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n'ignorait rien de ce qui est essentiel à l'éloquence et à la poésie, et qui en avait approfondi toutes les parties. Il sera bon de n'en entreprendre la lecture qu'après avoir acquis quelques connaissances générales de ces deux arts.

Longin, né à Athènes dans le troisième siècle de l'ère chrétienne, avait composé en grec des Remarques critiques sur les anciens auteurs, et d'autres ouvrages de philosophie et de littérature. Le seul qui nous soit parvenu est son Traité du sublime. Il est admirable par la justesse et la sagacité des réflexions, les agrémens et l'éloquence du style. Boileau en a donné une excellente traduction.

Dans les œuvres de Lucien, né vers la fin du premier siècle de notre ère, à Samosate, ville de Syrie, et professeur de philosophie et d'éloquence à Athènes, on trouve un petit Traité sur la manière d'écrire l'Histoire, qui est un chef-d'ocuvre. Nous avions une traduction de tous ses ouvrages par d'Ablancourt; mais celle qu'en a donné l'abbé Massieu l'a éclipsée par son exactitude et son élégance.

Parmi les latins, Cicéron, après avoir offert dans ses discours les plus beaux exemples de la véritable éloquence, en donna les préceptes dans son livre de Orateur, que l'abbé Collin a fort bien traduit.

Quintilien, né à Rome l'an 42 de J. C., fut l'ennemi déclaré du mauvais goût, qui, de son temps, commençait à s'introduire dans l'éloquence et dans la poésie. Après avoir enseigné la rhétorique durant vingt ans, il publia ses Institutions oratoires, qui ont été traduites avec autant de fidélité que d'élégance par l'abbé Gédoyn. Cet ouvrage et celui de Cicéron, bien dignes de servir à jamais de modèles en ce genre, doivent être sans cesse lus et médités par tous ceux qui se destinent à courir la carrière de l'éloquence.

soit

Nous avons une foule d'ouvrages didactiques en notre langue. Ceux qui méritent d'être particulièrement distingués, soit pour l'importance et la multitude des objets qu'ils embrassent pour la manière dont ces objets y sont présentés, sont le Traité des études par Rollin; les Réflexions sur la poésie et la peinture, par l'abbé du Bos; la Manière de bien penser dans les ouvrages d'esprit (en dialogues), par le P. Bouhours; et les Principes de la littérature, par l'abbé

atteux.

Je crois devoir indiquer ici aux jeunes gens qui ont du goût pour les belleslettres latines, le guide le plus sûr qu'ils puissent choisir pour cette étude, c'est le Ratio discendi et docendi du P. Jouvenci jésuite. Le sage et judicieux

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Rollin, après avoir lu cet excellent ouvrage, dit que s'il avait pu le connaître lorsqu'il travaillait à son Traité des études, la plume lui serait tombée des

mains.

+

Les meilleurs modèles de critique que je connaisse en notre langue, sont les Sentimens de l'Académie sur le Cid, tragédie de Corneille, et les Réflexions critiques sur le génie d'Horace, de Despréaux, et de Rousseau, par le duc de N***

Platon, né à Athènes, vers l'an 429 avant J. C., a composé tous ses ouvrages en Dialogues. Il y traite de la logique, de la physique, de la politique, y explique les lois de la morale, et y démontre l'immortalité de l'âme. Dacier en a traduit une grande partie.

Lucien a fait aussi des Dialogues pour censurer les vices des hommes, pour jeter du ridicule sur les faux Dieux, et sur les philosophes du Paganisme. Ils sont écrits d'un style pur et naturel, assaisonnés du sel d'une plaisanterie délicate, pleins de peintures vives de caractères bien dessinés et bien soutenus. Indépendamment des traductions de tous les ouvrages de ce rhéteur par d'Ablancourt et l'abbé Massieu nous en avons une bonne de ses Dialogues par le marquis de Pompignan. Gail en a traduit aussi quelques-uns.

Les admirables Traités de la vieillesse, de l'amitié, de la nature des Dieux, par Cicéron, sont en Dialogues. Le dernier de ces ouvrages a été traduit par l'abbé d'Olivet.

Fénélon a fait des Dialogues sur l'éloquence, où tout est sagement pensé, exprimé avec la plus belle simplicité, et ramené à l'instruction. Ses Dialogues des morts sont pleins de finesse et d'enjouement. Le même éloge est bien dû anx Dialogues des morts par Fontenelle. Tous ces ouvrages sont d'excellens modèles de dialogue

oratoire.

CHAPITRE V.

Du Roman.

LE divertissement du lecteur, que le romancier habile semble se proposer pour but, n'est qu'une fin subordonnée à la principale, qui est l'instruction de l'esprit et la correction des mœurs. Telle est l'importante vérité que nous apprend le savant Huet, évêque d'Avranches, dans son Traité de l'origine des romans. Ce serait donc une erreur et une bien funeste erreur, de croire que le roman est un récit de diverses aventures,

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imaginées seulement pour amuser. : Lafin que l'écrivain doit s'y proposer, ́est d'instruire sous le voile de la fiction de polir l'esprit et de former le cœur en présentant un tableau de la vie hu maine. Censurer les ridicules et les vices ; montrer le triste effet des passions désordonnées; s'attacher toujours à inspicer l'amour de la vertu, et faire sentir qu'elle seule est digne de nos hommages, qu'elle seule est la source de notre bonheur; tel est le principal devoir du romancier. Ce n'est qu'en le remplissant, qu'il peut faire un ouvrage qui tourne à sa propre gloire, et à l'avantage des moeurs et de la société.

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Il s'agit d'abord d'inventer des événemens qui soient peu ordinaires, mais vraisemblables; qui intéressent attachent le lecteur et qui amènent des peintures vraies du coeur humain, des divers mouvemens qui l'agitent, et des différentes passions qui le tyrannisent dans les différentes circonstances de la vie. Il faut que rien ne languisse dans le récit de ces événemens ; que l'action marche avec rapidité; que le style vif et plein de chaleur échauffe toujours de plus en plus l'imagination et l'âme du lecteur; que les situations des personnages n'aient rien de forcé; que leurs caractères particuliers soient bien marqués, parfaitement soutenus jusqu'à la fin ;

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