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Se mêler aussi du métier.

Ses pareils, fourrés de malice,

En toute occasion font niche au genre humain.
Le voilà donc en exercice,

Assis, et le tranchet en main,
Qui du cuir fait mainte aiguillette,
Puis s'enfuit après un tel tour.
L'artisan, chez lui de retour,

Ne croyait pas trouver cette besogne faite.
A l'œuvre on connaît l'ouvrier;

Et Bertrand seul dans son quartier
Est capable du fait telle est sa conjecture.
Il n'est besoin, dit-il, de courir au devin;
C'est toi, singe maudit, ah! de par saint Crépin,
Tu le payeras et dans peu, je le jure,
Ou bien j'y perdrai mon latin.
L'occasion fut peu de temps à naître.
Après quelques instants, ayant vu reparaître
Le magot, dont les yeux étaient sur lui fixés,
Alors notre savetier George

Se passe plusieurs fois le tranchet sur la gorge, Mais par le dos, cela s'entend assez,

Puis s'absente à dessein. Le singe eut la manie De répéter cette cérémonie.

Un vaurien quelquefois se prend au trébuchet: D'un autre sens que George il tourna le tranchet, Ainsi finit la comédie.

RÉFLEXIONS

SUR

L'APPLICATION DE LA LOI RELATIVE AU VAGABONDAGE,

PAR M. HOMBERG.

MESSIEURS,

L'étude, approfondie que j'ai faite de la question du vagabondage m'a suggéré, sur l'application de la loi du 5 juin 1875, quelques réflexions que je désire vous soumettre.

Les avantages de l'emprisonnement cellulaire ne sont plus à discuter. Personne ne les conteste. Seulement, à côté de ces avantages, il existe des inconvénients également certains et c'est la balance entre ces avantages et ces inconvénients qui a fait si longtemps hésiter sur la question que vient de trancher la loi de 1875.

L'incarcération étant une peine appliquée indistinc

tement à tous les délinquants, quelque soit la classe de la population à laquelle ils appartiennent, quelque soit aussi leur tempérament physique et moral, les conséquences de l'isolement ne pourront être les mêmes pour chacun d'eux. A l'égard des uns, il sera un adoucissement; à l'égard des autres, une aggravation.

Tant que cette aggravation ne dépassera pas certaines limites, il n'y aura pas lieu de s'en émouvoir. Plus la peine aura été difficile à supporter, plus elle fera craindre la récidive; mais une condamnation à l'emprisonnement n'est pas une condamnation à mort, et, si l'isolement devait amener le suicide ou la folie, il dépasserait le but que doit se proposer la justice répressive.

Hé bien ! je vous prie de vouloir bien réfléchir sur les conséquences de l'incarcération dans certaines circonstances.

Un homme, riche ou pauvre, mais domicilié, est entouré d'une famille au sein de laquelle il trouve les jouissances du cœur. C'est peut-être par un excès de tendresse pour son épouse, pour ses enfants, afin d'augmenter leur bien être ou de les sauver de la misère, qu'il s'est rendu coupable.

Il va être arraché à ces objets de son affection que, peut être, son travail fesait vivre et que son absence laissera sans soutien et sans moyens d'existence.

Jusqu'à ce jour, il jouissait de l'estime publique, ses affaires prospéraient. Tout à coup, il se voit flétri et ruiné; son chagrin est voisin du désespoir. Si, avec ses sombres idées, vous l'enfermez, vous l'isolez; si vous ne lui accordez pas, je pourrais dire: vous ne lui imposez pas les distractions forcées de la

vie en commun, n'avez-vous pas à craindre pour lui ce tetanos moral qu'entraîne l'excès de la douleur?

On le redoute et ce n'est peut-être pas sans raison. A côté de l'homme domicilié, plaçons le vagabond. Celui-ci ne rompt aucun lien, ne dit adieu à personne en entrant en prison.

Ses parents l'ont abandonné; des amis, il n'en a pas. Il ne connaît même pas ces relations de voisinage et de compagnonage que lui auraient donné un domicile fixe et régulier; l'opinion publique lui est indifférente, les jouissances du cœur et de l'esprit lui sont étrangères.

Pour vivre sans travailler, il s'est habitué aux plus dures privations. Se nourrrissant de fragments de légumes ramassés au coin des bornes. couchant dans des escaliers ou sur le pavé des rues, grelottant l'hiver sous de sales vêtements de toile, dévoré par la vermine..., le régime de la prison lui donnera un bien-être relatif.

Prendre un bain, se vêtir de laine, être chauffé l'hiver, coucher dans un lit, manger de la soupe, toutes ces choses, qu'il n'a pas au dehors, sont pour lui des jouissances qui lui font se résigner aisément à la privation de sa liberté; d'autant plus aisément que le sentiment qui nous fait aimer à nous sentir libres, à jouir des beaux spectacles de la nature demande une certaine éducation de l'esprit, une certaine élévation du cœur que le vagabond ne connaît pas.

Les vagabonds supporteront aisément la cellule, et la cellule les punira, tandis que l'emprisonnement en commun les punit si peu qu'on les voit souvent com

mettre un délit et se faire arrêter volontairement pour entrer en prison.

J'ai constaté que plus de la moitié des condamnés pour rupture de ban s'étaient présentés aux gendarmes ou aux agents de police demandant l'abri de la prison.

La cellule aurait pour les vagabonds, dont le principal défaut est la paresse, cet autre avantage qu'elle leur ferait aimer le travail, le travail devenant pour eux une distraction dans laquelle ils peuvent trouver un remède à l'ennui de la solitude.

L'exécution de la loi de 1815, qui a décrété d'une manière générale l'emprisonnement cellulaire, présente, et présentera bien longtemps encore, de grandes difficultés.

Bien du temps se passera avant que toutes nos prisons soient transformées en prisons cellulaires. Le fussent-elles, elles seraient insuffisantes pour le nombre des détenus qu'actuellement elles renferment, et il en faudra construire de nouvelles. Il en serait autrement si une certaine classe de prisonniers seulement était mise en cellule, les autres restant en commun.

La nécessité s'impose donc d'une distinction, d'une classification à faire pour un provisoire, qui durera de longues années, s'il ne devient pas définitif.

Déjà la classification entre les détenus a été un progrès de la science pénitentiaire.

Il n'est personne qui n'ait applaudi aux séparations opérées entre les prévenus et les condamnés, entre les hommes et les femmes, entre les enfants et les adultes. Ce serait un nouveau progrès, si, dans cha

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