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(4) Cette danse, la plus déréglée de toutes, s'appeloit en grec cordax, parceque l'on s'y servoit d'une corde pour faire des postures. ( La Bruyère.) Cette étymologie est inadmissible, car le terme grec d'où nous vient le mot de corde commence par une autre lettre que le mot cordax, s'emploie que pour des cordes de boyau, telles que celles de la lyre et de l'arc. Casaubon n'a cru que le cordax se dansoit avec une corde, que parceque Aristophane dit quelque part cordacem trahere, et peut-être parcequ'il se rappeloit que dans les Adelphes de Térence, acte IV, Sc. VII, Demea demande : Tu inter eas restim ductans saltabis? Mais quoique dans cette phrase la corde soit expressément nommée, Donatus pense qu'il n'y est question que de se donner la main; et c'est aussi tout ce qu'on peut conclure de l'expression d'Aristophane au sujet du cordax. M. Visconti, auquel je dois cette observation, s'en sert dans un Mémoire inédit sur le bas-relief des danseuses de la villa Borghèse pour éclaircir le passage célébre de Tite - Live, Liv. XXVII, chap. XXXVII, où, en parlant d'une danse sacrée, cet auteur se sert de l'expression restim dare.

(5) Choses fort extraordinaires, telles qu'on en voit dans nos foires. (La Bruyère.).

(6) Le savant Coray a observé avec raison qu'il faut ajouter une négation à cette phrase. Je traduis : « A ceux

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qui n'ont point de billet, et veulent jouir du spectacle gratis.» Il est question ici de farces jouées en pleine rue, et dont, par conséquent, sans la précaution de distribuer

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des billets à ceux qui ont payé, et d'employer quelqu un à quereller ceux qui n'en ont pas, tout le monde peut jouir. Cette observation, qui n'avoit pas encore été faite, contredit l'induction que le savant auteur du Voyage du jeune Anacharsis a tirée de ce passage dans le chap. LXX de cet ouvrage.

(7) La Bruyère désigne ordinairement par ce mot les riches financiers; ici il n'est question que d'un simple commis au port, ou de quelque autre employé subalterne de la ferme d'Athènes.

(8) Joueur de dés. Aristote donne une raison assez dẻlicate du mal qu'il trouve dans un jeu intéressé : « On y << gagne, dit-il, l'argent de ses amis, envers lesquels on << doit au contraire se conduire avec générosité. »

(9) La loi de Solon, qui n'étoit en cela que la sanction de la loi de la nature et du sentiment, ordonnoit de nourrir ses parents sous peine d'infamie.

(10) Cette circonstance est ajoutée par la Bruyère; Théophraste ne parle que de l'impudence qu'il y a à con tinuer une harangue dans les rues, quoique personne n'y fasse attention, et que chaque phrase s'adresse à un public différent.

(11) Une petite boîte de cuivre fort légère, où les plaideurs mettoient leurs titres et les pièces de leurs procès. (La Bruyère.) C'étoit au contraire un grand vase de cuivre ou de terre cuite, placé sur la table des juges pour y dé

poser les pièces qu'on leur soumettoit; et Théophraste ne se sert ici de ce terme que pour plaisanter sur l'énorme quantité de papiers dont se chargent ces chicaneurs. (Voyez le scol. d'Aristophane, Vesp. 1427, et la scolie sur ce passage de Théophraste donnée par Fischer.)

(12) Ici le mot grec dont j'ai déja parlé dans la note 2 ne peut avoir d'autre signification que celle des petits marchands de comestibles auxquels l'effronté prête de l'argent, et chez lesquels il va ensuite en retirer les intérêts, en mettant cet argent dans la bouche, comme c'étoit l'usage parmi le bas peuple d'Athènes. Casaubon avoit fait sur ce dernier point une note aussi juste qu'érudite, et La Bruyère n'auroit pas dû s'écarter de l'expli. cation de ce savant.

(13) Une obole étoit la sixième partie d'une drachme. (La Bruyère.) L'effronté prend donc un quart du capital par jour. (Voyez sur l'usure d'Athènes le Voyage dis jeune Anacharsis, chap. LV.)

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CHAPITRE VII.

DU GRAND PARLEUR (1).

Ce que quelques uns appellent babil est proprement une intempérance de langue qui ne permet pas à un homme de se taire (2). Vous ne contez pas la chose comme elle est, dira quelqu'un de ces grands parleurs à quiconque veut l'entretenir de quelque affaire que ce soit : j'ai tout su; et si vous vous donnez la patience de m'écouter, je vous apprendrai tout. Et si cet autre continue de parler, Vous avez déja dit cela (3); songez, poursuit-il, à ne rien oublier. Fort bien; cela est ainsi, car vous m'avez heureusement remis dans le fait; voyez ce que c'est que de s'entendre les uns les autres. Et ensuite: Mais que veux-je dire? ah! j'oubliois une chose: oui, c'est cela même, et je voulois voir si vous tomberiez juste dans tout ce que j'en ai appris. C'est par telles ou semblables interruptions qu'il ne donne pas le loisir à celui qui lui parle de respirer; et

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lorsqu'il a comme assassiné de son babil chacun de ceux qui ont voulu lier avec lui quelque entretien, il va se jeter dans un cercle de personnes graves qui traitent ensemble de choses sérieuses, et les met en fuite. De là il entre dans les écoles publiques et dans les lieux des exercices (4), où il amuse les maîtres par de vains discours, et empêche la jeunesse de profiter de leurs leçons. S'il échappe à quelqu'un de dire, Je m'en vais, celui-ci se met à le suivre, et il ne l'abandonne point qu'il ne l'ait remis jusque dans sa maison (5). Si par hasard il a appris ce qui aura été dit dans une assemblée de ville, il court dans le même temps le divulguer. Il s'étend merveilleusement sur la fameuse bataille qui s'est donnée sous le gouvernement, de l'orateur Aristophon (6), comme sur le combat célébre que ceux de Lacédémone ont livré aux Athéniens, sous la conduite de Lysandre (7). Il raconte une autre fois quels applaudissements a eus un discours qu'il a fait dans le public, en répéte une grande partie, mêle dans ce récit ennuyeux des invectives contre le peuple; pendant que de ceux qui l'écoutent, les uns s'endorment, les autres le quittent, et que nul ne se ressouvient d'un seul mot

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