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LES

PASTORALES DE LONGUS,

OU

DAPHNIS ET CHLOÉ,

TRADUCTION DE MESSIRE JACQUES AMYOT,

REVUE, CORRIGÉE, COMPLÉTÉE,

DE NOUVEAU REFAITE EN GRANDE PARTIE

PAR P.-L. COURIER.

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La version faite par Amyot des Pastorales de Longus, bien que remplie d'agrément, comme tout le monde sait, est incomplète et inexacte; non qu'il ait eu dessein de s'écarter en rien du texte de l'auteur, mais c'est que d'abord il n'eut point l'ouvrage grec entier, dont il n'y avait en ce temps-là que des copies fort mutilées. Car tous les anciens manuscrits de Longus ont des lacunes et des fautes considérables, et ce n'est que depuis peu qu'en en comparant plusieurs, on est parvenu à suppléer l'un par l'autre, et à donner de cet auteur un texte lisible. Puis, Amyot, lorsqu'il entreprit cette traduction, qui fut de ses premiers ouvrages, n'était pas aussi habile qu'il le devint dans la suite, et cela se voit en beaucoup d'endroits où il ne rend point le sens de l'auteur, partout assez clair et facile, faute de l'avoir entendu. Il y a aussi des passages qu'il a entendus et n'a point voulu traduire. Enfin, il a fait ce travail avec une grande négligence, et tombe à tous coups dans des fautes que le moindre degré d'attention lui eût épargnées. De sorte

1 Voir, dans le 4° volume, la lettre à M. Renouard, et toute la polémique au sujet de la découverte du fragment; voir aussi la Correspondance à cette époque.

qu'à vrai dire, il s'en faut de beaucoup qu'Amyot n'ait donné en français le roman de Longus; car ce qu'il en a omis exprès, ou pour ne l'avoir point trouvé dans son manuscrit, avec ce qu'il a mal rendu par erreur ou autrement, fait en somme plus de la moitié du texte de l'auteur, dont sa version ne représente que certaines parties, des phrases, des morceaux bien traduits parmi beaucoup de contre-sens, et quelques passages rendus avec tant de grace et de précision, qu'il ne se peut rien de mieux. Aussi s'est-on appliqué à conserver avec soin dans cette nouvelle traduction jusqu'aux moindres traits d'Amyot conformes à l'original, en suppléant le reste d'après le texte tel que nous l'avons aujourd'hui, et il semble que c'était là tout ce qui se pouvait faire. Car de vouloir dire en d'autres termes ce qu'il avait si heureusement exprimé dans sa traduction, cela n'eût pas été raisonnable, non plus que d'y respecter ces longues traînées de langage, comme dit Montaigne, dans lesquelles croyant développer la pensée de son auteur, car il n'eut jamais d'autre but, il dit quelquefois tout le contraire, ou même ne dit rien du tout. Si quelques personnes toutefois n'approuvent pas qu'on ose toucher à cette version, depuis si long-temps admirée comme un modèle de grace et de naïveté, on les prie de considérer que telle qu'Amyot l'a donnée, personne ne la lit maintenant. Le Longus d'Amyot, imprimé une seule fois il y a plus de deux siècles, n'a reparu depuis qu'avec une foule de corrections, et des pages entières de supplémens, ouvrage des nouveaux éditeurs qui pour en remplir les lacunes et remédier aux contresens les plus palpables d'Amyot, se sont aidés comme

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