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« l'unanimité et le commun consentement de tous les mortels. »

Saint Augustin s'exprime comme Arnobe : « A l'exception << d'un petit nombre, en qui la nature est trop dépravée, tout « le genre humain confesse Dieu auteur du monde. »

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« Maxime de Madaure, philosophe païen, écrivait à ce même saint Augustin: « Qu'il y a un Dieu souverain et éternel, le père et l'auteur de toutes les choses. Quel homme est assez « grossier et assez stupide pour le nier? C'est celui dont nous adorons, sous des noms divers, la puissance répandue dans « toutes les parties du monde. Nous, autant de mortels que nous « sommes sur la terre, nous adorons le père commun des dieux « et des hommes par différents cultes, à la vérité, mais qui « s'accordent tous dans la variété même, et ne tendent & qu'à la même fin. » Et saint Augustin répondait à ce philoso« phe Ce seul Dieu dont vous me parlez est certainement « celui qui est reconnu dans tout l'univers, et sur lequel, « comme l'ont dit les anciens, les ignorants s'accordent avec « les savants. »

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« Maxime se trompait sans doute, et son culte des dieux était une erreur. Mais il attestait du moins, comme saint Augustin l'attestait lui-même, la croyance générale d'un Dieu unique, dont la notion est commune à tous les peuples. On convient que la notion du VRAI DIEU n'a jamais été aussi distincte, aussi pure, aussi parfaite chez les païens que chez les patriarches, les Juifs et les chrétiens. Mais il n'en est pas moins vrai que, quoique altérée par les superstitions de l'idolâtrie, elle se trouve partout, et que les gentils, encore qu'ils aient adoré les idoles, ont cependant connu et confessé le Dieu souverain, père et auteur de toutes choses, comme l'a dit le confesseur Saturnin au concile de Carthage de l'an 258; Gentiles, quamvis idola colant, tamen summum Deum patrem et creatorem omnium cognoscunt et confitentur (Théolog. dogm., t. I, p. 318 et suiv.). ›

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On trouve aussi, dans le même ouvrage du savant Monseigneur Gousset, ces deux remarques qui se rapportent à la même doctrine:

« L'existence des bons et des mauvais anges est un des dogmes de la révélation primitive, une croyance qui, transmise par les patriarches, s'est répandue dans toutes les parties de la terre. Bossuet dit : « Quand je vois, dans les Prophètes, dans l'Apoca

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lypse et dans l'Evangile même, cet ange des Perses, des Grecs, « des Juifs, des petits enfants, et, parmi tous ces anges, celui

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qui met sur l'autel le reste d'encens de la prière, je reconnais « dans ces paroles une espèce de médiation des saints anges; je « vois même le SENTIMENT qui a pu donner occasion aux païens « de distribuer leurs divinités dans les éléments et dans les « royaumes, pour y présider. Car TOUTE ERReur est fondÉE « SUR QUELQUE VÉRITÉ DONT ON ABUSE. >>

« Nous avons une preuve de la révélation primitive dans les croyances de tous les peuples; tous l'ont reconnue en principe, en admettant, comme venant de Dieu, les principales vérités de la religion; même celles de l'ordre surnaturel. >>

Il serait facile de prouver, par les cours de théologie les plus suivis dans les séminaires et les communautés religieuses, par les noms illustres de l'Église de France, que la doctrine qui a donné lieu à la présente note est assez généralement admise par le clergé français, et quelquefois même dépassée sur ce qui regarde la connaissance de Dieu. Dans la Théologie de Bailly, qu'on enseigne dans beaucoup de séminaires de France, on lit ces paroles: Populi omnes admisserunt pluralitatem deorum inferiorum, et SUPREMO NUMINI subordinatorum; CONCEDO; pluralitatem deorum æqualium et independentium; NEGO. Apud gentiles et paganos, non quidem ab omnibus omnino hominibus, sed COMMUNITER, CREDITUM EST UNUM ESSE DEUM SUPREMUM, OPTIMUM, MAXIMUM, PATREM DEORUM ATQUE HOMINUM, ut multis gravissimisque monumentis facile adstrui potest.... Igitur ethnici deos quidem coluerunt innumerabiles... séd illos DEO UNI et supremo subordinatos plerique vel FORTE OMNES, rudioribus exceptis, arbitrabantur ( Tom. I, tract. de Deo, cap. 4).

Bouvier, Lieberman, Ubagbs, tous adoptés par les séminaires, s'accordent sur ce point avec Bailly. Parmi les docteurs on pourrait citer des hommes l'honneur de l'Église gallicane, la Luzerne, Hooke, Petau, Thomassin, et le savant évêque d'Avranches. Bossuet a dit aussi : « C'est ignorer les premiers principes de << la théologie, que de ne pas vouloir entendre que les païens << adoraient tous LE VRAI DIEU comme les autres (Lettre à Brisac).

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Mais il suffit de rappeler que les évêques de France, dans la

fameuse censure qu'ils rédigèrent, l'année 1832, contre les doctrines d'un auteur célèbre, tout en condamnant, comme de raison, l'abus que cet auteur avait fait des croyances traditionnelles des peuples, n'ont pu s'empêcher de rendre hommage à la doctrine communément suivie touchant la révélation primitive; car voici leurs paroles: Libenter agnoscimus, cum doctioribus religionis apologistis, vestigia PRIMITIVÆ REVELATIONIS circa veritates quæ BASIS ET FUNDAMENTA SUNT RELIGIONIS ET MORUM in variorum traditionibus populorum reprehendi (Censura, etc., Observat. 2, pag. 40.)

NOTE B (Page 53).

« C'est donner à la raison plus qu'il ne lui appartient, que de lui attribuer la connaissance de Dieu par voie de démonstration. Dieu est connu de tous, avant toute démonstration, et nul ne cherche à s'en démontrer l'existence avant d'en avoir l'idée, avant d'en avoir entendu prononcer le nom, et l'affirmation, des milliers de fois. La connaissance a donc précédé la démonstration, comme la religion a précédé la philosophie. Ce ne sont pas les philosophes qui ont introduit dans le monde le nom et la notion de Dieu, ils l'ont trouvée tout existante.

«Mais il est vrai, il est de foi que la raison, TELLE QU'ELLE EST, et non amoindrie de tout ce qu'elle a reçu de la société au milieu de laquelle elle a été formée, peut parfaitement démontrer la vérité de cette afirmation de l'existence de Dieu, que l'humanité a conservée, en le nommant toujours, depuis l'origine du monde. Cette affirmation est un fait visible, aussi constant que le soleil, les astres, et tout le spectacle du monde visible. Elle fait partie des témoignages que Dieu nous a donnés pour être toujours à même de reconnaître son existence, sa providence et ses perfections. Quand saint Paul a dit que « les « choses invisibles de Dieu, sa puissance et son éternité, se révè« lent à nos yeux et à notre raison dans les choses visibles de «< ce monde; » assurément il l'a dit de notre raison telle qu'elle est, avec toutes les idées qu'elle possède et qui sont dans le langage de tous; et nul n'oserait sans doute prétendre qu'il a, en parlant ainsi, fait abstraction de la révélation, de la communication primitive et de la conservation traditionnelle des

mots qui nomment Dieu et ses perfections, et des idées qui sont renfermées dans ces mots.

« L'univers a toujours cru à la Divinité, à la vertu, au mal, à la responsabilité morale de l'homme; et il a toujours DIT qu'il y croyait, il a toujours prouvé qu'il y croyait, par l'ensemble des faits sociaux et religieux qu'on trouve partout et dans tous les temps. Toujours ainsi il a pu reconnaître la vérité et la parfaite rationabilité (qu'on me passe le mot) des affirmations traditionnelles qui sont renfermées dans ces expressions. L'affirmation d'un Dieu créateur, infiniment puissant, sage et bon, lui a toujours expliqué seule et le monde physique et le monde moral et le monde purement intellectuel, comme l'observation et la contemplation de l'ordre physique et de tous les phénomènes qui se manifestent dans la raison, dans l'âme humaine, a toujours suffi pour lui faire reconnaître l'évidente, la nécessaire vérité de l'affirmation qui les rapporte à une cause créatrice, infiniment puissante, intelligente et bonne. La cause et l'effet, toujours en présence de l'intelligence humaine, l'une par une affirmation subsistante, déposée en elle dès l'origine et transmise par la tradition de l'éducation, l'autre visible par les yeux du corps ou par le sens intime, n'ont pas cessé et ne cesseront jamais de se rendre l'une à l'autre un témoignage dont la raison ne pourrait contester la puissance et la valeur sans se renier ellemême, et sans se contredire dans toutes les lois qui président à ses pensées. La distance infinie qui sépare le créé et le fini de l'infini et de l'incréé, l'homme de Dieu, a été comblée par cette admirable invention de la Sagesse suprême, qui s'est comme créée elle-même et incarnée, ou, si l'on veut, exprimée, dans la parole, dans l'affirmation de son existence, et qui est venue se déposer, s'imprimer d'une manière ineffaçable dans la raison humaine, s'identifier avee elle, et allumer dans ce sanctuaire mystérieux un flambeau dont la lumière rejaillit sur toutes les vérités et tous les êtres. C'est ce que l'apôtre saint Pierre appelle divinement lucerna lucens in caliginoso loco (Lettre de Monseigneur de Montauban à M. Bonnetty).

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DEUXIÈME CONFÉRENCE.

LA RAISON CATHOLIQUE DES SIÈCLES CHRÉTIENS.

1.

Beati qui audiunt verbum Dei, et custodiunt illud.

Heureux ceux qui entendent la parole de Dieu, et la gardent.

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(Évangile du 3o dimanche de carême.)

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'ÉVANGILE de JÉSUS-CHRIST ne peut pas mieux etre interprété que par l'Évangile.

Voulez-vous donc savoir pourquoi, dans l'évangile d'aujourd'hui, JÉSUS-CHRIST appelle heureux ceux qui entendent la parole de Dieu, et la gardent : Beati qui audiunt verbum Dei, et custodiunt illud? C'est parce que, comme il l'a dit lui-même dans un autre évangile, « l'homme ne vit pas seulement de pain, mais aussi de toute parole qui sort de la bouche de Dieu; Non in solo pane vivit homo, sed in omni verbo quod procedit de ore Dei (Matth. IV, 4). C'est-à-dire, parce que, comme la nourriture maintient la vie naturelle, la parole de Dieu ou la vérité maintient la vie intellectuelle.

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Il est donc évident par là, M. F., que tout sys

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