Page images
PDF
EPUB
[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

Cloud. Mort de Henri III.

[ocr errors]

famine dans Paris.

[ocr errors]

L'armée royale à SaintArques et Ivry. - Cruelle

Siège de Paris; procession de la Ligue.
Campagnes de Henri IV contre Mayenne et Alexandre Farnese. Tyrannie
Henri IV à Saint-Denis. Les États de la Ligue. —
La pacification.

[ocr errors]

des Seize; meurtre du président Brisson. L'abjuration. Entrée de Henri IV à Paris.

[ocr errors]

A Ligue n'avait été, à son origine en 1576, qu'une association particulière de gentilshommes de Picardie, qui, à l'instigation de Jacques d'Humières, s'engagèrent par serment à défendre la religion catholique, et à combattre l'hérésie calviniste, en faisant au besoin le sacrifice de leurs biens et de leurs vies. Mais d'autres ligues analogues, constituées sur les mêmes bases et

sur le même plan, s'étaient établies simultanément dans toutes les provinces et avaient composé d'intelligence une seule Ligue, qui devint la Sainte-Union des catholiques contre les huguenots.

Voici en quels termes le président de Thou a raconté, dans la grande histoire de son temps, la naissance de la Ligue à Paris : « Un parfumeur, nommé Pierre de la Bruyère et son fils Matthieu, con

[graphic]
[blocks in formation]

seiller au Châtelet, y furent les premiers et les plus zélés prédicateurs de l'Union; et, à leur sollicitation, tout ce qu'il y avoit de débauchés dans cette grande ville, tous les gens qui ne trouvoient que dans la guerre civile une ressource à leur libertinage ou un moyen sûr de satisfaire leur avarice et leur ambition, s'enrôlèrent à l'envi dans cette nouvelle milice. Plusieurs même des plus riches bourgeois, que leur haine pour les protestants aveugloit au point de ne pas voir les dangers auxquels de pareilles associations exposent la tranquillité publique, eurent la faiblesse de se joindre aux séditieux. » La Ligue, qui donnait ainsi l'éveil à toutes les passions démagogiques, n'eut donc aucune action dans les campagnes, mais elle fut bientôt maîtresse absolue des villes et surtout des plus populeuses, où les habitants paisibles n'osaient, malgré leur nombre, tenir tête quelquefois à une poignée de factieux et d'énergumènes. Le roi Henri III lui-même s'était vu forcé d'adhérer au pacte de la Ligue, qui n'avait pas tardé à s'écarter de son but primitif, pour se jeter dans un inextricable chaos de folies et de désordres.

Depuis la journée des Barricades (jeudi 12 mai 1588), qui avait forcé Henri III à sortir de sa capitale en vaincu et en fugitif, depuis la fin tragique du duc Henri de Guise et de son frère le cardinal de Lorraine, massacrés tous deux, par ordre du roi, au château de Blois, pendant les États généraux (23 et 24 décembre de la même année), la Ligue avait changé d'objet, de caractère, et de physionomie : les princes de la maison de Lorraine en étaient toujours les chefs apparents, le roi d'Espagne Philippe II en était l'allié, la cour de Rome en était l'appui, mais il ne s'agissait plus d'étouffer l'hérésie dans le sang de ceux de la religion: toutes les forces de cette grande insurrection populaire se trouvaient dirigées à la fois contre le roi très chrétien qu'on voulait déposséder de sa couronne. Un décret de la Sorbonne avait délié les Français du serment de fidélité à l'égard de leur souverain, en déclarant bons et légitimes tous les moyens à employer pour défendre la religion catholique. Paris était en pleine révolte contre l'autorité royale, et la plupart des villes avaient suivi l'exemple de Paris.

Ce fut alors que Henri III, n'ayant plus autour de lui qu'un simulacre

de cour et d'armée, fit appel à son beau-frère le roi de Navarre et réclama les secours des calvinistes, qui lui pardonnèrent leurs défaites de Jarnac et de Moncontour. Ce n'était qu'une trêve d'une année, en apparence, mais c'était la réconciliation éclatante de Henri de Bourbon avec le roi de France, dont il allait être désormais l'héritier présomptif. Avant cette réconciliation (mars 1589), le roi de Navarre avait adressé aux royalistes catholiques une touchante apologie de sa conduite politique « Plût à Dieu, disait-il, que je n'eusse jamais été capitaine, puisque mon apprentissage devoit se faire aux dépens de la France! Je suis prêt de demander au roi, mon seigneur, la paix, le repos de son royaume, et le mien... On m'a souvent sommé de changer de religion, mais comment? la dague à la gorge... Si vous désirez simplement mon salut, je vous remercie; si vous ne désirez ma conversion que par la crainte que vous avez qu'un jour je ne vous contraigne, vous avez tort! » Ainsi, dès ce moment-là, le roi de Navarre semblait prévoir, sans trop d'effroi, qu'il pourrait bien se voir obligé de changer de religion pour devenir roi de France. Quand Henri III et le roi de Navarre se furent embrassés, au château de Plessis-lez-Tours, en présence d'une nombreuse réunion de catholiques et de calvinistes (30 avril 1589), Henri de Bourbon écrivit à son fidèle serviteur Philippe de Mornay : « La glace a été rompue, non sans nombre d'avertissements que, si j'y allois, j'étois mort; j'ai passé l'eau, en me recommandant à Dieu! » Mornay lui répondit : « Sire, vous avez fait ce que vous deviez et ce que nul ne vous devoit conseiller. >>

La situation désespérée du roi s'améliora tout à coup, et en moins de trois mois, Henri III put avoir l'espérance de prendre sa revanche contre tous ses ennemis et de triompher de la Ligue, qui avait failli le détrôner au profit du roi d'Espagne et de la maison de Lorraine. Dans les derniers jours de juillet, il se voyait à la tête d'une armée de 40,000 hommes et il occupait les hauteurs de Saint-Cloud, avec la certitude de rentrer bientôt en maître dans Paris. Du haut des collines où étaient campées ses troupes impatientes de commencer le siège de la ville rebelle, il regardait avec joie, dans le lointain, ce Paris qui l'avait insolemment chassé dans la journée des Barricades; il prononça, dit

on, ces paroles empreintes d'un profond sentiment de vengeance: << Paris, chef du royaume, mais chef trop gros et trop capricieux! tu as besoin d'une saignée, pour te guérir, ainsi que toute la France, de la frénésie que tu lui communiques! Encore quelques jours, et on ne verra ni tes maisons, ni tes murailles, mais seulement la place où tu auras été. » Le roi de Navarre ne partageait pas ces sentiments et n'avait garde de méditer la destruction de la capitale d'un royaume qui devait tôt ou tard lui appartenir en vertu des droits que lui assurait la loi fondamentale de la monarchie. L'armée royale était divisée en deux camps: les catholiques à Saint-Cloud, les calvinistes à Meudon, mais tous devaient agir en commun, sous la direction de Henri III, qui avait approuvé les plans du roi de Navarre.

Paris se préparait à une résistance formidable, quoique sa garnison fût à peine suffisante pour défendre les positions que le duc de Mayenne avait fait fortifier à la hâte, en élevant des bastions et en creusant des fossés, hors de la vieille enceinte de murailles que les Parisiens avaient laissé tomber en ruines depuis le règne de François Ier. Mayenne, comme chef de l'Union et lieutenant général de l'État et couronne de France, avait convoqué tous les seigneurs et gentilshommes qui avaient prêté serment à la Ligue, mais ces seigneurs et gentilshommes étaient la plupart retenus, dans les provinces, par leurs propres intérêts on ne pouvait guères compter sur leur assistance, du moins immédiate; on comptait davantage sur les troupes espagnoles et napolitaines, que Philippe II envoyait au secours de Paris, bloqué plutôt qu'assiégé. Mais, à défaut de forces militaires, appartenant à l'armée de la Ligue, cette ville avait pour sa défense une population exaltée et fanatisée par les prédicateurs, et une milice bourgeoise qui s'était aguerrie au métier des armes depuis que les guerres civiles avaient changé tous les citoyens en soldats. Il avait fallu, bon gré, mal gré, s'enrôler dans cette milice, pour obéir aux ordres tyranniques de la faction des Seize, qui exerçait dans la capitale une autorité arbitraire et absolue. «Nous sommes maintenant devenus des guerriers désespérés, écrivait à un ami le célèbre Étienne Pasquier, alors avocat général à la chambre des comptes : le jour, nous gardons les portes;

« PreviousContinue »