DE MOLIÈRE NOUVELLE ÉDITION REVUE SUR LES PLUS ANCIENNES IMPRESSIONS ET AUGMENTÉR de variantes, de notices, de notes, d'un lexique des mots et locutions remarquables PAR MM. EUGÈNE DESPOIS ET PAUL MESNARD TOME SEPTIÈME PARIS LIBRAIRIE HACHETTE ET C BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79 1882 NOTICE. Il n'a pas tenu à Grimarest qu'il ne soit resté de l'incertitude sur l'époque des premières représentations de l'Avare. Son erreur, qui se trahissait déjà par l'invraisemblance et par des contradictions, est aujourd'hui positivement démontrée. Aussi ne vaudrait-il guère la peine de la relever, si elle n'avait, pendant un temps, trouvé quelque crédit, et si l'on n'y reconnaissait la trace d'une tradition, plutôt, ce semble, défigurée qu'entièrement fausse, d'après laquelle l'Avare aurait tardé à prendre sur la scène sa place légitime. Grimarest veut que, pour faire accepter cette belle œuvre, Molière ait dû s'y prendre à deux fois, et qu'au temps où il la produisit d'abord, il ait eu peine à la soutenir jusqu'à la septième représentation. Tout le mal serait venu de la prose qui, dans une comédie, semblait alors une énormité. Un duc de *** (Grimarest tait son nom) avait dit : « Molière est-il fou, et nous prend-il pour des benêts, de nous faire essuyer cinq actes de prose? » Le biographe ajoute : « Mais Molière fut bien vengé de ce public injuste et ignorant quelques années après : il donna son Avare, pour la seconde fois, le 9° septembre 1668; on y fut en foule1. >> Si l'on ne suppose pas un lapsus de la plume de Grimarest, si ce n'est pas quelques mois après qu'il a voulu dire, comment n'a-t-il pas compris qu'avec ses quelques années il nous faisait un conte étrange? Tout cela d'ailleurs était écrit avec tant de négligence, qu'on lit un peu plus loin2: « Après que Molière eut repris avec succès son Avare, au mois de janvier 1668, comme je l'ai déjà dit.... » Il ne savait même plus que la date 1. La Vie de M. de Molière, p. 107 et 108. 2. Ibidem, p. 192 et 193. |