I. La France est arrivée à une grande phase de son histoire; lasse de ruines, elle aspire de toutes parts à l'organisation. La guerre disparaît du monde: depuis vingt-quatre ans * nous n'avons vu que des guerres contre la barbarie ou celles des peuples contre le pouvoir. Les nations sentent qu'elles ne doivent plus verser leur sang pour des querelles de rois, mais seulement pour l'affranchissement et le bonheur de l'homme. L'avenir démocratique, préparé par les siècles, est annoncé comme prochain par toutes les bouches éloquentes du nôtre. La restauration a été l'effort agonisant de la vieille société; durant les premières années de la révolution de 1830, la peur de l'effervescence des masses victorieuses dominait les esprits; tout le monde sentait qu'un peuple hurlant dans les rues serait un mauvais législateur: ces années ont été employées à faire rentrer dans son lit le fleuve débordé. L'écueil aujourd'hui serait de s'imaginer que l'on peut gouverner en s'appuyant seulement sur les classes moyennes, en con * Cet ouvrage a été écrit en 1839. |