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» ressources à notre éternelle demeure, » avec le roi de la terre, il faut encore » servir le Roi du ciel. Servez donc ce » Roi immortel et si plein de miséri» corde, qui vous comptera un soupir » et un verre d'eau donné en son nom, >> plus que tous les autres ne feront ja>> mais votre sang répandu; et commen» cez à compter le temps de vos utiles ser»vices, du jour que vous vous serez donné >> à un maître si bienfaisant. Et vous, >> ne viendrez - vous pas à ce triste mo»nument; vous, dis - je, qu'il a bien >> voulu mettre au rang de ses amis ? >> Tous ensemble, en quelque dégré de >> sa confiance qu'il vous ait reçus, en»vironnez ce tombeau, versez des lar» mes avec des prières et admirant » dans un si grand prince une amitié si >> commode et un commerce si doux, >> conservez le souvenir d'un Héros dont » la bonté avait égalé le courage. Ainsi >> puisse-t-il toujours vous être un cher >> entretien ainsi puissiez-vous profiter » de ses vertus; et que sa mort, que vous » déplorez, vous serve à-la-fois de con>> solation et d'exemple! Pour moi, s'il » m'est permis, après tous les autres, » de venir rendre les derniers devoirs à » ce tombeau, ô Prince! le digne sujet » de nos louanges et de nos regrets, vous >> vivrez éternellement dans ma mé>>moire votre image y sera tracée, non

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>> point avec cette audace qui promet» tait la victoire ; non, je ne veux rien >> voir en vous de ce que la mort y >> efface: vous aurez dans cette image » des traits immortels; je vous y verrai >> tel que vous étiez à ce dernier jour » sous la main de Dien, lorsque sa gloire >> sembla commencer à vous apparaître. » C'est là que je vous verrai plus triomphant qu'à Fribourg et à Rocroi, et » ravi d'un si beau triomphe, je dirai en >> actions de grâce ces belles paroles du » bien aimé disciple: la véritable vic» toire, celle qui met sous nos pieds le » monde entier, c'est notre foi. Jouissez, » Prince, de cette victoire, jouissez-en >> éternellement par l'immortelle vertu » de ce sacrifice. Agréez ces derniers >> efforts d'une voix qui vous fut con>> nue vous mettrez fin à tous ces dis>> cours. Au lieu de déplorer la mort des » autres, grand Prince, dorénavant je

veux apprendre de vous à rendre la » mienne sainte. Heureux, si averti par

ces cheveux blancs du compte que » je dois rendre de mon administration, »je réserve au troupeau que je dois >> nourrir de la parole de la vie, les restes >> d'une voix qui tombe et d'une ardeur »>> qui s'éteint! >>

ARTICLE III.

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De l'Elocution.

Quand l'orateur a trouvé les choses qui doivent composer son discours, et qu'il les a placées dans leur véritable point de vue, il faut qu'il s'applique à les embellir, à leur donner une espèce d'âme par la force et les grâces de l'expression voilà en quoi consiste l'élocution. C'est à elle que l'éloquence doit principalement cette puissance irrésistible, ces charmes victorieux qui portent la lumière, la conviction dans les esprits, et qui la rendent la souveraine des coeurs. Un peintre qui veut composer un tableau, imagine d'abord le dessin, observe ensuite les proportions, et achève enfin son ouvrage, en donnant à l'objet qu'il peint ce coloris qui lui est propre, et qui enlève tous les suffrages. Ce que fait le peintre par les couleurs, l'orateur le fait par l'élocution. Elle comprend les figures, le style, et ses différentes espèces dont j'ai déjà parlé.

Je me bornerai donc à dire ici que pour réussir dans l'élocution, il faut bien penser, bien sentir, et écrire comme l'on pense et comme l'on sent; qu'il ne faut ni prodiguer les figures, ni les

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placer sans discernement: elles doivent naître du fond du sujet, tirer leur source dans le cœur même de l'orateur dans les passions qui l'animent, dans les sentimens dont il est pénétré. Il faut surtout s'attacher à bannir du discours oratoire ces pensées stériles, qui ne sont que brillantes, et qui ne disent rien pour l'instruction de l'auditeur. En un mot l'orateur doit avoir sans cesse présente à l'esprit cette réflexion de Cicéron (1): Le discours est un composé de choses et de paroles les paroles n'ont point de fondement, si elles ne sont appuyées sur les choses; et les choses n'ont point de grâce, si elles ne sont ornées par les paroles.

CHAPITRE II.

Des différentes Espèces de Discours oratoires.

On réduit ordinairement tous les grands

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discours, tous les discours vraiment oratoires, à trois genres, qui sont le genre démonstratif, le genre délibératif, le genre judiciaire. Dans le démonstratif, l'orateur blâme, loue; tout s'y rapporte

(1) De Orat. 1. 3, n.o 12.

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à l'honnêteté. Dans le délibératif, il engage à agir ou à ne pas agir; tout s'y rapporte à l'utilité. Dans le judiciaire il accuse, il défend; tout s'y rapporte à l'équité. Quoique ces trois genres soient distingués entre eux, ils se trouvent néanmoins très souvent ensemble. Quand un orateur, par exemple, loue la vertu, il ne le fait que pour la conseiller, et nous animer à l'embrasser : voilà le genre démonstratif et le délibératif réunis. Ainsi, je ne m'astreindrai point à la division de ces trois genres, pour faire connaître les différentes pièces de discours que chacun d'eux peut renfermer. Je me contenterai de dire successivement un mot des discours sacrés, des discours du barreau, des discours académiques, et des discours politiques.

ARTICLE I.

Des Discours sacrés.

Il n'est point de théâtre plus brillant pour l'éloquence, que les discours sacrés. C'est là qu'elle paraît dans toute sa pompe, dans toute sa dignité, qu'elle déploie toute sa force et toutes ses grâces, pour étonner l'imagination, pour intéresser le sentiment. L'orateur chrétien est l'organe de la religion, l'interprète de Dieu même il parle à la face des autels,

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