santes constatations du professeur TEISSIER sur la persistance de son diplo-bacille pendant de longues semaines dans l'eau du Rhône, aux nombreuses observations des médecins russes sur l'immunité des groupes alimentés par une eau très pure, que le réservoir du 36° d'artillerie, déjà déclaré suspect par nous dans le travail que nous venons de citer, pouvait être incriminé. Mais les hommes ne boivent ou ne sont censés boire que de l'eau filtrée ! Et puis, le 38° d'infanterie, dont la situation est différente au point de vue de l'emplacement, de l'exposition et de l'eau alimentaire, pour quelles raisons a-t-il été frappé également d'une façon exceptionnelle? Après avoir examiné la question, nous en sommes réduits à incriminer les écuries immenses du 36° d'artillerie, cause constante de refroidissement pour les hommes, et un peu de surmenage chez les fantassins du 38° de ligne, dont l'instruction était menée d'une façon active, malgré les rigueurs de l'hiver.

Influence de l'ancienneté.

Nous avons pu remarquer dans l'épidémie que nous analysons que les jeunes soldats étaient frappés plus fréquemment que les anciens :

208 jeunes soldats,

18 anciens soldats.

Influence de l'arme.

L'arme n'a pas paru avoir d'influence: à côté du 36° d'artillerie très atteint, le 16 s'est montré peu touché, et le bataillon du 38° d'infanterie, comptant un effectif moyen de 434 hommes, durant le premier trimestre 1895, a donné presque trois fois autant de malades que le 92° de la même arme ayant un effectif de 1,473 soldats.

Cas intérieurs à l'hôpital.

Parmi le personnel de nos salles composé de trois sœurs, deux filles de service, deux infirmiers civils et six infir

156 LA GRIPPE DANS LA GARNISON DE CLERMONT-FERRAND. miers militaires, nous avons eu deux sœurs, deux filles, les deux infirmiers civils, deux infirmiers militaires atteints, soit huit personnes sur treize, sans compter un des médecins traitants. Nous avons observé, en dehors du personnel médical, cinq cas intérieurs très nets: la grippe frappant dans leurs lits deux malades atteints de rhumatismes articulaires, un malade atteint d'oreillons et deux blessés.

Maladies ayant régné en même temps
que la Grippe.

Les maladies qui ont régné en même temps que la grippe

ont été :

L'érysipele (9 cas) ayant déterminé deux fois des abcès de la face, complication assez rare dans nos salles où les érysipėles sont traités par des applications de glycérine bichlorurée et guérissent d'habitude sans accidents.

Les oreillons (42 cas) dont huit compliqués d'orchite, quatre compliqués de grippe à forme pulmonaire, et un de rhumatisme articulaire subaigu.

Aucun de ces malades n'a été gravement atteint; aucune suppuration n'a été observée, ni du côté de la parotide, ni du côté des testicules.

La rougeole (15 cas) dont quelques-uns ne laissaient pas que de présenter un diagnostic différentiel d'une certaine difficulté avec la grippe éruptive.

La scarlatine (2 cas) nettement confirmés par une desquammation caractéristique.

Dans quatre cas de grippes très graves, compliquées de broncho-pneumonie, nous avons trouvé sur les doigts de nos malades, ces panaris sous-épidermiques, vulgairement appelés tournioles, dont le pus est septique au plus haut degré. Il aurait été intéressant d'y chercher le bacille de PFEIFFER ou le diplo-bacille de TEISSIER.

(A suivre.)

Dr VIGENAUD.

SOCIÉTÉ D'ÉMULATION DE L'AUVERGNE

Allocution de M. Jaloustre, président.

En prenant la présidence, M. Jaloustre a prononcé l'allocution sui

vante :

Messieurs,

>> En prenant place au fauteuil de la présidence de la Société d'Émulation de l'Auvergne, mon premier devoir est de vous remercier de la marque de bienveillante sympathie que vous m'avez témoignée en m'y appelant.

» Il me faut en même temps vous faire part de la vive appréhension que j'éprouve à venir, si peu qualifié, diriger vos travaux.

>> J'avais sérieusement songé, le dirai-je, à résigner mes fonctions et à me soustraire à l'honneur qui m'est échu. Je vous aurais prié de reporter vos suffrages sur tel de nos collègues et vous n'avez ici que l'embarras du choix moi de veiller aux

mieux en état que

destinées de notre Association.

› Combien j'en vois, en effet, qui eussent été plus habiles à stimuler le zèle de nos travailleurs, à mettre en relief par de savants et lumineux commentaires, le mérite ou l'originalité des mémoires qui composent nos ordres du jour et émaillent d'un réel intérêt les communications présentées à nos séances.

› Mais à ces objections il m'a été répondu qu'il importait d'assurer le fonctionnement normal du règlement par l'appel à tour de rôle à la présidence des membres qui avaient fait partie du bureau, alors surtout que l'âge venait à cette prérogative ajouter son privilège.

» Je suis par métier trop convaincu de l'excellence des pratiques administratives pour contredire à pareille interprétation, et je suis resté docile à votre volonté.

» Je vous demande dès lors toute votre indulgence. Mes collègues du bureau ne me refuseront pas, j'espère, leur bienveillant concours que je n'ai pas hésité, je dois le dire, à escompter dès la première heure.

» Unis dans un amour sincère des choses de notre cher et beau pays d'Auvergne, nous continuerons à maintenir à la Société d'Émulation ce caractère d'œuvre sérieuse ouverte aux activités si diverses de l'esprit en quête de vérités et de connaissances précises.

» Dans nos travaux en commun, où s'échangent les idées, où s'exposent les optnions et les vues si attachantes qu'éveillent les objets qui nous occupent, nous trouverons à satisfaire nos goûts d'ingénieuse curiosité, de culture élevée, d'études si variées qui nous charment et nous passionnent.

>> C'est que nous sommes ardemment convaincus qu'elles restent, à tout âge, la source des jouissances les plus pures, les plus nobles, et qu'elles sont toujours capables d'offrir la consolation bienfaisante aux plus dures et aux plus cruelles réalités de l'existence humaine. »

NECROLOGIE

Michel Costes.

Le Dr Michel Costes vient de mourir, brutalement enlevé à l'affection de sa famille, de ses amis et de ses maîtres, au moment où il allait revenir à Clermont, comme professeur d'histologie à l'Ecole de médecine.

Il avait commencé, à la Faculté des Sciences de Clermont, ses études scientifiques et y avait obtenu le grade de licencié ès-sciences naturelles. A Paris, il poursuivait à la fois ses études pour le doctorat en médecine et pour le doctorat ès-sciences naturelles.

Il venait de soutenir brillamment devant la Faculté de médecine de Paris sa thèse de docteur lorsqu'une attaque d'influenza a déterminé sa mort.

Cette thèse a pour titre : « Recherches anatomo-pathologiques sur l'évolution des Fibromyomes de l'utérus et de ses annexes. » C'est une œuvre importante qui a mérité les éloges du jury d'examens. Ses conclusions sont les suivantes :

1° Le fibromyome utérin se développe autour des petits vaisseaux et des capillaires sous une influence qui nous est inconnue, mais qui est certainement liée à une grande activité de la circulation, à un accroissement des capillaires. Ce développement se fait non par segmentation des cellules musculaires préexistantes, mais par néoformation de cellules embryonnaires dans l'adventice. Le nodule entièrement myomateux au début, n'acquiert que plus tard une enveloppe

fibreuse par dégénérescence de ses éléments musculaires périphériques;

2o La dégénérescence fibreuse se fait à la suite d'une diminution de la circulation, par oblitération plus ou moins complète des vaisseaux et par disparition du tissu musculaire du nodule et formation de tissu fibreux du centre à la périphérie ;

3° La dégénérescence graisseuse nous paraît succéder aussi à un arrêt de la circulation, mais nous n'avons pas de renseignements sur la manière dont elle se produit;

4o La dégénérescence calcaire se fait d'une façon très analogue à la dégénérescence fibreuse. Elle débute toujours par le centre du lobule, c'est-à-dire par le capillaire qui disparaît;

5o La dégénérescence myomateuse débute par la paroi des vaisseaux qui se développe en grandes lamelles conjonctives contenant des cellules plates largement étoilées; la lumière du vaisseau est cloisonnée ou disparue, il y a formation d'un tissu muqueux qui se creuse, se fond et donne naissance aux grandes lacunes observées dans ce genre de dégénérescence;

6o Les dégénérescences cartilagineuse, osseuse et cancéreuse n'ont pas encore été nettement démontrées, mais nous paraissent très possibles;

7° Les formations sarcomateuses sont fréquentes dans les fibromyomes, 11 cas sur 21.

Elles débutent toujours par l'endothélium des vaisseaux. Elles s'infiltrent surtout par les pointes d'accroissement des capillaires entre les fibres musculaires et connectives qui disparaissent. Souvent les vaisseaux sont oblitérés par le sarcome lui-même. Il y a nécrose consécutive et formation de kystes sarcomateux.

Comme conclusion clinique, vu la fréquence de leurs dégénérescences sarcomateuses et myxomateuses, les fibromyomes de l'utérus doivent être regardés comme des tumeurs graves, et par conséquent être opérées le plus tôt possible.

Avant ce travail, Costes avait donné déjà une série de notes dont nous énumérons les titres :

Sur le rein de l'écrevisse fluviatile (Traduction de Vassiliew). Guide scientifique, mars 1884;

Note préliminaire sur les cœcums, sur les glandes intestinales et sur une nouvelle glande des crustacés décapodes. Comptes-rendus des séances de la Société de Biologie, 25 octobre 1890;

Contribution à l'étude de l'anatomie pathologique des fibromes de l'utérus et de ses annexes (En collaboration avec M. Pilliet). Comptesrendus des séances de la Société de Biologie, 20 octobre 1894;