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tumultes, d'y proposer à dessein de fausses matières de délibérations, capables de soulever tous les esprits. (Rhulières, Anarchie de Pologne.) (Prov. polonais.)

2. Les Polonais ont un ancien proverbe qui dit : On ôte aisément à un Polonais son habit et même sa veste, mais dès qu'on veut lui ôter sa chemise, il reprend tout. Malheureusement on a fait mentir ce proverbe, car on leur a ôté leurs chemises, et ils n'ont rien repris. (Polonais.)

3. Qui ne sait cacher son ennui, apprête à rire à l'ennemi (polonais). L'ennui est une sorte de malaise ou de maladie particulière à l'espèce humaine, qui résulte de la comparaison de notre état actuel avec un état que nous nous figurons devoir être plus agréable, et qui nous est inconnu. C'est un désir vague et factice qui circule dans tous les recoins de notre individu, tourmente nos muscles, nos nerfs, notre cerveau et produit une foule de mouvemens convulsifs, qui s'annonçent par le bâillement et l'aspiration prolongée. Cet état d'agitation incommode se répand sympathiquement sur tous les corps qui se trouvent dans la sphère de son souffle pernicieux; il influe particulièrement sur les académies. On s'est assuré, par une suite d'expériences, que cette contagion attaquait principalement les imaginations perverties par les besoins, les progrès et les abus de la société perfectionnée. On veut être ému, secoué de toutes manières; on éprouve à la fois un si grand nombre de situations, d'émotions variées qu'elles perdent leur pouvoir sur les sens émoussés. La difficulté

d'en créer de nouvelles fait que toutes celles qu'on a épuisées finissent par être insipides. Toutes ces impressions qui n'ont plus d'action sur un moral blasé, tous ces désirs vagues qui en appellent toujours d'autres, sont les produits de l'industrie de la société perfectionnée. Cette boulimie de l'imagination, si je puis me servir de cette expression, ne peut exister dans les êtres bornés à peu près aux besoins physiques. Le sauvage, quand il a pourvu aux soins nécessaires de son existence, paraît content, se repose sur sa natte et dort tranquillement, le cerveau libre de désirs qui n'appartiennent qu'à l'excès de la civilisation; il n'obéit qu'à la nature, il se rapproche de la vie animale de toute la quantité que nous nous en éloignons. Voici la définition que donne de l'ennui une espèce de philosophe que l'amour de l'originalité et l'abus de l'esprit ont jeté dans de grossières méprises, Helvétius; il dit : « L'ennui est un des principes de la perfectibilité de l'esprit humain. » Il a pris l'effet pour la cause. Le ridicule a fait justice de sa définition dans les deux vers suivans, lus à l'Académie française.

Et ce n'est pas dans le siècle où nous sommes,
Faute d'ennuis, qu'on manque de grands hommes.

On se souviendra sans doute que l'ennui était le mal dont tout le monde se plaignait, depuis le petit maître jusqu'au laquais. Il faut que le quart de siècle qui a produit la révolution, ses fleuves de sang, ses affreuses conséquences, la convention, le directoire, le régime impérial, ait bien éloigné l'es

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prit humain de sa perfectibilité, puisque l'agitation ne nous a pas rendus assez heureux pour nous ennuyer. Un auteur grave disait que l'ennui est un mal dont chacun a le remède entre les mains, et qu'une femme qui s'amuse à chercher ses puces était préférable à un moine qui s'ennuie. On ne paraît jamais excessivement ennuyé avec les autres, sans l'être d'habitude avec soi-même.

4. On reçoit l'homme suivant l'habit qu'il porte, et on le reconduit suivant l'esprit qu'il a montré. (Prov. russe.) C'est une interprétation de notre proverbe Selon les gens l'encens. Combien de gens perdraient et d'autres gagneraient à cette justice distributive!

5. Ceux qui conseillent ne paient pas. Rien ne coûte moins à donner qu'un conseil; aussi les Hollandais et les Flamands, à qui ce proverbe est familier, veulent faire entendre que conseiller, n'est pas donner les moyens d'exécuter. Aujourd'hui ce proverbe a été bien modifié, car ceux qui conseillent sont grassement payés, souvent pour ne rien faire, quelquefois pour faire pis.

6. Le vin est entré, le secret est sorti. (Prov. hébreu.) 7. Chacune de nos misères est une pièce du veau d'or. (Id.)

8. Sous le nom de Dieu on commet toute sorte de mal. (Id.)

9.

Tu seras bon avec le bon, mauvais avec le mauvais. (Id.)

10. The sun of England is set for ever, le soleil de l'Angleterre est couché pour jamais. Cette ex

pression de Franklin est devenue proverbe. (Anglo-Américain).

11. Le temps perdu ne se retrouve jamais, et ce que nous appelons assez de temps, se trouve toujours trop court. (Prov. américain.)

12. C'est une folie d'employer son argent à acheter un repentir. (Id.)

13. Se coucher de bonne heure et se lever matin, sont les deux meilleurs moyens de conserver sa santé, sa fortune et son jugement. (Id.)

14. Si vous ne voulez pas écouter la raison, elle ne manquera pas de se faire sentir. (Id.)

15. Le matin le fromage est de l'or, à midi de l'argent et le soir du plomb. (Prov. suisse.)

16. Il n'y a pas de chat si fourré qu'il n'ait des griffes. (Id.)

17. Il faut de bonnes jambes pour porter un jour de fortune. (Id.)

18. Lorsqu'on tortille trop le saule, tout pliant qu'il est, il finit par se casser.

19. On peut déchirer plus d'étoffe en un instant, qu'on n'en raccommode en un an.

20. Il ne faut pas attendre que l'écume s'écoule du pot, car la graisse s'échappe avec elle. (Prov. suisse.) 21. Un petit homme peut jeter une grande ombre. (Id.)

22. Il faut bien des pelletées de terre pour enterrer la vérité. (Id.)

23. On tire plus de choses avec un cheveu de femme, qu'avec six chevaux bien vigoureux. Un poète grec s'exprime ainsi (Antologie, livre vII): Doris, avec un cheveu qu'elle a tiré de sa blonde chevelure,

m'a enchaîné. Je me moquais de la faiblesse de ce lien, qui me semblait si léger, je croyais m'en débarrasser sans peine, mais j'en éprouve la force; je me sens lié par une chaîne de bronze, contre laquelle tous mes efforts sont inutiles. Malheureux que je suis! je ne tiens qu'à un cheveu, et ma belle me conduit comme il lui plaît. Tant il est vrai, comme le dit une de nos anciennes et joyeuses chansons:

Un cheveu de ce qu'on aime
Tire plus que quatre bœufs.

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24. Regrets sincères valent mieux qu'appareil de deuil. (Prov. tartare.)

25. Si l'on approche le beurre trop près du feu, il est bien difficile de l'empêcher de fondre. (Prov. des Banians.)

26. Le feu noircit ce qu'il ne peut consumer. (Prov. indien.) C'est l'emblême de la calomnie.

27. Le monde est partout la terre du Seigneur. (Prov. norwégien.)

CHAPITRE II.

Proverbes historiques.

Dans le XIVe siècle, il était commun d'assaisonner le langage de maximes proverbiales. Les princes même n'en dédaignaient point l'emploi en discutant les objets les plus sérieux, comme on le voit par une réponse que fit Charles-le-Téméraire, duc de Bourgogne, à Louis XI, roi de France, qui

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