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ques dixièmes de degrès sur celui du côté sain. La différence variait de 2 à 5 dixièmes.

Le vingt-unième jour, la ligature tombait sans que l'hémorrhagie se fut reproduite et sans accident imputable à l'opération. Le malade s'était ranimé peu à peu; au bout d'un mois il était convalescent et se levait.

Deux mois après il pouvait aller et venir, et se disait guéri. On eût pu le croire si déjà des glanglions nouveaux ne s'étaient manifestés sur toute la hauteur du cou aussi bien à droite qu'à gauche. Il en vint bientôt dans les creux sus-claviculaires et axillaires, partout enfin, même dans les aines. Le malade avait l'aspect des leucémiques décrits par Wirchow. Toutefois, il ne présentait aucun développement du côté du foie ni de la rate qui pût donner le change. En réalité, le sujet était sous l'influence d'une diathèse cancéreuse portant spécialement sur les ganglions extérieurs. Le cancer ne reparut ni à la langue ni à l'intérieur du corps.

M. X... est allé s'affaiblissant. Il a succombé à un épuisement progressif le 19 mai de cette année, par conséquent onze mois et quatre jours après une opération redoutable qui avait cependant permis à la vie de se continuer pendant tout ce temps sans troubles physiologiques. Les lésions pathologiques observées ont été uniquement causées par la diathèse cancéreuse qui l'a emporté.

Les recherches que j'ai faites pour m'éclairer avant de tirer des conclusions pratiques de ce fait assez rare, ne m'ont pas fourni beaucoup de renseigne

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ments; je n'ai trouvé que deux ou trois observations qui puissent être mises en regard de celle-ci :

Le première est due à Hebenstein (Chirurgie de Bell 1). Cet auteur fait mention d'un cas dans lequel l'artère carotide, blessée pendant l'extirpation d'une tumeur cancéreuse, fut liée avec succès.

La seconde appartient à Fleming; ce chirurgien fit aussi avec succès, le 17 octobre 1803, la ligature de la carotide primitive dans un cas de tentative de suicide.

Abernethy la répéta en 1804 sur un malade qui avait eu la carotide ouverte par un coup de corne. Le malade mourut après trente heures avec des accidents cérébraux (Edimbourg médical, t. I.).

La même année, un chirurgien français, Dubois, se proposait d'appliquer, pour la première fois, ce mode de traitement à la cure d'un anévrisme, mais le malade mourut la veille de l'opération.

En 1805, Astley Cooper la pratiqua dans les conditions signalées dans l'observation de Dubois; mais, le septième jour de l'opération, une hémiplégie se déclara du côté gauche, et la mort survint le vingtunième jour (London médical, t. I.).

Il répéta sa tentative en 1808. Il attaqua un anévrisme de la carotide, à l'aide d'une double ligature la tumeur. Le

placée au-dessus et au-dessous de malade guérit.

En France, les observations publiées sont peu nombreuses; celles qui ont été pratiquées ont toujours été dirigées contre des anévrismes. Sur quaranteune observations, on cite vingt-un cas de mort (plus de la moitié); cinq ont été produits par une hémi

plégie consécutive, développée du côté opposé; quatre malades ont succombé à des complications thoraciques, les autres ont été victimes des accidents qu'entraînent trop souvent les traumatismes graves.

Comme conclusion, je dirai que cette opération peut être tentée... quand tous les moyens de prévenir le retour d'une hémorrhagie, fatalement mortelle, font complétement défaut. Les résultats obtenus par les chirurgiens qui ont pratiqué cette ligature dans des cas désespérés l'autorisent au point de vue de la science et de l'humanité.

DE L'ALCOOLISME

EN NORMANDIE,

PAR M. LE Dr FOVILLE.

MESSIEURS,

Une compagnie, émule de la nôtre, la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, avait récemment à formuler le programme d'un prix nouveau, mis à sa disposition par la libéralité testamentaire d'un honorable médecin principal des armées, M. le Dr Pingrenon. Le travail couronné devait être un ouvrage d'hygiène ou de médecine relatif à la ville de Lille. La Société crut devoir laisser le choix du sujet à la discrétion des concurrents; toutefois, elle indiqua deux questions comme devant fixer plus particulièrement leur attention; celle de l'Alcoolisme et celle de la Mortalité des enfants nouveau-nés.

Ce sont là, en effet, deux questions sociales d'un intérêt dominant, et dont l'importance doit frapper tous les esprits soucieux de la grandeur de leur pays.

A une époque où l'on proclame de toutes parts

l'infériorité résultant pour la France de la lenteur d'accroissement de sa population, comparée à la rapidité avec laquelle se multiplient les races Germanique et Anglo-Saxonne, y a-t-il une étude plus essentielle que celle des causes qui empêchent la population de s'accroître.

Et parmi ces causes, y en a-t-il de plus actives, d'une part, que la mortalité qui sévit dans une proportion aussi effrayante sur les enfants nouveau-nés; d'autre part, que les ravages qu'exerce la funeste passion de l'alcool en dégradant ceux qui s'y livrent, en les vouant à toutes les déchéances physiques et morales, en les stérilisant, ou tout au moins en exerçant son influence délétére jusque sur leurs descendants dégénérés ?

La Société de Lille ne pouvait donc pas désigner des sujets d'une actualité plus palpitante, d'un impor tance sociale plus élevée.

Il est presqu'inutile d'ajouter qu'ils sont d'un intérêt général; sans doute, le département du Nord, avec sa population ouvrière si nombreuse, avec son développement industriel si considérable, est un de ceux où les deux fléaux dont il s'agit ici, acquièrent le plus grand développement. Mais la Normandie ne souffre pas moins, malheureusement, des mêmes

maux.

L'étude de ces questions doit donc y être, aussi, l'objet d'un vif intérêt de la part de toutes les classes du public éclairé; c'est assez-dire que l'Académie de Rouen ne peut manquer de s'en occuper avec sollicitude toutes les fois qu'elles sont soumises à son attention.

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