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blique est dans le plus grand danger; la caisse de l'extraordinaire doit être volée. Quarante scélérats se sont coalisés pour commettre ce vol, et ils espèrent d'autant mieux réussir, qu'il m'a été rapporté qu'un particulier, qui habite ce local, doit leur procurer toute aisance.

Il est de la plus grande nécessité de pouvoir découvrir et arrêter tous les voleurs en flagrant délit. Je suis à même de réussir dans cette opération, attendu que la confidence de ce vol m'a été faite par un particulier à qui on a communiqué ce projet.

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XXXI. Lettre d'Amelot, administrateur des domaines nationaux, au président de la commission des Douze, en date du 26 mai, en lui envoyant la pièce précédente. Il rend compte des précautions qu'il a prises pour faire échouer le complot. « Aussitôt, écrit-il, que la lettre m'a été remise, j'ai fait prier le commandant de la force armée de la section du Mail, dans l'enceinte de laquelle est située l'administration des domaines nationaux, de se rendre auprès de moi, et je suis convenu avec lui qu'à la nuit tombante une trentaine de citoyens de bonne volonté se rendraient insensiblement dans un lieu désigné de l'administration; qu'il donnerait simplement ordre à l'officier du poste de veiller à ce que personne ne s'en écarte passé neuf heures du soir; et qu'au surplus on ne changerait rien aux consignes des postes, pour ne pas faire soupçonner les précautions prises. II" a en outre fait doubler la réserve, afin de tirer du secours, si besoin était. Mais toutes ces précautions ont été heureusement" surabondantes pour la nuit dernière. Elle s'est passée tranquillement. J'ai seulement vu avec regret que dans tous les citoyens qui composaient le poste ordinaire de l'administration (et ils étaient plus de vingt-cinq), il n'y en avait que DEUX qui eussent des fusils. »

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tion contre la Convention nationale, n'en soit une partie, comme le vol des diamans du Garde-Meuble était une partie de la conspiration de septembre.

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Aujourd'hui, vingt-huit juin mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an second de la république française; conformément à l'arrêté pris ce matin par l'assemblée générale de l'administration et députés des cantons du département du Calvados; sur la demande du citoyen Bergoeing, député de la Gironde à la Convention nationale, et membre de la commission des Douze, de déposer au secrétariat du département des pièces intéressantes dont il veut faire imprimer les extraits textuels, l'assemblée a nommé les citoyens Dubosq et Chatry l'aîné, pour recevoir ledit dépôt contenant trente-deux pièces avec l'inventaire y annexé : ce qui a été exécuté et remis au secrétariat par nous soussignés, en présence dudit citoyen Bergeoing, qui a signé avec nous, et ensuite apposé son cachet sur le paquet, avec celui de l'administration du département du Calvados.

Fait à Caen, en la ci-devant Abbaye de Saint-Étienne, lesdits jour et an que dessus.

Signés CHATRY l'aîné; DUBOSQ; BERGOEING, député de

la Gironde.

DES AMIS DE LA LIBERTÉ ET DE L'ÉGALITÉ,

Séante aux ci-devant Jacobins, rue Saint-Honoré,

AUX CITOYENS DES DÉPARTEMENS,

SUR L'INSURREction du 31 MAI.

Frères et amis, sentinelles avancées du peuple français, autour de ses représentans, nous n'avons point trompé vos espérances, et vous allez féliciter les Parisiens d'être toujours dignes de ce poste important que vous leur avez confié. Cette grande cité qui n'a, et qui ne veut avoir d'autre ressemblance avec l'ancienne Rome, que celle-là seule qu'il n'y a point de Jugurtha, point de roi assez riche pour l'acheter; cette ville incorruptible par son immense population, et nous osons presque dire infaillible par ses lumières, par ses sociétés populaires, par son expérience, son habitude du théâtre de la révolution, parce que, plus près de ce théâtre, aucun mouvement des acteurs ne saurait lui échapper; Paris n'a pu soutenir plus long-temps le spectacle de tant de perfidies et de scélératesses. Il vient de faire ce qu'il n'est aucune ville patriote qui n'eût fait à sa place. Il vient de se lever tout entier une troisième fois, trop tard sans doute pour la gloire des hommes du 10 août et du 14 juillet, trop tard surtout pour épargner, à notre malheureuse patrie, la guerre civile de la Vendée et les maux qui se debordaient sur elle de toutes parts, depuis que des traîtres dominaient dans la Convention, mais assez à temps pour sauver la République et la France; et ce qui fera frémir de rage la ligue des tyrans, ce qui

confondra les détracteurs de Paris et ses calomniateurs contrerévolutionnaires qui l'appellent sans cesse une ville de sang et d'anarchie, c'est que cette troisième insurrection, la plus salutaire, la plus sainte de toutes, n'a pas une seule tache de sang.

Il n'y avait ici personne de bonne foi qui doutât des crimes des meneurs du côté droit de la Convention, de leur royalisme, de leur intelligence avec Dumourier et Cobourg, avec la Prusse et l'Angleterre, de leur complicité de toutes les trahisons; et les bons citoyens gémissaient, désespérés de voir le gouvernail de la République confié à une bande de conjurés contre la République. S'il n'y avait point de preuves physiques et matérielles de la conjuration, c'est qu'il n'y en eut jamais contre des conspirateurs, pas même contre Catilina; c'est que Cicéron, tout habile qu'il était, ne put acquérir de conviction contre Catilina, qu'en le forçant à fuir, comme vient de faire Brissot. Parcourez toute l'histoire des conjurations, depuis celle des fils de Brutus, dénoncée par l'esclave, jusqu'à celle du comité autrichien, dénoncée par Brissot et Gensonné; et dites s'il y eut jamais des conjurés plus convaincus que ne le sont les meneurs du côté droit, par le seul écrit, tout incomplet qu'il est, que vient de publier un membre de la société, sous le titre de Fragment de l'Histoire secrète de la Révolution, et que nous vous avons adressé. Le simple bon sens a révélé au peuple, ce dont la méditation a convaincu tous les publicistes et les philosophes, qu'il n'y a point de plus grande folie que de chercher des preuves juridiques en matière de conjuration; car avant que vous ayez acquis ces preuves, la trahison est consommée (1). Avant que vous ayez décrété Dumourier d'accusation, la Belgique est évacuée et tous les magasins livrés à l'ennemi; avant que vous ayez décrété l'arrestation provisoire de Brissot, vos colonies sont perdues; la Corse, Bordeaux, Marseille, se détachent de la République, ce tison jeté par Pitt au milieu de la France, y a allumé à la fois la guerre intestine et une guerre avec toute l'Europe; Antequam intelligas proditorem, proditus es.

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SENÈQUE.

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il s'est dérobé par la fuite à votre justice, qui poursuit à pas de tortue les conjurés qui ont des ailes; et vous le verrez jouir à Londres, ou en Amérique, d'une fortune mmense, salaire de ses forfaits et des maux de la patrie.

Pénétré du sentiment de ces vérités, le peuple ne voyait de salut que dans le remède d'une troisième insurrection, quand les dernières nouvelles des départemens et des armées ont achevé de répandre la consternation et de faire sentir la nécessité et l'urgence de ce remède extrême. Nantes élargissait les ennemis de la liberté, et en écrouait les défenseurs. Rennes ne reconnaissait plus les commissaires de la Convention; la Lozère imitait la Vendée; Fontenai-le-Peuple tombait au pouvoir des rebelles; le camp de Famars était livré à l'ennemi. On répandait que Bordeaux négociait avec Pitt pour être ville indépendante; Marseille désavouait sa gloire, brisait ses trophées, et jetait dans es cachots les meilleurs citoyens; Lyon les égorgeait. Pour comble de maux, dans la Convention, deux côtés, l'un insolent de sa majorité, visiblement l'ame de tous les complots, de toutes les igues du dedans et du dehors, insensible à nos revers, faraissant plutôt en triompher et attendre les Autrichiens avec plus d'impatience que ne fit jamais Louis XVI; l'autre, découragé par l'aveuglement incurable des départemens, abattu par le sentiment de son impuissance, repoussé de la tribune, ne pouvant manifester son patriotisme que par son indignation et des mouvemens tumultueux, sans tactique, sans pilote, sans concert comme dans la tempête, et à qui tout était permis comme à un malade désespéré : ces deux côtés agitant la Convention de leurs débats, montraient aux tribunes dans l'assemblée nationale, non plus le temple de la liberté, l'autel du peuple français, l'ancre du vaisseau de l'État et sa dernière espérance, mais une arène de gladiateurs, et plus souvent une halle.

Cette vue, et les dernières nouvelles jointes au souvenir de tant de trahisons, amènent enfin l'explosion générale. Paris, l'œil de la République, fatigué de tant de crimes, voit que pour la sauver il faut qu'il s'en regarde un moment comme le bras:

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