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dats, s'empressaient de faire des préparatifs pour marcher, le lendemain, à la victoire ou à la mort, comme à une fête. Les drapeaux étaient déployés; on mettait toutes ses décorations. Aujourd'hui nous voyons les Prussiens cacher leurs épaulettes, assombrir leurs vêtements, c'est pratique, dira-t-on, soit mais ce n'est pas glorieux. Ont-ils peur de mourir?

Dans cette armée du Grand-Roi, se trouvait le régiment d'Auvergne. Là aussi, on se préparait pour la journée du lendemain. A l'approche de la nuit, quand tout fut prêt, on vit, dans chaque compagnie, les joueurs de musette sortir leurs instruments. Ils se réunirent et se mirent à jouer les bourrées les plus entraînantes. Les soldats les entourérent, et bientôt le régiment entier se mit à danser avec joie, et à accompagner de chants les accords des musiques.

Dans le camp français, comme cela se fait encore aujourd'hui, se trouvaient des officiers étrangers, venus là pour suivre les manoeuvres et assister à la bataille. Ils témoignèrent le désir de visiter le camp, la veille du combat. On accéda à leur désir et plusieurs officiers français leur servirent de guides dans leurs pérégrinations. Ils avaient parcouru une partie du camp, lorsque tout à coup éclata à leurs oreilles une musique bruyante mêlée à des chants joyeux. Pleins de curiosité, ils s'avancèrent vers cet orchestre et ils virent dans la plaine tout un régiment dansant et chantant avec un entrain incroyable.

Ils s'arrêtèrent pour contempler ce spectacle; puis un noble capitaine étranger, se faisant l'interprète des sentiments communs, dit, s'adressant à l'un de nos généraux : « Ce ne sont pas des hommes que nous voyons, il faut que ce soit plus que des hommes, pour danser ainsi la veille d'une grande bataille, où beaucoup d'entre eux trouveront la mort. De plus, parmi ces danseurs, nous n'apercevons aucune femme. Puisqu'ils ne sont ni des hommes, ni des femmes, veuillez donc, Monsieur, nous dire quels sont

ces braves gens qui montrent un tel mépris de la mort. >> Alors l'officier français répondit : « Prince, vous l'avez dit avec raison. Ils ne sont ni hommes ni femmes, mais tous Auvergnats. >>

Dr CHALVON

(de Thiers).

SAUTEYRAS

OU

LA VRAIE SITUATION D'AVITACUM

D'APRÈS LES TÉMOIGNAGES DE SIDOINE APOLLINAIRE

INTRODUCTION.

La région d'Aydat est une des plus attrayantes de l'Auvergne. Par la fraicheur de son lac, la belle conservation de ses nombreux cratères, et les coulées de ses volcans, elle attire tous les ans des milliers de visiteurs. A ces beautés naturelles, vient se joindre l'attrait d'une question historique sur l'emplacement d'Avitacum, résidence patronymique des Avitus, devenue célèbre comme habitation de l'empereur Avitus, et surtout de son gendre Sidoine Apollinaire. La solution de ce problème, agité depuis plus de trois cents ans, fera l'objet de ce mémoire. Mais auparavant disons quelques mots sur la physionomie du pays.

C'est une vaste dépression, presque un cirque, dont le fond est occupé par un lac cornu, les vallées par des cheires, et les hauteurs par des volcans. Toutes ces déjections reposent sur une nappe de granite amphibolique, qui se montre à nu au sud du ruisseau d'Aydat, et sur des lambeaux au nord et au sud des coulées du puy de Charmont. Il est bon de se rendre compte du relief de ce fond primitif imperméable, parce qu'il enseigne la raison des coulées, celle des sources et des ruisseaux occultes qui les produisent. Antérieurement à l'apparition du volcanisme

quaternaire, ce sous-sol de granit, libre des déjections qui plus tard sont venues l'encombrer, écoulait ses eaux dans la vallée du Lavadeau, ou ruisseau d'Aydat, par deux conduites principales. L'une, que nous appellerons ravin de Fontclairant, se dirigeait de l'ouest à l'est, du puy de Combegrasse au nord du lac; il a servi plus tard de collecteur aux coulées de Charmont. L'autre, un large val un peu rameux, partait du plateau de Randanne, et débouchait dans la vallée principale vis-à-vis le site du lac; il a servi plus tard de canal au grand courant lavique, qui a coupé le cirque en écharpe, barré la vallée et formé la chaussée du lac.

Le volcan de Nadaillat, qui nous présente les manifestations volcaniques les plus anciennes de la région, se trouve en dehors de notre cadre d'études, par l'inclinaison de son plateau de basalte, et la direction de ses coulées. Nous ne le mentionnons qu'à cause de ses émissions de trachyte, antérieures à ses produits basaltiques exemple remarquable de l'étroite relation des basaltes avec certains trachytes.

Par rang d'age, après les basaltes de Nadaillat, viennent probablement se placer les phénomènes glaciaires, qui ont laissé à Aydat quelques traces de leur passage. Si du village on monte au nord en suivant le tracé d'un vieux chemin dégradé qui se dirigeait sur Verneuges, on ne tarde pas d'apercevoir, sur les croupes et les pentes des hautes berges qui encaissent au nord la prairie, de nombreux blocs, ou isolés, ou utilisés en murs, ou amassés en aggers. Les plus gros atteignent ou dépassent le volume d'un mètre cube, et sont d'un trachyte grisâtre, avec cristaux de sanidine et de pyroxène enchassés dans une påte brune amorphe. Dans le même endroit on voit aussi des blocs de moindre volume d'un basalte bleuâtre, compact, qui porte tous les caractères de la vétusté, et ne proviennent certes pas de la Rodde. Ces trachytes, ces vieux basaltes, n'ont pu venir là que véhicules par un courant de

glace qui en à protégé les angles, les a déposés sur ces croupes où ils forment une moraine de gauche, comme les basaltes en blocs de Poudure, forment une moraine de droite. Il serait facile d'en retrouver l'origine.

Après l'action glaciaire, nous retrouvons à Aydat la puissance volcanique. Peut-être même ces deux actions y ontelles été synchroniques sur quelques points. Le volcanisme quaternaire a développé ici une énergie puissante dont les produits, édifiés en nombreux cônes à cratère ou en vastes courants, ont imprimé au paysage des caractères que l'on trouverait difficilement ailleurs. Le groupe de Randanne surtout présente à la fois un spectacle et un sujet d'études dignes d'intéresser les amateurs les plus difficiles en pittoresque ou en géologie, et que tout visiteur projette de se repayer après en avoir joui. Mentionnons les cratères les plus remarquables. Vers le centre de l'ellipse, est le Montjugeat; il a la forme d'un bateau, élevé sur une large base aux pentes douces, mais bosselées. Il est moins volumineux que le Pariou, mais tout aussi régulièrement conformé et conservé.

A l'est de Montjugeat sont les puys de la Vache et de Lassolas, si rapprochés qu'ils ne sont probablement que les deux évents de la même fournaise. Semblables dans leur volume et leur conformation, concomitants dans leur activité et leur trépas instantané, ils se sont encore accordés à transformer en spectacle perpétuel le phénomène d'une éruption volcanique. En parler est bien peu de chose; il faut voir; il faut gravir sur un observatoire voisin, le sommet de Vichatel par exemple, repaitre ses yeux du tableau, et son esprit des images évoquées. Les laves de ces deux volcans ont fourni, au moins pour la majeure partie, les matières de la large coulée, qui est allée, sous la Cassière, butter contre les granits de Rouillat, puis barrer la vallée, en face du Lac.

Nous parlerons plus loin des puys de la Rodde et de Charmont qui font partie du groupe de Combegrasse.

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