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nom. Son régne fut fort court, & fon autorité fut mal établie dans l'armée & dans les provinces. Ce qui l'empécha de la perdre tout-à-fait fut qu'Achéus fon coufin, fils d'Andromaque frere de fa mere, homme de cœur & de tête, prit le maniement de fes affaires réduites à un fort trif te état par la mauvaise conduite de fon pere. Pour Andromaque, il fut pris par Ptolémée dans les guerres qu'il eut avec Callinicus, & retenu prifonnier à Alexandrie pendant tout fon régne, & une partie du fuivant. Attale, roi de Pergame, s'étant AN.M.3780. faifi de toute l'Afie Mineure, depuis Av.J.C.224 le mont Taurus jufqu'à l'Hellefpont, Séleucus marcha contre lui, & laissa la Régence de la Syrie à Hermias Carien. Achéus l'accompagna dans cette expédition, & lui rendit tous les fervices que le méchant état de fes affaires lui put permettre.

Comme il n'y avoit point d'argent AN.M.3781. pour paier l'armée, & que la foibleffe Av.J.C.223. du Roi le faifoit méprifer des foldats, Nicanor & Apaturius, deux des premiers Officiers, firent une confpiration contre lui pendant qu'il étoit dans la Phrygie, & l'empoifonnérent.

Achéus vengea fa mort. Il en fit mourir les deux principaux auteurs, & tous ceux qui y avoient trempé avec eux. Il ménagea enfuite l'armée avec tant de prudence & de réfolution, qu'il la retint dans le devoir, & empécha Attale de profiter des avantatages que lui donnoit cet accident qui, fans fa bonne conduite, auroit fait perdre à l'Empire de Syrie tout ce qui lui reftoit de ce côté-là.

Séleucus étant mort fans enfans l'armée offrit la Couronne à Achéus :

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plufieurs des provinces en firent autant. Il fut affez généreux pour la refufer alors, quoique dans la fuite il fe crut forcé d'en ufer autrement. Dans la conjoncture préfente, non feulement il n'accepta pas la Couronne, mais il la conferva foigneufement à l'héritier légitime, Antiochus frere du défunt Roi, qui n'étoit que dans fa quinziéme année. Séleucus, en par-tant pour l'Afie Mineure, l'avoit envoié en Babylonie * pour fon éducation. Il y étoit quand fon frere mourut, On le fit venir de là à Antioche, où

* A Séleucie, qui étoit dans cette province, & la capitale de l'Orient an lien

de Babylone, qui ne sub-. fiftoit plus on du moins étoit déferte.

il monta fur le trône, & le remplit pendant trente-fix ans. A caufe de fes grandes actions, on lui a donné le furnom de Grand. Achéus, pour lui affurer la fucceffion, fit un détachement de l'armée qu'il lui envoia en Syrie, avec Epigene, un des plus habiles Généraux du feu Roi. Il garda le refte pour les befoins de l'Etat du côté où lui-même se trouvoit.

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Polyb. lib. 5.

Dès qu'Antiochus eut pris poffef- AN. M. 3788. fion de la Couronne, il envoia en Av.J.C. 122. Orient deux freres, Molon & Ale-pag. 386. xandre : le premier pour gouverner la Médie, & le fecond la Perfe. Achéus fut chargé des provinces de l'Afie Mineure. Epigéne eut le commandement des troupes qu'on tint auprès de la perfonne du Roi, & Hermias le Carien fut déclaré fon premier Miniftre, comme il l'avoit été fous fon frere. Achéus reprit bientôt tout ce qu'Attale avoit enlevé à l'Empire de Syrie, & l'obligea à fe réduire à fon roiaume de Pergame. Alexandre & Molon, méprifant la jeunesse du Roi, ne furent pas plutôt affermis dans leurs Gouvernemens, qu'ils ne voulurent plus le reconnoitre, & chacun d'eux fe rendit

Souverain dans la province qui lui avoit été confiée. Les fujets de mécontentement qu'Hermias leur avoit donnés contribuérent beaucoup à leur revolte.

Ce Miniftre étoit dur. Des plus petites fautes, il en faifoit des crimes, & les puniffoit avec la derniére rigueur. C'étoit un petit efprit, mais fier, plein de lui-même, attaché à fon fentiment, & qui auroit cru fe deshonorer s'il eût demandé ou fuivi confeil. Il ne pouvoit fouffrir que perfonne partageât avec lui le crédit & l'autorité. Tout mérite lui étoit fufpect, ou, pour mieux dire, lui étoit odieux. Il en vouloit fur tout à Epigéne, qui paffoit pour un des Capitaines de fon tems les plus habiles, & en qui les troupes avoient une entiére confiance. C'étoit cette réputation même qui faifoit ombrage au Minis tre, & il ne pouvoit diffimuler fa mauvaise volonté à fon égard. AN.M.3783- Antiochus avoit assemblé son ConAv.J C.221. feil au fujet de la revolte de Molon, pag.386-395 pour favoir quel parti il devoit prendre, & s'il étoit néceffaire qu'il marchât lui-même contre ce rebelle, ou s'il devoit tourner du côté de la Célé

Polyb. lib. 5

Syrie pour arréter les entreprifes de Ptolémée. Epigéne parla le premier, & dit qu'il n'y avoit point de tems à perdre que le Roi devoit incesfamment fe tranfporter en perfonne dans l'Orient, afin de profiter des momens & des occafions favorables pour agir contre les révoltés: que, quand il y feroit, ou Molon n'auroit pas la hardieffe de remuer fous les yeux de fon Prince & d'une armée ; ou, s'il perfiftoit dans fon deffein, les peuples, touchés de la présence de leur Prince, & réveillant feur zêle & leur affection pour fon fervice, ne manqueroient pas de le lui livrer bientôt. Mais que l'important étoit de ne lui point laiffer le tems de fe fortifier. Hermias ne put s'empêcher de l'interrompre, & avec un ton d'aigreur & de fuffifanil dit que de faire marcher le Roi contre Molon avec fi peu de troupes, c'étoit livrer fa perfonne entre les mains des révoltés. Sa véritable raison étoit la crainte qu'il avoit de courrir les rifques de cette expédition. Ptolémée étoit pour lui beaucoup moins, redoutable. On pouvoit, fans rien craindre, attaquer un Prince qui ne s'occupoit que de plaifirs. L'avis

ce,

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