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puyez sur ces mêmes lois!

Certes, si la nécessité et l'évidence d'une cause primordiale ne sera parfaitement établie que le jour où la science, le compas et la cornue en main, décrira le matin du chaos; du moins ces lois nous les démontrons non-seulement par notre expérience journalière, mais par l'application que nous en faisons, avec une certitude parfaite, aux manifestations les plus mystérieuses, comme les plus immenses de la matière. De même que les lignes, les nombres, les cercles, quelque indéfiniment grands qu'on les conçoive, ne sauraient changer de forme pour se convertir en l'infini proprement dit, sans détruire toutes les données des mathématiques et leurs résultats, ainsi les phénomènes et qualités de la matière ne sauraient changer de nature sans ébranler toutes les sciences empiriques; partout limités, conditionnés, nécessaires; nulle part infinis, éternels, absolus. En admettant donc leur existence comme réelle, nous sommes également forcés d'admettre leur raison d'être comme telle.

XXVI. Hypothèse nécessaire, qui toute fois ne peut pas être regardée comme prouvée par sa nécessité seule; ce serait là un véritable cercle vicieux. L'action et la réalité de cette cause doit ressortir avec évidence de toutes nos idées et de toutes nos connaissances certaines, empiriques et abstraites. Aucune, sérieusement examinée, ne doit se prêter à une conclusion contraire, aucune ne doit produire ou laisser le moindre doute, aucune ne doit lui rester contradictoire. Ce qui n'entraîne pas l'assentiment de la pensée dans tous ses détails, la laisse indecise et ne la persuade point!

Ainsi la preuve définitive, comme la preuve de la nécessité métaphysique d'une cause primordiale, est soumise à la même marche, au même développement que toutes nos autres connaissances; c'est toujours le même cercle s'élargissant sans cesse. Des données empiriques, nous étant élevé aux idées abstraites, nous reconnûmes la tendence vers l'être absolu de quelque chose; revenu aux premières, nous avons dû leur

contester tout caractère absolu, et conclure à la nécessité d'une cause créatrice; laquelle nous ramène à l'expérience, afin de nous convaincre de la justesse de notre induction. Cependant, cette partie de la preuve n'appartient plus à la philosophie, mais à l'étude des connaissances particulières des hommes, à toutes leurs sciences, et en général à l'histoire de leurs faits et gestes. Études nouvelles qui serviront de nouveau de point de départ aux efforts des générations futures, et leur permettront de parcourir la même voie avec plus de succès. de précision, de profondeur.

XXVII. Telle est la nature de la preuve par la philosophie historique. Nous n'avons fait que l'ébaucher dans ses quelques traits principaux. Pour être complète, évidente, absolument vraie, elle devrait présenter la science parfaite du monde et

du

genre humain. Heureusement, la nécessité d'en arriver à ce point résulte de la science telle que nous la possédons aujourd'hui, et, faire voir la nécessité et la vé

rité d'une preuve, c'est en démontrer l'objet

même.

Le sceptique qui objecterait qu'alors encore la pensée ne sort pas du moi pensant, que toutes les connaissances dépendent toujours de la nature humaine, aurait parfaitement raison ce cercle, la philosophie historique, loin de le détruire, ne fait que l'étendre; mais tellement que, du moment qu'il conduirait au doute, ce serait au doute absolu, impossible. La certitude de mon existence implique celle du monde extérieur, toutes deux se posent et ne se prouvent point; autour se groupent un grand nombre de connaissances évidentes et certaines; nier les unes, c'est nier les autres; et ce sont elles qui nous conduisent vers la nécessité d'une cause primitive, vers Dieu.

XXVIII. Dans cette voie simple et large, nous ne rencontrons point d'antinomie que nous ne puissions détruire par des données certaines; nous ne commettons pas de cercle vicieux, n'ayant point considéré le monde et nous-même comme contingents, mais comme

nécessaires; nulle part nous n'avons impliqué l'idée même de l'absolu ou celle de la cause nous nous étions arrêté à l'affirmalion pure et simple d'un besoin vague et inné.

Du reste, cette cause elle-même nous est encore inconnue. Est-elle l'être absolu ? N'engendre-t-elle pas de nombreuses contradictions, en elle-même, dans ses rapports avec la création et dans les attributs que lui accorde la pensée, après avoir une fois reconnu la nécessité de son existence?

Attributs de Dieu.

XXIX. Il y a un triple intelligible divin. Le premier dérive des rapports des principes de connaissance, le second des désirs innés de la faculté d'amour; l'un tend à conclure à l'être infini, éternel, absolu, abstrait, l'autre à l'être souverainement parfait; aucun n'est une preuve de son existence, mais tous. deux nous portent à le concevoir de l'une ou l'autre manière, ou des deux à la fois, comme

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