ce foit une folie de vouloir faire un vers aprés Monfieur D***, je ne laifferai pas de dire que celui *Dans le d'Efchyle feroit peut-être mieux de cette maniere pour le fens.

Penthée.

Du Palais en fureur les combles ébranlės
Tremblent en mugissant.

* Dans les Et celuy * d'Euripide:

Bacchan

tes. pag.

62.

La Montagne s'ébranle, répond à leurs cris.
Les images dans la Poefie font pleines ordinai-

rement

rement d'accidens fabuleux. ] C'est le fens que tous les Interpretes ont donné à ce paffage; mais je ne croi pas que ç'ait efté la penfée de Longin; car il n'eft pas vrai que dans la poëfie les images foient ordinairement pleines d'accidens, elles n'ont en cela rien qui ne leur foit commun avec les images de la Rhetorique. Longin dit fimplement, que dans la poëfie les images font pouffées à un excés fabuleux qui paffe toute forte de créance.

Ce n'eft point, dit-il, un Orateur qui a fait Pag.64. paffer cette Loy, c'eft la bataille, c'eft la defaite EdeCheronée. Pour conferver l'image que Longin a voulu faire remarquer dans ce paflage d'Hyperide, je croi qu'il auroit falu traduire : Ce n'eft point, dit-il, un Orateur qui a écrit cette Loy, c'eft la bataille, c'est la défaite de Cheronée. Car c'eft en cela que confifte l'image. La bataille a écrit cette Loy. Au lieu qu'en difant, la bataille a fait paffer cette Loy, on ne conferve plus l'image,ou elle eft au moins fort peu fenfible. C'estoit même chez les Grecs le terme propre écrire une loy, une ordonnance, un edit, c.Monfieur D *** a évité cette expreffion écrire une Loy, parce qu'elle n'eft pas Françoise dans ce fens là; mais il auroit pû mettre ce n'eft pas un Orateur qui a fait cette Loi,c.Hyperide avoit ordonné qu'on donneroit le droit de bourgeoifie à tous les habitans d'Athenes indifferemment, la liberté aux efclaves, & qu'on envoyeroit au Pyrée, les femmes & les enfans. Plutarque parle de cette Ordonnance dans la vie d'Hyperide, & il cite même un paffage, qui n'eft pourtant pas celui dont il eft ici queftion. Il eft vrai que le même paffage rapporté par Longin eft cité fort differemment par Demetrius Phalereus, Ce n'eft pas moy, dit-il, qui ay écrit cette Loy, c'eft la guerre

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qui l'a efcrite avec l'épée d' Alexandre. Mais pour moy je fuis perfuadé que ces derniers mots qui l'a efcrite avec l'épée d'Alexandre, Αλεξάνδρε δόραν κάφων, ne font point d'Hyperide; elles font apparemment de quelqu'un qui aura crû ajoûter quelque chofe à la penfée de cet Orateur, & l'embellir mefme en expliquant par une espece de pointe le mot πόλεμο ἔγραψεν, la guerre a écrit, & je m'affure que cela paroistra à tous ceux qui ne fe laissent point ébloüir par de faux brillans.

Mais il n'y a pas grande fineffe à jurer fim plement, il faut voir où, comment, en quelle occafion & pourquoy on le fait.] Ce jugement eft admirable, & Longin dit plus luy feul que tous les autres Rheteurs qui ont examiné le paffage de Demofthene. Quintilien avoit pourtant bien vû que les fermens font ridicules, fi l'on n'a l'adreffe de les emploier auffi heureufement que cet Orateur; mais il n'avoit point fait fentir tous les defauts que Longin nous explique fi clairement dans le feul examen qu'il fait de ce ferment d'Eupolis. On peut voir deux endroits de Quintilien dans le Chap. 2. du Livre IX.

Et ne sçauroit fouffrir qu'un chetif Rhetoricien entreprenne de le tromper comme un enfant par de groffieres fineffes.] Il me femble que ces deux expreflions chetif Rhetoricien & fineffes groffieres ne peuvent s'accorder avec ces charmes du difcours dont il eft parlé fix lignes plus bas.Longin dit,&ne sçauroit souffrir qu'un fimple Rhetoricien, τεχνίτης ῥήτωρ, entreprenne de le tromper comme un enfant par de petites fi nefes χηματίοις.

Sidonc vous voulez éviter les malheurs qui vous menacent.] Tous les Interpretes d'He

rodote

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