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faire venir des lettres de Santerre, pour obtenir d'autres bataillons de Paris, pris dans les marchands; pour y réussir, on tiendra des pétitions prêtes, qui demanderont que l'homme aisé marche. Les Jacobins voulaient avoir douze cents hommes, pour faire le coup de main, mais ils n'ont pu en trouver que trois ou quatre cents. ›

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XXIII. Avis donné à la commission des Douze, le 29 mai au soir, sur ce qui s'est passé le soir même à l'assemblée de l'Évêché. Voici les détails de cette note importante qui donne le fil de la conspiration du 31 mai: — « On n'entrait au club électoral, appelé central, qu'en justifiant d'une carte de société patriotique. L'assemblée était composée d'environ cinq cents personnes délibérantes, parmi lesquelles il y avait cent femmes. Les tribunes étaient occupées par environ cent personnes. Dufourny, au nom d'une commission dite des Six, formée depuis hier, proposait de nommer six commissaires, pour aller demander à la municipalité qu'elle avisât, sans délai, à la nomination provisoire d'un commandant de la garde nationale parisienne; sans cela point d'ensemble dans les mesures à prendre. Une femme a parlé sur cet objet, et a généralisé ses vues........... Elle a dit qu'il ne fallait désormais espérer de salut que par des mesures promples et vigoureuses, et qu'en portant des coups tels que les ennemis que l'on avait en vue ne pussent jamais s'en relever. Elle s'est beaucoup attachée à prouver que la Convention était mauvaise...... Elle a appuyé la proposition du comité; elle a entraîné tout le monde. On a délibéré conformément à la proposition du comité, et elle a été la première désignée pour cette commission.

On a demandé, au nom du comité des Six, une confiance sans borne, et la promesse de mettre à exécution toutes les délibérations qu'il prendrait, sans autre examen. On a paru accéder à ces propositions.

Dufourny a, par deux ou trois fois, imposé silence à des orateurs qu'il a taxés d'imprudence, parce qu'ils semblaient vouloir toucher la question des moyens à prendre. Il a interrompu un

autre orateur pour dire ces mots : « Je crains bien que, si vous perdez autant de temps à délibérer, vous ne soyez pas de la

» fête. >

L'objet dont généralement tous les orateurs se sont occupés, a été une insurrection prompte, générale et à grandes mesures dans Paris.

Un des moyens proposés par un membre, qui s'est dit de la section du Théâtre-Français, est de désarmer tous les riches, les aristocrates, les feuillans, les modérés, comme il a annoncé que cela avait été pratiqué dans cette section et dans une autre, aujourd'hui, par un procédé très-simple. « Nous avons, dit-il, réuni quelques canonniers; nous leur avons représenté que la Convention avait promis de les armer, qu'elle n'en faisait rien; qu'ils n'avaient qu'à faire une visite fraternelle chez ceux cidessus désignés, et leur prendre aujourd'hui leurs fusils, jusqu'à ce que demain on pût leur prendre leurs assignats et leurs

écus. >

Une autre mesure générale, proposée par Dufourny, au nom toujours du comité des Six, a été d'engager toutes les sections à faire une adresse à la Convention, pour lui demander la punition du crime d'Isnard envers Paris, « afin, dit-il, qu'ayant une fois donné une impulsion commune à tous les Parisiens, ont pût les entraîner vers un même but. >

Au reste, il a été parlé de frapper de très-grands coups; et jamais on n'a manqué de compter le côté droit de la Convention et la commission des Douze, parmi les ennemis les plus dangereux de la patrie, Du reste, tout se résume à ceci : « Insurrection semblable à celle du 14 juillet et du 10 août; précipitation dans cette mesure ; et pour cela l'assemblée s'est ajournée à demain neuf heures du matin, à compter de quelle heure elle sera permanente. »

XXIV. Note remise à la commission des Douze, sur ce qui s'est passé dans la journée du 29 à l'assemblée de l'Évêché.

Il a été délibéré dans cette séance de faire une adresse à douze

sections, pour les engager à unir des commissaires à ceux que

les autres sections ont déjà nommés pour présenter des demandes à la Convention. On a objecté que les sections, avant qu'elle pussent avoir délibéré sur cette adresse, c'est-à-dire ce soir, auraient à délibérer sur des objets bien plus importans de salut public, et néanmoins on a arrêté la mesure, parce que personne n'a pu disconvenir qu'elle n'était point fausse, mais bien révolutionnaire.

On a mandé à tous les cantons du département, pour les engager à coïncider avec les mesures que Paris va prendre. Des commissaires qui doivent se rendre à Versailles, auront des instructions particulières.

Une espèce de bannière assez grande, fond rouge, était sur les bancs de la salle; elle portait ces mots : l'instruction et les bonnes mœurs peuvent seules rendre les hommes égaux. Elle n'était point attachée à un bâton, et on ne comprend pas quel rapport cette bannière, qu'on ne vit pas hier, pourrait avoir avec les projets médités.

Le président a dit, environ à une heure, que puisqu'il ne paraissait pas que l'assemblée eût d'autres mesures à prendre, il fallait s'ajourner à demain matin, ajoutant que la section devait aujourd'hui occuper la salle où l'on délibérait.

Un instant après, le président a annoncé qu'il venait de recevoir la nouvelle qu'une correspondance entre les hommes d'état de la Convention et les rebelles de la Vendée avait été surprise; qu'elle portait cette invitation expresse: «Venez, accourez bien › vite vous joindre à nous pour détruire Paris. >

Le président a annoncé ce fait, sans émotion, comme par manière de conversation, et l'assemblée l'a si bien pris sur le même ton, que pas un membre n'a fait la moindre observation, le moindre geste, la moindre exclamation. Le président a dit : « On vient d'annoncer cette nouvelle à la Convention : elle s'occupe de cet objet à l'instant même. Voilà, a-t-il dit en désignant un membre, le citoyen qui me l'apprend. >>>

Dans cet intervalie, est arrivé un homme armé; il a parlé au président, qui a quitté le fauteuil, et i's sont sors ensemble.

Le citoyen qui a vu ceci, est sorti en même temps; il a trouvé dans la basse-cour qui sert d'entrée à l'assemblée électorale, une force armée, composée de quatre ou cinq gendarmes à cheval, et d'environ trente hommes de garde nationale, la plupart assez mal vêtus. Deux sentinelles étaient à la porte de la basse-cour, et ne laissaient entrer qu'autant qu'on exhibait une carte d'électeur ou de membre d'une société patriotique..... On voit, dans les différens quartiers, de la force armée.

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XXV. Note remise, le 29 mai, entre sept et huit heures du soir, sur ce qui se passait alors aux Jacobins. — Hébert y déclarait que le peuple pouvait et devait courir sus aux membre de la commission des Douze. Tous les orateurs s'accordaient sur la nécessité d'un mouvement. Nota (cette séance des Jacobins est connue par le journal de leurs débats.)

XXVI. Déclaration de Richaud, député, sur une députation de femmes, qui s'est rendue à Versailles, le 19 mai, pour y soulever les femmes. Cette tentative n'a pas réussi.

XXVII. Note fournie par A. M. Q. -Le 23 mai, il y eut un grand rassemblement à Charenton, d'environ soixante personnes, parmi lesquelles étaient Robespierre et Danton. - Voyez

No VI.

XXVIII. Déposition de C...., de la section de la Fraternité. - Elle porte que, le 26 mai, trois cents femmes se rendirent avec des drapeaux dans cette section, et invitèrent les citoyennes à se joindre à elles pour écraser le nouveau despotisme, et que C.... fut frappé, pour avoir voulu leur faire quelques observations.

XXIX. Déposition de la veuve R..., contenant des détails sur la fabrication des poignards (4), et sur les femmes qui en étaient

armées.

Voici les faits les plus frappans : - On fait des poignards chez Cheinard ou Geinard, maître serrurier, machiniste de la Monnaie; son premier ouvrier est Mathieu, Liégeois. Il doit avoir

(1) Voyez n. XXII. Cette déposition est antérieure à celle du n. XXII.

été déjà fait deux ou trois cents (1) poignards; et il a été dit que les femmes des tribunes de l'assemblée en ont déjà deux cents. On dit que Marat va diner souvent chez Geinard. Le coup doit se faire le mois de juin. Les femmes des tribunes vont boire et manger aux Jacobins, et reviennent aux postes. Varlet lui disait attendez, dans trois ou quatre jours nous ferons quelque chose. Elles sont huit mille femmes enrôlées. Elles avaient même commencé un exercice des poignards; mais elles ont eu peur, et alors elles ont cessé cet exercice. Hier, on a vomi des horreurs contre la Convention à la section Bon-Conseil; elle a arrêté qu'on ne reconnaîtrait pas les lois de la Convention nationale, et qu'on ne reconnaitrait que les ordres de la municipalité; enfin qu'on n'enverrait pas à la commission des Douze les procès-verbaux. Celui qui mène tout cela est Lullier (procureur-général-syndic du département).

XXX. Déposition du citoyen F....— « Le 5 mai, il y avait six militaires chez le commissaire Gober, rue Barbète; il se trouvait alors avec neuf commissaires de sections; un des militaires dit en leur présence: « Je connais un de mes amis à qui un dé› puté de la Montagne dit : Viens demain déjeuner avec moi, je > te ferai donner une place. Mon ami s'y rendit, et le député divagua. Mon ami apprit, deux jours après, que la place avait › été accordée à un autre qui avait compté cinquante louis au député. Le militaire ajouta qu'il était bien sûr que les députés de la Gironde n'avaient pas fait accorder quatre places, sur les neuf mille (2), all dis

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Copie certifiée du rapport du citoyen Montbrun, inspecteur de police, du 25 mai (5). Je suis informé que la fortune pu- :

(1) A l'époque de la déposition, n. XXII, c'est-à-dire peu de jours avant l'af faire du 31 mai, les poignards fabriqués se montaient à deux mille.

(2) On fait monter à neuf mille les places dans les bureaux, dans les armées, dans les administrations, dans les commissions; les députés de la Montagne en disposent souverainement et les mettent à prix; les tarifs sont presque publics. (3) Il est impossible de douter que ce complot, qui coïncide avec la conspira

T. XXVIII,

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