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terminer la nature de ces idées, montrer leur origine, assigner leurs causes, les distribuer en différentes classes, et expliquer ainsi la manière dont se forme l'intelligence de l'homme. Tel est le but des leçons que vous avez entendues dans la première partie, et de celles qui vont suivre dans la seconde.

J'ai voulu aussi, afin de vous aider à lire, avec un esprit de critique, les ouvrages des métaphysiciens, vous faire part des réflexions dont je n'ai pu me défendre quand j'ai remarqué leurs obscurités, leurs incertitudes, leurs contradictions, leurs interminables disputes; et, sans usurper sur ce qui appartient spécialement à la logique, unir toujours à ce travail des recherches sur la méthode.

L'étude de l'entendement humain a suffi pour occuper la vie de plusieurs philosophes célèbres. Ils n'ont pas tout dit, ni toujours ce qu'il fallait dire. Il reste donc que lque chose à faire après eux.

Vous avez paru accueillir les observations que je vous ai communiquées sur la nature des facultés auxquelles nous devons toutes nos connaissances. Je vais parler des connaissances

elles-mêmes, ou des idées, et j'oserai encore vous présenter des vues qui me sont propres. L'obligation de se livrer en métaphysique à des recherches nouvelles durera tout le temps que dureront les divisions des métaphysiciens.

SECONDE PARTIE.

De l'entendement considéré dans ses effets,

OU

DES IDÉES.

PREMIÈRE LEÇON.

De la nature des idées.

LES êtres qu'une volonté toute-puissante fit sortir du néant, forment comme deux mondes opposés dans un seul univers; le monde des corps et le monde des esprits.

L'un s'ignore; l'autre se connaît. L'un est soumis à des lois qui lui sont imposées et qu'il ne peut transgresser; l'autre s'impose à luimême des lois, il se régit par des volontés libres.

La terre que nous habitons, les astres qui nous éclairent, furent reçus dans le vaste sein d'une étendue que rien ne peut mesurer.

Les esprits, au contraire, ne sauraient accomplir leurs destinées dans aucun lieu, dans aucune étendue.

Cependant rien n'est isolé. Tout se lie par des rapports; tout se tient. L'oeil des intelligences pénètre dans les profondeurs de l'espace. Il admire les merveilles dont elles sont le théâtre. Il s'élève jusqu'à celui qui ordonna qu'elles fussent.

Qu'eût été l'univers privé de tout témoin? Tant de beautés, tant de magnificence devaientelles être éternellement ignorées? et, si toutes les créatures avaient été insensibles, à qui les cieux auraient-ils raconté la gloire de leur auteur?

«< Quand l'univers l'écraserait, l'homme, dit Pascal, serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu'il sait qu'il meurt; et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait

rien. >>

La dignité du sentiment qui respire dans cette pensée, la manière sublime dont elle est rendue, auraient dû faire taire toutes les critiques. Comment a-t-on pu dire que la raison était blessée de ce rapprochement, entre une telle infinie grandeur, et une telle infinie petitesse ?

La raison dit impérieusement que celui qui

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