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La cella frigidaria n'était séparée du baptistère que par un mur (parietis) muni de trois ouvertures en arcades (Phr. 28).

Le muid romain valait 8 litres 635, selon les métrologues les plus entendus, et 8 litres 935 suivant A. Rich. En admettant la contenance de 8 litres 635, les 20,000 muids font près de 173 mètres cubes, soit le contenu d'un bassin circulaire de 15 mètres de diamètre et un de profondeur.

C'est dans cette piscine que six tuyaux terminés par des têtes de lion artistement travaillées, versaient avec grand bruit le courant tiré du sommet d'une montagne. (Phr. 30.) Elle devait être couverte d'une toiture soutenue par des colonnes, puisque, en s'y baignant, la vue pouvait se promener sur le lac. (Carmen 19.) De quelle montagne venait le courant en question? Assurément ce n'était pas du sommet de Charmont pas plus que de celui d'un autre cône volcanique.

Dans un autre passage (Carmen 18) Sidoine écrit: « L'eau qui tombe en murmurant du sommet de la colline voisine fait un bruit plus fort que celui des cascades du mont Gaurus (1). » Par collines voisines, il ne peut entendre que les coulées qui viennent de Charmont, et dont une passe à Sauteyras. Ce serait donc près de l'origine de ces coulées qu'il faudrait voir la source du fluentum, ce qui indiquerait Fontclairant, où il y a une fontaine d'un débit médiocre, mais faisant partie d'un cours souterrain important. Cet écoulement occulte s'effectue sous les coulées et se déverse, dérobé à la vue, dans la corne septentrionale du lac.

Par supercilio montis Sidoine pouvait aussi entendre les plateaux situés au delà et au-dessus des puys du groupe de Combegrasse et avoir mis à contribution les sources d'Empouès, de la Cabane, etc.

(1) Sid. Trad. Barret, p. 235.

M. l'abbé Delarbre (1) parle d'un aqueduc mentionné par l'auteur inconnu de la Vie de saint Austremoine, aqueduc qui aurait été construit pour amener à Clermont les eaux du ruisseau d'Estoupat. Cette version, qui a l'air d'une légende et ne peut être qu'une erreur relativement à Clermont, pourrait avoir un fond de vérité et être une réminiscence de l'aqueduc que Sidoine aurait fait construire pour mener à Aydat les eaux de quelque source de la montagne.

On n'est pas mieux renseigné sur le genre de conduite qui menait l'eau. Toutes les hypothèses que l'on pourrait faire à cet égard, sont sans point d'appui. Sidoine dit que l'eau du courant est déversée dans la piscine par six tuyaux, mais il n'indique pas la nature de la conduite principale.

A propos d'un canal à Aydat. - Il existe à Aydat des restes d'un canal. Ces vestiges sont enterrés profondément au sud du village. La direction semble indiquer qu'il allait prendre de l'eau au ruisseau au-dessus des dépôts du delta, pour la conduire au lieu où se trouve le jardin du presbytère. Il n'est pas couvert et forme une auge de 15 å 20 centimètres de largeur sur 24 à 25 de profondeur intérieure. Le mortier ou ciment qui le compose est formé de chaux, de fragments de tuiles, et de graviers de pouzzolane. Sa dureté est faible et après sécheresse d'un bloc, la surface tombe en poussière au moins en partie.

Legrand d'Aussy dit que, en fouillant près de l'église, peu de temps avant son voyage en Auvergne, on avait trouvé un ciment ancien, des voûtes, et des murs de huit pieds d'épaisseur.

La présence d'un canal et de vestiges de constructions près de l'église n'a rien qui puisse surprendre, puisque l'existence de l'abbaye n'est pas contestable. Mais où la question fait fausse route, c'est lorsque l'on veut invoquer

(1) Notice sur l'Auvergne, p. 108.

ces vestiges comme étant une preuve qu'Avitacum était à Aydat.

C'est une erreur de croire que l'art de faire des ciments s'est évanoui avec l'empire romain. La confection des ciments n'était pas le secret d'un individu qui l'aurait emporté avec lui dans la tombe. Il était l'application raisonnée et ponctuelle des procédés indiqués par Vitruve au temps d'Auguste. Or, les œuvres de Vitruve n'ont pas été anéanties; et on a toujours en Gaule et ailleurs confectionné des ciments, par la raison que l'on n'a pas cessé de construire des conduites d'eau, des piscines, des réservoirs, des citernes pour les forts et les châteaux, pour les habitations privées de puits et de sources. M. Mallay (Arch. sacrée, p. 46) dit bien: « Les mortiers romains ont bravé les siècles et leur dureté est toujours la même. » Mais M. Mallay n'aurait pu dire que tous les mortiers romains et les seuls romains ont pu braver les siècles.

« Un préjugé vulgaire attribue aux Romains la connaissance d'un secret pour la fabrication des mortiers. Ce préjugé est démenti par l'étude attentive des auteurs anciens et des constructions antiques. Les Romains connaissaient la propriété fondamentale de la pouzzolane de donner un mortier hydraulique par le mélange avec la chaux grasse, et ils savaient en tirer un très bon parti. Mais à part ce point, ils n'avaient aucune notion des convenances réciproques des chaux et matières avec lesquelles il faut les mélanger.» (L. Lalanne, Encyclop. des Sciences utiles, p. 2791.)

« On est généralement porté à croire que les architectes de l'antiquité et surtout ceux des Romains avaient pour préparer leurs mortiers des procédés supérieurs à ceux des modernes, et on appuie cette opinion sur la dureté de celles de leurs maçonneries qui se sont conservées jusqu'à nous. On ne réfléchit pas qu'autrefois comme aujourd'hui, il y avait des constructions pour lesquelles on n'épargnait pas la dépense et d'autres élevées pour les

besoins du moment, et pour l'établissement desquelles on apportait peu de soins. Or, ces dernières ayant disparu, ce sont les premières qui ont survécu et que l'on compare aux constructions médiocres de notre époque. Les mortiers des édifices romains doivent leur dureté à leur ancienneté, parce qu'il est de la nature de ces mélanges de durcir en vieillissant. Le moyen-âge lui-même nous a laissé des monuments au moins aussi solides que ceux des anciens. >> (A. Maigne, Dict. classiq. des origines, inv. et déc., art. Mortier.)

Et pour en finir à propos de ce canal, remarquons qu'il se trouverait en contradiction avec l'hypothèse des bains et de la piscine ou natatoire placés sous les rochers qui se trouvent au sud-ouest d'Aydat.

En effet, la direction de ce canal montre que, après avoir passé au-dessous des rochers du sud-ouest, il venait aboutir vers le jardin du presbytère; son terme inférieur actuel, au sud du village, près de l'amorce du chemin de Poudure, le prouve et ne permet pas d'admettre que, de ce terme inférieur, il dût ni pût remonter à une distance de près de cent mètres, sous les rochers du sud-ouest.

Un texte concluant. La situation du Balneum sous les rochers au sud-ouest d'Aydat est une condition contredite par Sidoine lui-même. En effet, si Avitacum avait été à Aydat et le Balneum sous les rochers du sud-ouest, les bâtiments de la villa auraient inévitablement formé écran entre la natatoire et le lac. Comment alors de cette natatoire la vue du baigneur aurait-elle pu nager sur la surface du lac?« Vos membres n'occupent que la piscine, et >> cependant vos regards nagent sur la surface de mon » lac.» (Carmen, 19.)

(Voir les phrases 11, 12, 13, 27, pour la disposition des compartiments du Balneum.)

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Le Delta d'Aydat au cinquième siècle. Si l'on peut prouver qu'Avitacum fut à Sauteyras, on doit pouvoir montrer directement qu'il n'a pas été à Aydat.

Le cône de déjections du ruisseau se divise assez naturellement en quatre parties :

1o Le triangle supérieur ou delta, entre le cimetière et le couloir; c'est une digue de blocs, d'une superficie d'environ deux hectares; il est en grande partie occupé par les habitations du village.

2o La grève, formée de galets et de gros graviers, comprend le sol de l'église, du cimetière et des constructions contiguës, à l'est de la principale rue; son étendue est d'environ un demi-hectare.

3o La prairie entre la grève et la source de Lourneix, aujourd'hui boisée sur les limites de propriétés; c'était le marais au ve siècle, et devait être parfois envahie par les eaux du ruisseau.

4o La Saigne, terrain spongieux, non boisé, conquis sur le lac, à l'est de la source de Lourneix. (Voir planche 3.)

Reprenons la première partie. Qu'était au ve siècle la digue de blocs?

« C'était un espace couvert de grosses pierres, traversé par un courant qui s'y brisait, sur un sol inégal, contre des barrières de roches, avant d'aller, blanc d'écume, se perdre dans le lac. » (Phr. 54.)

Nous demandons si ce langage serait compatible avec l'existence d'Avitacum sur le même sol, et avec le silence obstiné de Sidoine à cet égard. Ce serait au moins fort singulier et bien douteux. Dans un autre passage, il n'a pas hésité à dire qu'une vallée médiocre conduisait au vestibule de son domicile.

M. l'abbé Crégut pense que cela peut se concilier, que la villa occupait à droite le terrassement sur lequel se groupent les constructions du village, qu'au nord étaient les fondrières, les creux, le cours du ruisseau, les marécages, et que la viabilité et les relations avaient lieu par l'ouverture du sud. On ne saurait mieux dire pour faire entendre que cet Avitacum était un cul-de-sac. Cette

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