Page images
PDF
EPUB

Il déclare que Froidure, administrateur de la police, lui avait dit que Marineau et Michel, tous deux administrateurs de la police, étaient auteurs de la proposition faite à l'assemblée de la mairie, de massacrer trente-deux députés.

Nota. Froidure, à qui cette déposition a été communiquée, en a reconnu verbalement la sincérité, en observant que Marineau et Michel étant ses collègues, il ne croyait pas pouvoir être leur dénonciateur.

VI. Déposition de D......, membre du comité de surveillance de la section de la Fontaine-de-Grenelle, lequel a déclaré, que le 19 de ce mois (de mai) il s'est rendu à l'hôtel de la mairie, d'après une lettre d'invitation qu'avait reçue le comité dit révolutionnaire de sa section; que ses pouvoirs vérifiés, il a pris séance; que l'assemblée était présidée par un membre du comité de police de la mairie, qu'il connaît de vue seulement, mais dont il ignore le nom; qu'il était question de la priorité à donner à l'une des questions qui formaient l'ordre du jour ;

Que ces questions à l'ordre du jour avaient rapport à trois objets: 1o à la liste qu'il fallait donner des hommes suspects; 2o à ceux des membres de la Convention qu'il fallait proscrire; 3o à l'aristocratie des sections contre laquelle il fallait prendre des mesures révolutionnaires.

Qu'un membre de l'assemblée avait dit que les patriotes de la Convention nationale n'étaient pas en force pour sauver la chose publique. Je vais vous indiquer un moyen certain a ajouté ce membre: il faut que, dans la même nuit, tous les membres de la Convention qui sont suspects soient saisis et déposés dans. un lieu secret, pour être septembrisés sur-le-champ. Je suis républicain : que les trente-trois membres périssent, et que je périsse le trente-quatrième, je serai content. Après le conp fait, on fera partir des courriers pour les départemens, afin de répandre qu'ils ont émigré. » Ajoute le citoyen D....., que le membre qui a fait cette motion se nomme Bisé.

Qu'un autre membre a répliqué: « Cette mesure est inexecutable, citoyens, il faut attendre: ROBESPIERRE et MARAT sont oc

D

cupés, en ce moment, aux Jacobins, à dresser un plan d'insurrection. Que plusieurs voix ont crié : « Il ne faut nommer personne. Que le membre qui parlait a repris en ces termes: Citoyens, ils font aussi des recherches contre trois administrateurs en chef des postes, qu'il s'agit d'envoyer à l'échafaud.»

Que la motion a été appuyée par un gros homme, de la section du Panthéon-Français, qui a dit qu'avant tout il fallait purger les sections; ajoutant qu'on venait d'élever à la présidence l'infame Lavigne, qui avait été président du club de la SainteChapelle.

Qu'un autre membre, respectable par son âge, président du comité dit révolutionnaire de la section de 92, a représenté qu'il ne convenait pas d'assassiner, lorsqu'il y avait des tribunaux pour juger et punir les ennemis de la liberté ; que ses réflexions avaient été singulièrement mal accueillies ; qu'un des conjurés avait dit : « Citoyens, il ne faut souffrir parmi nous que des hommes à la hauteur des événemens, que des hommes capables de mettre à exécution les mesures révolutionnaires les plus énergiques; je demande que le membre qui vient de parler soit exclus de l'assemblée; que la motion fût mise aux voix et adoptée.

[ocr errors]

Qu'un membre de la section de la Fraternité, prenant des notes sur ce qui se passait, a été également déclaré suspect, et en conséquence exclus de l'assemblée.

Qu'ensuite on a dit qu'il fallait décidément exclure tous ceux qui étaient incapables de seconder les grands efforts et les grandes entreprises de l'assemblée ; qu'il fallait que chacun examinât son voisin et le dénonçât, s'il avait des raisons de le faire.

Qu'un membre a mis en motion de présenter au bureau les listes de gens suspects des sections; qu'il croit, sans cependant pouvoir l'affirmer, qu'il en fut présenté un petit nombre; qu'un autre citoyen avait dit qu'il en fallait de toutes sections; qu'elles devaient être apportées ici, pour être ensuite déposées dans un lieu où elles ne seraient pas trouvées.

Que l'on a invité les membres de chaque section à avertir les sections voisines qui n'avaient pas envoyé de commissaires, à le faire.

Que l'on a demandé un local pour déposer les gens suspects; qu'il a été répondu par le président qu'on avait fait beaucoup de recherches pour cela; qu'alors on avait nommé cinq ou six lieux de dépôt, au nombre desquels était la maison des Carmes du Luxembourg, que l'on a dit pouvoir contenir quatre cents personnes, et ayant un faux-fuyant commode par derrière (1).

Le citoyen D... n'a pu se rappeler le nom des autres endroits. il croit seulement avoir entendu les Minimes.

Déclare encore le même citoyen, qu'un membre a combattu la motion relative à la septembrisation des députés proscrits ; qu'un autre voulait qu'elle eût lieu dans la nuit même; que l'on s'y est opposé, en donnant pour raison qu'il était nécessaire d'avoir, avant tout, les listes de gens suspects des différentes sections; qu'un autre a répliqué en ces termes : « Coligny était à minuit à la cour, et à une heure il était mort; » que le même citoyen avait ajouté, après avoir annoncé qu'il était membre du comité de police de la mairie : « Nous avons des hommes tout prêts que nous paierons bien. ›

Que l'on a présenté une série des questions pour l'ordre du jour du lendemain; que cette série était l'enlèvement des députés; le dépôt de la liste des hommes suspects de chaque section; l'épurement des sections, de leurs bureaux, présidens et comités de surveillance.

Qu'alors on a fait observer que la septembrisation serait l'épuration de tout; et que la séance a été levée, après avoir été ajournée au lendemain, six heures du soir.

Que, le lendemain, il a fait part de ces projets à trois de ses amis, qui sont les citoyens (ici sont les noms et les demeures de ces trois citoyens, nous les supprimons); qu'ils avaient tous quatre résolu de donner communication de ces faits au citoyen

(1) C'était une des maisons de massacre le 2 septembre. (Note de Bergoeing.)

Isnard, président de la Convention; mais que, n'ayant pu réussir à lui parler, ils se rendirent à leur poste par précaution, tandis que lui se rendit à la mairie, pour assister à la séance de l'assemblée du comité central, après être convenu avec ses amis qu'en cas que le coup dût se faire pendant la nuit, il les avertirait; qu'alors le maire présidait; qu'il avait onze ou douze listes, et qu'il faisait remarquer qu'il ne fallait pas appeler ces listes autrement que listes de gens suspects.

Que plusieurs membres ont dit qu'ils ne voulaient pas que l'on connût les écritures de ceux qui avaient fait ces listes, qu'il fallait les copier sur papier mort; qu'un autre a répliqué qu'un bon républicain ne devait rien craindre; que le maire a observé que pour lui, il lui était égal que l'on sût qu'il était muni de ces listes, puisqu'elles concernaient la police de Paris.

Qu'un membre a dit au maire qu'il ne connaissait pas l'ordre du jour, puisqu'il n'avait pas assisté à la séance précédente, qu'il s'agissait du projet d'épurer la Convention, et que ce membre parla alors des vingt-deux proscrits; mais que le maire répondit que c'était un dépôt confié à la ville de Paris, et que si on commettait un attentat sur un seul membre, il en résulterait une guerre civile; enfin qu'il fit des représentations sages à cet égard, et demanda que l'on cessât de s'occuper de cet objet.

Qu'alors le citoyen, qui a lu la pétition dite des quarante-huit sections, à la Convention, relativement à la proscription des vingt-deux, avait dit: Comment se fait-il que vous, citoyen maire, qui avez signé la pétition, qui avez paru avec nous à la barre pour la présenter, vous veniez aujourd'hui inviter l'assemblée à ne pas s'occuper de ces mesures révolutionnaires? »

་ (

Que le maire a répondu : « J'ai sigue la petition, parce que je le devais; mais je ne souffrirai pas que l'on s'occupe, ici, à la mairie, d'une telle discussion (1). »

(1) Il est aisé de voir, mème par les discours de Pache, qu'il s'opposait, non pas à la proscription des députés, mais à ce que cette proscription fût discutée à la mairie; aussi n'y eut-il plus d'assemblée à la mairie; les conspirateurs s'assemblèrent à l'Évêché. (Note de Bergoeing.)

Le citoyen D.... dit que s'il ne rapporte pas littéralement, dans sa déclaration, les expressions dont on s'est servi, rien cependant n'est altéré dans les choses.

Le citoyen D.... a déclaré encore, que ceux qui la veille faisalent les motions les plus cruelles, étaient absens pendant cette séance, et que cinq ou six membres de l'assemblée demandaient à parler contre les motions proposées, si la discussion avait eu lieu; mais que l'assemblée s'est décidée à ne pas s'occuper de ces mesures, et que la séance a été levée sans ajourne

ment.

Il a observé que dans l'assemblée on ne qualifie la réunion que par le nom de comité central révolutionnaire.

VII. Déclaration de Salle, député, sur le même objet. - Salle y communique les rapports qui lui ont été faits; ils sont conformes aux détails contenus dans les pièces précédentes.

Autres pièces sur les projets de massacrer des députés et de dissoudre la Convention.

VIII. Déposition faite à la commission des Douze par Étienne J..., de la section du Temple. Ce citoyen rapporte que le nommé Mallet a dit, dans l'assemblée de la section du Temple, qu'il avait manqué le plus beau jour de sa vie, en ne se trouvant pas dans les tribunes de la Convention le jour qu'on a réclamé la liberté d'Hébert; qu'il aurait fait effectuer la bonne volonté des tribunes, en se mettant à leur tête, pour descendre, entourer la Convention, et en extraire les Brissotins, les Girondins et crapauds du marais.

IX. Déposition de Bernard T...., de Bordeaux, actuellement à Paris. Déclare que le jeudi 16 de ce mois (de mai), autant que la mémoire le lui rappelle, après la Convention, en traversant les Tuileries, il rencontra sur la terrasse, près la principale porte de la Convention, un citoyen en habit de garde nationale, suivi de beaucoup de personnes; que ce jeune homme s'arrêta dans ce lieu, posa sa bannière, monta sur une chaise, et après avoir fait le panégyrique de Marat, harangua le peuple en ces

« PreviousContinue »