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une suite de tableaux

et magnifiques vifs et naturels, qui enchantent l'imagination, éclairent l'esprit, et remuent for tement le cœur.

Voilà les deux plus parfaits modèles que puissent se proposer ceux qui se destinent à la chaire. Nous avons beaucoup d'autres orateurs, dans les ouvrages desquels ils pourront puiser le goût de la bonne et vraie éloquence. Ceux qui ne contribuèrent pas peu à illustrer ce même siècle de Louis XIV, sont :

Le P. Cheminais, jésuite. On l'a placé avec juste raison parmi les prédicateurs du premier ordre. Plein d'onction et de sentiment, il excelle dans l'art de toucher et de persuader. Cet orateur avait. un génie tout de feu mais malheureusement la faiblesse de sa santé l'obligea de quitter la chaire à un âge où tant d'autres commencent à peine à y monter.

Le P. de la Colombière, jésuite. Il possédait toutes les qualités de l'esprit qui font le grand orateur. Ses sermons réunissent la solidité du raisonnement la vivacité de l'imagination, l'élégance du style et de la chaleur du sentiment. Une piété tendre et vive y éclate, et en relève le prix.

Le P. Giroust, jésuite. L'onction fait le principal caractère de ses sermons. Son style est en général élégant, mais quelquefois négligé ; quelquefois aussi

n'ont

ses raisonnemens, quoique solides, pas toute la profondeur qu'on pourrait désirer.

Le P. de la Rue, jésuite. Il a de trèsbons sermons, et il n'en est aucun qui n'offre des morceaux admirables. Une grande simplicité en fait le mérite. Cet homme, qui après une longue étude des lettres françaises, et surtout des latines, connaissait si bien toutes les finesses et toutes les beautés de l'art, est pourtant l'orateur qui paraît les rechercher le moins. On dirait qu'il doit tout à la nature. C'est cette belle simplicité qui le fit applaudir à la cour de Louis XIV. « Le » vrai goût de l'éloquence chrétienne » dit-il dans la préface de ses sermons, » s'est toujours conservé à la cour. Dès >> le première fois que j'eus l'honneur » d'être nommé pour y prêcher, je fus >> assez heureux de recevoir un avis d'un » courtisan des plus habiles ». Ne donnez pas, me dit-il, dans l'écueil commun. Ne prétendez pas réussir en nous flattant l'oreille par un bel étalage de fins mots. Si vous allez par le chemin du bel-esprit, vous trouverez ici des gens qui en mettront plus dans un seul couplet de chanson, que vous dans tout un

sermon.

Nous devons aussi à la société des Jésuites les prédicateurs les plus admirés sous le règne de Louis xv. Voici à peu

près ceux dont les jeunes orateurs peuvent faire une étude particulière.

Les sermons du P. Ségaud offrent un grand fonds d'instruction. L'onction du sentiment y est jointe à l'élégance et à l'énergie du style.

Le P. Pérusseau, mort confesseur de Louis xv, développe les maximes de l'évangile d'une manière instructive et touchante. Le pathétique continu qui règne dans tous ses sermons, décèle une imagination vive, une âme sensible et pleine de chaleur. On voit aisément que l'amour de Dieu l'embrâsait.

Une éloquence simple et insinuante distingue ceux du P. Griffet. Cet orateur ne s'écarte jamais de la morale chrétienne, et y ramène tous ses sujets. C'est le vrai moyen de prêcher avec

fruit.

Le P. de Neuville est un des plus beaux génies qui aient brillé dans la chaire. Ses sermons étincelant d'esprit, -pleins de pensées justes et profondes, de raisonnemens solides, et de portraits finis de nos mœurs, abondent en images et en sentimens.

On admire dans ceux du P. Chapelain, des plans heureux et très-bien remplis, une marche libre, aisée et naturelle, une diction noble et pure, beaucoup de force et d'onction.

Les protestans ont eu quelques grands

orateurs

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orateurs. Le plus célèbre est Saurin qu'ils placent à côté de Bourdaloue. Ce rang ne lui est pas dû. Il est plus fleuri que le Jésuite mais, quoique solide et véhément, il est beaucoup moins profond; et il s'en faut bien que son élo quence soit aussi mâle et aussi nerveuse. Ce qu'on doit admirer en lui, c'est que, laissant à part le dogme et la controverse il ne s'est attaché qu'à la morale et n'a point imité la plupart des orateurs calvinistes, qui se répandent en invectives contre le pape et l'église. Aussi futil persécuté, calomnié pendant toute sa vie par les hommes violens et atrabilaires de sa secte. Ces fanatiques auraient voulu que Saurin, partageant leur haine aveugle et leur grossière fureur eût appelé le pape l'Antéchrist et l'église romaine, la Prostituée de Babylone.

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II. Du Panégyrique.

Le panégyrique, en général, est un discours à la louange d'une personne illustre dont on préconise les rares vertus ou les grandes actions. Le panégyrique chrétien est uniquement consacré à la louange des Saints. L'orateur s'y propose de les honorer par l'éloge de leurs vertus, et de nous engager nous-mêmes à les imiter. Il ne peut remplir ce dou

ble objet, qu'en joignant l'instruction au récit de ces vertus un juste mélange des éloges et de la morale, fait la première perfection du panégyrique,

Mais ce serait un défaut de suivre exactement les traces du Saint depuis sa naissance jusqu'à sa mort, et de louer chacune de ses vertus en particulier. Il faut se contenter de rappeler les principales circonstances de sa vie, à quelques époques marquées; et de ramener les faits et la morale à quelque vertu dominante qui paraît avoir animé toutes les autres. Le plan d'un panégyrique est une des choses essentielles à laquelle l'orateur doit s'attacher. Pour donner une idée de la manière dont il peut le concevoir, il suffira d'en citer un bon exemple : c'est le plan du Panégyrique de Saint-Louis, par le P. Bourdaloue.

« DIVISION. Saint Louis a été un grand » Saint, parce qu'étant né roi, il a fait » servir sa dignité à sa sainteté, I.re Par» tie. Saint Louis a été un grand roi, » parce qu'il a su, en devenant Saint, » faire servir sa sainteté à sa dignité, >> II. Partie.

I.re PARTIE. Saint Louis a été un grand » Saint, parce qu'étant né roi, il a fait » servir sa dignité à sa sainteté. En effet, » sa grandeur n'a servi qu'à le rendre, » 1.0 humble devant Dieu, avec plus de » mérite; 2.0 charitable envers le pro

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