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autres départemens, une force armée pour marcher, en tout ou en partie, contre les factieux de Paris qui ont enchaîné la liberté de la Convention, et réduit au silence les bons citoyens. › 5° Cette force armée sera de 4,000 hommes pour le département de l'Eure.

4o Il sera établi une correspondance avec tous les départemens, pour les inviter à se joindre au département de l'Eure.

50 Il sera envoyé une adresse à toutes les Communes de ce département, pour demander leur adhésion aux mesures contenues dans le présent arrêté.

6o Il sera envoyé des commissaires dans les départemens du Calvados, d'Eure-et-Loir et de l'Orne, pour concerter ensemble les mesures d'exécution.

7° Il est ordonné aux municipalités d'arrêter ceux qui prêcheraient la doctrine de l'anarchie, le meurtre et le pillage.

A Caen, des quatre commissaires de la Convention, charges d'y activer la formation de l'armée des côtes de Cherbourg, deux eurent à peine le temps de se réfugier dans le département de la Manche; les deux autres, Romme et Prieur (de la Côted'Or) furent arrêtés par ordre des corps administratifs et des sociétés populaires. Une lettre de Félix Wimpfen, commandant de place à Cherbourg, et qui fut bientôt nommé général des troupes fédéralistes, transcrit cette nouvelle. La dépêche de Wimpfen arriva le 13 juin à la Convention, au moment où des députés du district des Andelys racontaient ainsi les actes des commissaires envoyés de Caen pour opérer la ligue normande :

‹ Législateurs, il ne vous sera peut-être pas inutile de connaître avec quel mépris la représentation nationale a été traitée par neuf commissaires envoyés du Calvados dans le département de l'Eure.

L'un d'eux a dit, avec un mouvement d'indignation, que la faction scélérate qui venait de décréter d'arrestation les Brissot et les Barbaroux, était la même qui renversa le monarque de dessus son trône, pour s'asseoir à sa place. — Il s'écria qu'il n'y

avait pas de temps à perdre pour arrêter le sang de ces vertueux citoyens qui coulait peut-être déjà.

› Un membre observait qu'on aurait bien de la peine à lever une force armée de quatre mille hommes.- Un administrateur répondit: Nous aurons tous les aristocrates pour nous.

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Limoges expédie des couriers à tous les chefs-lieux du centre, convoquant à Bourges, dans le plus bref délai, leurs députés suppléants à la Convention.

A Toulouse, les autorités constituées placardèrent le discours de Lanjuinais contre la Commune de Paris, mirent en liberté tous les Feuillans que les commissaires Mailhe et Chabot avaient fait incarcérer, et remplirent les prisons de patriotes; enfin, elles levèrent une force armée de mille hommes, et publièrent dans le Languedoc un rendez-vous général à Perpignan de toutes les troupes départementales de cette contrée.

La nouvelle du 51 mai trouva Marseille en pleine révolte. Nous lisons dans le journal d'Avignon, sous la rubrique de Marseille, 5 juin :

Le 3 de ce mois, à 7 heures du soir, le club a été fermé, les clefs ont été remises au comité général des sections avec le poignard de Brutus. On y a trouvé quatre canons de quatre livres de balles, deux tromblons, beaucoup de piques et quinze fusils. Les effets, bancs, chaises, tables et tribunes ont formé la charge de trois charrettes; un cortège nombreux, précédé de la musique militaire, a porté au comité général des sections quinze drapeaux pris sur les ennemis que les corsaires avaient déposés dans ce temple de la liberté. Un grand nombre de membres du club déposent leurs diplômes aux sections, et plusieurs de ces diplômes sont portés dans la ville au bout des piques; enfin, il y eut hier illumination générale à l'occasion de cet événement bien extraordinaire, attribué en général à l'effet qu'a produit la nouvelle de la catastrophe de Lyon, du 29 mai. • Le tribunal populaire, tant de fois suspendu et tant de fois remis en activité, paraît être sur le point d'être rétabli de nou

veau; car les sections procèdent au renouvellement de ses membres. >

Ce tribunal fut, en effet, rétabli. Deux courriers extraordinaires, arrivés de Paris dans la nuit du 6 au 7 juin, donnèrent lieu à une assemblée des sections, et à une conférence des trois corps administratifs avec le comité général des sections. La séance dura jusqu'à huit heures et demie du matin ; personne n'eut la liberté d'en sortir. Le journal de Lyon, no LXXXIX, d'où nous tirons ces détails, donne la notice suivante de la délibération arrêtée par les autorités constituées de Marseille.

Il sera établi un comité de comestibles pour régler, à un taux modéré, les objets d'absolue nécessité;

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› Déterminé de presser la vente des biens nationaux, pour diminuer d'autant la masse des assignats;

› Force départementale de cinq cents hommes, au moins, par chaque département ;

› Quatre bataillons de gardes nationales en réquisition permanente de semaine en semaine ;

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Établissement d'une commission nationale de cent soixantedix membres, qui s'établira à Bourges, dont la mission sera de protéger la Convention nationale, la dégager des factieux qui l'oppriment, et lui donner les moyens de travailler à la constitution, etc.; Établissement d'un jury de jugement, composé de quatrevingt-cinq membres, pour juger tous les crimes contre la sûreté nationale;

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› Autre jury d'autant de membres, pour impugner la comptabilité financière, etc.

› Convocation de toutes les assemblées primaires dans la République, pour qu'il soit procédé, dans chaque département, à la nomination de deux membres pour la commission des cent soixante-dix,

› Et de quatre autres pour les deux jurys.

› Bourges désigné pour ces trois établissemens. »

Dix députés du gouvernement provisoire de Marseille furent nommés pour parcourir les départemens, et se procurer l'ad

hésion générale. Ensuite, on s'occupa de lever six mille hommes; la présence de Rebecqui et les lettres de Barbaroux contribuèrent puissamment à fortifier toutes ces résolutions. Toulon s'y rangea aussitôt.

A Nîmes, l'arrivée de Rabaud Saint-Étienne avait porté ses fruits. Une lettre de cette ville, datée du 12 juin, et insérée dans le numéro XC du journal de Lyon, s'exprimait ainsi :

« On a fait cette nuit une rude expédition contre les maratistes; leur club a été muré; tous les scélérats ont été désarmés, et quelques-uns emprisonnés sans coup férir. On a découvert toute la trame d'une horrible boucherie qui devait avoir lieu à Nîmes. Notre infâme district a été désarmé, il avait trois caisses de fusils, et nous devons notre salut à notre bonne et ferme municipalité, aux grenadiers et aux chasseurs. >

Les autorités constituées de Grenoble, réunies en assemblée des représentans immédiats de la section du peuple français, du département de l'Isère, délibérèrent et agirent au nom du souverain. Il y eut une tentative d'arrestation sur Dubois Crancé et Gauthier, commissaires conventionnels auprès de l'armée des Alpes, et le nouveau pouvoir envoya des agens à Lyon.

Le département du Jura, dont Bourdon (de l'Oise) disait, à la séance du 6 juin, en parlant des registres de ses délibérations, qu'ils renfermaient les preuves du complot girondin, prit aussi l'initiative fédéraliste. A la séance du 13 juin au soir, des citoyens de Lons-le-Saulnier dénoncèrent à la Convention les mesures prises par ce département, comme attentatoires à l'unité et à l'indivisibilé de la République. Its accusèrent les administrateurs d'avoir arrêté le rassemblement des suppléans à Bourges, où ils devaient être accompagnés par un détachement de grenadiers; d'avoir arrêté que les fonds publics seraint retenus jusqu'à la mise en liberté des députés prisonniers à Paris ; d'avoir refusé de reconnaître les décrets rendus depuis le 34 mai. Les dénonciateurs offraient leurs personnes pour garans de la vérité de ces faits.

Bourg, Besançon, Dijon, Macon imitèrent leurs voisins. Ces

mouvemens partiels se concentraient à Lyon, qui était devenu le chef-lieu insurrectionnel de la Bourgogne, du Dauphiné et de la Franche-Comté. L'importance de cette place y faisait affluer en outre de nombreux émissaires de tous les points où le fédéralisme avait éclaté; elle-même en envoyait partout. Lyon et Caen furent les deux boulevarts girondins, et la révolte de ce parti y produisit des conséquences identiques. A Lyon, les insurgés choisirent pour général le comte de Précy, royaliste connu ; à Caen, Buzot et Pétion placèrent également un royaliste, le baron Félix de Wimpfen, à la tête des forces combinées de la Bretagne et de la Normandie. D'un côté, il y eut des négociations avérées avec les Piémontais; de l'autre, des relations avec le cabinet de Londres.

Et dans quelles conjonctures ce schisme venait-il diviser la nation! Battue au nord et au sud par l'étranger, à l'ouest par les royalistes, la France était alors menacée d'une seconde Vendée née tout-à-coup dans les montagnes de la Lozère, et qui se montrait, dès son origine, presque aussi retoutable que la première. A la tête de trente mille hommes, au milieu desquels prêchaient cinquante prêtres réfractaires, l'ex-constituant Charrier s'était emparé de Mendes sans coup férir; et le 27 mai, après un combat de quelques heures, il était entré dans SaintAlban et dans Randon. Partout les révoltés abattaient l'arbre de la liberté, déchiraient le drapeau tricolore, arboraient le drapeau blanc, prenaient les caisses des receveurs, ouvraient les prisons,.réintégraient les religieuses. Déjà ils avaient emprisonné quatre-vingts patriotes à Marvejols; les administrateurs du district avoient été égorgés. La lettre où ces nouvelles étaient annoncées fut lue le 3 juin à la Convention. On y avait joint la copie d'un ordre du jour de Charrier; voici cette pièce :

Il est ordonné à MM. les maires et officiers municipaux de Saint-Amand, au nom de MONSIEUR, RÉGENT DE FRANCE, de faire mettre sous les armes tous les habitans, de faire sonner le tocsin, et de se rendre à la tête de leurs troupes à Randon, neuf heures du soir, afin de recevoir les ordres du chef général

à

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