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SUR LA RAISON PHILOSOPHIQUE

ET LA RAISON CATHOLIQUE.

PREMIÈRE CONFÉRENCE.

LA RAISON PHILOSOPHIQUE CHEZ LES ANCIENS.

E

Et vox de nube dicens: Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi benè complacui; ipsum audite.

Et une voix se fit entendre du ciel: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je me suis toujours plu; n'écoutez que lui.

(Évangile du 2o dimanche de carême. )

1. Ce n'est pas ainsi que parle la terre. Cette mer

partie vraiment du ciel; Et vox de nube dicens. Celui qui se plaît dans son Évangile à s'appeler le Fils de l'homme est aussi le Fils bien-aimé, le Fils consubstantiel de Dieu, l'objet des jouissances éternelles de Dieu, et Dieu lui-même; Hic est Filius meus dilectus. Jésus-Christ, notre unique sauveur, est

aussi notre unique maître; nous devons l'écouter; Ipsum audite.

Mais, hélas! aujourd'hui, M. T. C. F., on dirait que, parmi les peuples chrétiens eux-mêmes tout ce qui a de l'intelligence, de la science, de l'esprit, à des exceptions près, paraît avoir honte de l'enseignement de ce Fils de Dieu, et lui préfère l'enseignement des fils des hommes; il préfère la raison philosophique à la raison catholique et dès lors que voyons-nous, M. F.? Ah! vous ne le savez que trop, toutes les idées sont confondues, tous les principes sont oubliés, toutes les vérités sont foulées aux pieds pour faire place à toutes les erreurs, à toutes les aberrations, à tous les délires de la raison humaine. Tout est vrai, excepté la vérité; tout est vertueux, excepté la vertu; tout est honorable, excepté l'honneur; les doctrines spirituelles et morales ont perdu tout leur prix et toute leur importance: le doute est devenu philosophie comme l'égoïsme est devenu justice, l'intérêt est devenu loi, l'anarchie est devenue gouvernement, et l'athéisme est devenu religion.

Rien donc n'importe plus, rien ne presse plus, dans la triste condition où nous nous trouvons, que de combattre ce désordre de l'ordre intellectuel qui a amoncelé tant de ruines dans l'ordre politique, et qui menace d'en amener de plus grandes encore dans l'ordre social.

C'est pour cela que, appelé à remplacer celui

dont la voix est si éloquente et si élevée (1), dans les conférences religieuses qui ont eu lieu ici tous les ans, je crois n'avoir rien de mieux à faire que de vous exposer, dans toute leur vérité, les principes, les progrès, les conséquences de la raison philosophique et de la raison catholique dans leur rapport avec la religion.

Aujourd'hui, je ne m'arrêterai qu'à la raison philosophique des temps anciens; c'est dans les prochaines conférences que je m'occuperai de la raison catholique et de la raison philosophique des temps modernes, et, dans la suite, de la manière dont l'une et l'autre a envisagé les principaux points du christianisme; afin que, convaincus de la vanité, de la misère, du danger de la raison philosophique, qui promet toute vérité et n'aboutit qu'à l'erreur, nous choisissions, pour notre part, la raison catholique, qui seule a le bonheur d'éviter l'erreur, de posséder la vérité, parce qu'elle se fonde avant tout sur l'enseignement et les doctrines de J. C.; Ipsum audite. C'est, M. T. C. F., le sujet de mes conférences et de celle d'aujourd'hui.

2. Venu dans cette grande capitale uniquement

(1) Le savant et zélé M. l'abbé Deguerry, curé de la Madeleine, qui le premier a introduit et prêché depuis quelques années le cours de ces conférences pour les hommes à l'église de l'Assomption, appartenant à la même paroisse de la Madeleine.

pour des affaires, je n'avais pas la moindre intention d'aborder la chaire sacrée, sentant bien tout ce qu'il y a de difficultés, pour un étranger habitant depuis peu votre pays, à parler en public dans votre belle langue, si chatouilleuse et si délicate. Mais d'honorables et vénérées instances m'ont rassuré; et j'espère que vous, bons habitants de Paris, ne serez pas moins indulgents que les habitants du Midi pour l'Italien qui a peut-être aimé le plus la France et les Français.

J'espère que vous voudrez bien lui pardonner le défaut de forme, grâce à l'importance du sujet. J'espère que, me trouvant assez zélé pour votre salut, assez chrétien, assez catholique, vous me trouverez, par cela même, assez Français.

Divin Sauveur, dont le Père éternel aujourd'hui nous fait une obligation de suivre les enseignements, répandez sur moi et sur cet auditoire chrétien la lumière et la puissance de cette grâce qui donne l'intelligence de vos mystères et de vos lois, afin que tous nous nous affermissions toujours davantage dans votre sainte Religion, source unique de toute vérité, de toute vertu, de toute espérance, de toute consolation et de tout bonheur.

Bénissez cette prédication que j'entreprends au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, à la gloire de vos doctrines, en l'honneur de votre Église, à l'édification de votre peuple. Accordez-nous cette

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